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Les Chroniques de Theothea

 Choix des Chroniques

 

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chroniques   de   36  à  40

 

      

LA NUIT JUSTE AVANT LES FORETS

de Bernard-Marie Koltes

Mise en scène: Kristian Frederic

 Choix des Chroniques ***

Théâtre des Abbesses

Tel: 01 42 74 22 77

Juché sur un praticable, comme perdu au milieu de la scène du théâtre des Abbesses, Denis Lavant tel un Robinson emporté sur le radeau des déluges se bat contre l’enfer!... Trempé jusqu’aux os, il affronte l’adversité avec un sourire grimaçant, en narguant le désespoir!...

Sa silhouette se débat avec les fantômes intérieurs que la vie semble incarner sous ses pas, en inventant à chaque instant l’hostilité du monde!...

A l’assaut de tous les démons, le locuteur de Bernard-Marie Koltès s’élève, tel le dernier homme Nietzschéen, en un affrontement frontal avec le vide absolu!...

Le texte sort de la bouche du comédien à la manière d’un torrent qui prendrait le temps de broyer consciencieusement chaque pierre qui roule, de façon à être certain qu’après son passage il ne restera rien!... vraiment plus rien!...

Physique, comme un rouleau compresseur, celui-ci s’avance en une pénombre où tous les repères d’humanité s’évanouissent au fur et à mesure qu’ils sont appelés à la rescousse!...

A l’intensité de cette plainte dans la nuit répond la densité du silence cachant à son tour l’oppacité des forêts qui, elles-mêmes...

Un comédien inspiré jusque dans l’âme de sa chair, prêt à endurer les pires maléfices pour ne laisser subsister aucune ombre, en faveur du doute!... L’art de se mettre au service de l’Art!...

Theothea le 13/11/00

APRES LA PLUIE

de Sergi Belbel

Mise en scène: Marion Bierry

 Choix des Chroniques ****

Théâtre de Poche

Tel: 01 45 48 92 97

 

 

Une terrasse d’immeuble s’apparentant à un bastingage de transatlantique et vogue la galère!...

La vie quotidienne d’une multinationale en métaphore des rapports de force, de compétition, de jalousie engendrés par toute société humaine s’efforçant de faire survivre ses membres dans une promiscuité inéluctablement quotidienne!...

Et tout d’abord, objectif prioritaire, débusquer les tabous pour mieux les transgresser!... Dans cette perspective, consensus autour de la cigarette!.... Chacun y allant a priori de sa chanson, version officielle: «Moi jamais, je ne fume pas!...» Et cependant à y regarder de plus près, quasiment tous, du bas en haut de la hiérarchie, sont atteints de démangeaison épidermique à propos de ce vice, précisément parce qu’il est strictement interdit par le règlement d’entreprise!...

Alors, quoi de mieux que cette terrasse à l’air libre où se côtoient virtuellement intérieur et extérieur, dedans et dehors, afin de s’épancher sur les tracas destructeurs, occasionnés par les enjeux de pouvoir privés et publics?

Féroce et naïf, l’être humain y apparaît grégaire et révolté!... Les contradictions y éclatent comme feu d’artifice au soleil!...

Chacun excelle au yeux d’autrui à brouiller les cartes d’un système que personne n’est en mesure de maîtriser!...

C’est effectivement surprenant de constater comment la mesquinerie des uns est capable de rivaliser avec la lâcheté des autres, mais c’est surtout hilarant d’observer tous les individus comme autant d’atomes égarés dans un monde qui apparaît à chacun comme lui étant personnellement hostile!...

Molière 99 de la meilleure pièce comique et faisant salle comble à chaque représentation les comédiens semblent en conserver la candeur de la création!...

Tous sont à féliciter pour leur participation exutoire à cette oeuvre digne du salut public!...

Theothea le 15/11/00

BERTOLT BRECHT POETE

de Laurent Terzieff

Mise en scène: Laurent Terzieff

 Choix des Chroniques **

Théâtre Molière

Tel: 01 44 54 53 00

 

 

Nul ne doute que Laurent Terzieff soit un jeune homme!... Un jeune homme qui aurait absorbé l’élixir pour une cure de jouvence à jamais fixée dans l’inconscient collectif!...

 

Visage décharné, minceur indicible, sa voix de basse chaude enveloppe les mots en une pensée ferme et lyrique!...

Peut-être lui-même ne le sait-il pas!... L’humour sied parfaitement au comédien, lorsqu’il fraye avec l’absurde!... C’est alors que son sourire un tantinet carnassier ravage le surréalisme d’une situation dépeinte par l’inspiration du poète!...

Après Rainer Maria Rilke en 98, c’est aujourd’hui Bertolt Brecht qui installe ses pas dans une chronique, proche du journal intime!... Sur la scène de la Maison de la Poésie, Laurent Terzieff les emboîte avec délectation en chef de file d’une compagnie qui réunit autour de lui, Pascale de Boysson et Philippe Laudenbach!...

Ce travail artisanal avec des proches lui convient désormais pour mettre en scène la conception du théâtre qu’il souhaite exprimer en exclusivité!...

