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   - La Chronique critique du Théâtre à Paris - 
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             Magazine du Spectacle vivant ...
   

         
NERON

       

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NERON

de Gabor Kassov

Trianon

Mise en scène: Pierre Pradinas

avec Denis Lavant, Brigitte Catillon, Thierry Gimenez, Marie Trintignant, François Monnié, Riton Liebman, Gabor Rassov, David Mandineau, Hélène Viaux, Vanzetta, Laurent Desponds, Dom Farkas, Danik Hernandez. 

 

   

Oui, ça c’est du Théâtre!....

   

 

Pierre Pradinas est un metteur en scène inspiré qui ose aborder de front le délire onirique, le baroque fantasque, l’imaginaire luxuriant!...

Au final il propose des spectacles décalés qui font se télescoper les spectateurs et les acteurs dans une jubilation incomparable: Son Néron, et par suite celui de Gabor Rassov, auteur et néanmoins acteur de ce peplum, est un schizophrène qui s’engloutit dans une paranoïa aiguë!....   

Voilà pour le tableau clinique qui est synthétisé en scène par un buste de l’empereur fendu de haut en bas en son milieu. Fendu comme l’est également notre cerveau qui dans le meilleur des cas met sa zone créatrice et imaginative au service de sa zone rationnelle et logique. Néron, lui ne peut maîtriser cet équilibre souhaitable, car les dés sont pour lui pipés dès le départ: Il nous est présenté comme une victime sensible qui deviendra tyran sanguinaire par esquives successives!

Adolescent à l’âme lyrique, il devient l’instrument de conquête du pouvoir que son entourage se dispute. Renvoyant dos à dos les multiples manipulateurs dont sa mère et Sénèque sont les premiers officiants, il se fraye un chemin labyrinthique parsemés de coups fourrés tout à sa recherche d’une quiétude poètique!

L'interprétation de Denis Lavant est quasiment géniale; composant une silhouette désarticulée comme un pantin mu par une énergie frénétique, grimaçant à la manière de Charlie Chaplin, révélant une hyper-sensibilité gestuelle, ce comédien pénétrant en transe progressive et infinie, possède cet art magistral de nous donner à voir la jouissance à l’oeuvre, synchrone avec l’effroi!

       

Il commet de place en place des actes violents de plus en plus terrifiants qui le submergent lui-même d’angoisse. Ce jeu de distanciation que l’humour de l’Auteur et du metteur en scène guide à distance provoque chez le spectateur tout à la fois le recul horrifié en même temps que la complicité hilarante!

Tous les comédiens qui l’entourent composent pareillement, des personnages sur le même registre comme si chacun traversé par un fluide d’autonomie hystérique cherchait à recoller les morceaux d’un puzzle fou!

 

Ainsi Agrippine, Sénèque, Popée, interprétés respectivement par Brigitte Catillon, Thierry Gimenez, Marie Trintignant nous entraînent en compagnie des autres comédiens dans une valse hallucinée où les garde-fou peuvent céder allégrement les uns après les autres, tellement convaincus et conscients que nous sommes du jeu en abîme du théâtre et du plaisir de s’abandonner à sa spirale vertigineuse!....

Un tonnerre d’applaudissements pour nous ramener tous à la surface, en effectuant les paliers de décompression, ô combien nécessaires en multiples rappels de cette troupe en effervescence!...

 

Theothea le 5/12/97

                    

   

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