Reprenant un travail sur la lumière déjà élaboré pour le spectacle «Rilke», Mamet Maaratié esthétise la poursuite des trois comédiens en des tableaux figés où éclate en contraste, le souffle uni de chaque voix avec le vers poétique!...

L’âme du spectacle, c’est évidemment Laurent Terzieff qui à chaque intonation réveille la magie du verbe, en irradiant ses partenaires de multiples éclats de lumière comme en un faisceau de stimuli!...

Un fil d’Ariane invisible semble ainsi les relier tous trois, plongeant avec une pudeur distanciée, dans l’intimité de l’auteur qu’ils célèbrent: «Bertolt Brecht, poète»!...

Theothea le 15/11/00

UN TRAIT DE L'ESPRIT

de Margaret Edson

Mise en scène: Jeanne Moreau

 Choix des Chroniques ****

Théâtre de Chaillot

Tel: 01 53 65 30 00

 

   

Qu’on le veuille ou non, cette pièce de Margaret Edson dérange le statu quo de l'intime conviction, car l'intrigue se déroulant tel un combat de l’esprit face à l’adversité organique, il est malaisé d’accepter l'abdication de celui-ci pour un abandon ultime au profit de la compassion!...

Ludmila Mikaël, chauve sous sa casquette de base-ball rouge et en chemise de nuit de blanc toute vêtue, semble survoler en état d’apesanteur le terrain des hostilités cliniques!... Comme transfigurée par une sérénité intérieure, elle donne rendez-vous à Viviane Bearing en un état de sainteté malicieuse!...

Celle-ci, Docteur en philosophie, spécialisée en poésie anglaise du XVIIème siècle, aborde la prise de conscience de sa maladie fulgurante, un cancer des ovaires en phase finale, comme s'il s'agissait d'une confrontation imprévue avec un groupe d'étudiants plus retord qu’à l’accoutumée!...

Bien décidée à imposer son schéma pédagogique de chercheur intellectuel vis-à-vis d’un processus de destruction maligne, elle affiche alors une clairvoyance d’observation et de jugement, propre à impressionner l’équipe hospitalière de haute renommée!...

Relevant effectivement d’une chimiothérapie expérimentale à dose maximum, elle fait feu de toutes périodes de rémission pour dialectiser avec l’oeuvre poétique et religieuse de John Done de façon à en élaborer une discipline de vie et à conforter son éthique personnelle!...

Cependant dans ce rapport de forces entre universitaires spécialisés, qui deviendra en définitive le cobaye de l’autre? Dans une première phase, il est fort possible d’estimer que sphères «médicale» et «philosophique» combattent à armes égales en terrain commun, mais comment ne pas admettre rapidement que douleur physique et déchéance d’une part, objet d’étude biologique d’autre part finissent par séparer irrémédiablement l’humanité en deux camps de nature opposée?

Toutefois, pour que la patiente en phase de régression ait le dernier «mot», lui sera offert l’opportunité de la sublimation, sans réanimation!.. Ainsi la catharsis deviendra le recours suprême de Vivian Bearing qui fort élégamment tire ainsi sa révérence!... Comme un trait de l’esprit!...

La mise en scène de Jeanne Moreau est tout simplement remarquable!... Un mouvement chorégraphique continue semble emporter l’équipe soignante qui officie dans un tempo de lumière translucide, apte à éclairer sentiments et ressentiments de chaque protagoniste!...

Ludmila Mikaël, Jeanne Moreau & Margaret Edson, trois femmes en incarnation d’une seule, pour une rédemption universelle!...

Theothea le 16/11/00

LADIES NIGHT

de A. McCarten, S. Sinclair, J. Collard

Mise en scène: J-P Dravel & O. Macé

 Choix des Chroniques ****

Théâtre Rive Gauche

Tel: 01 43 35 32 31

Théâtre Rive Gauche / Théâtre d'Edgar

 

A l’instar des films neo-réalistes du metteur en scène britannique Ken Loach, «Ladies Night» nous entraîne au coeur d’une région industrielle déshéritée de l’Europe, là où le chômage tend à désocialiser progressivement les laissés-pour- compte de l’essor économique!...

Et, c’est précisément dans la révolte face à cet abîme, que des initiatives éclosent à la manière des «chants désespérés» qui, comme on le sait, sont souvent les plus beaux!...

Donc, un groupe de jeunes gars désoeuvrés se retrouvent quotidiennement dans leur bistrot préféré, toujours en quête d’une aventure qui donnerait quelque sens à leur errance!...

Six types incarnant délibérément des rôles stéréotypés dont peuvent se prévaloir les «bandes» les mieux loties: Le timide, le rond, la grande gueule, le black, le rocker, le meneur...

Jusque-là nous naviguons, somme toute, en terrain connu!... Mais voilà que s’annonce le scoop, inspiré par une petite annonce du journal local: Les «Chippendale» organisent une soirée de strip-tease masculin à l’intention de la clientèle féminine!...

Tout de suite, cette info fait tilt chez Manu!... alors que ses copains se lancent dans une franche rigolade, inventant à qui mieux-mieux, la parodie balourde d’un effeuillage inattendu!...

Cependant l’idée est là, bien présente qui peu à peu, au fil de multiples tergiversations, va s’insinuer, progresser et convaincre l’un après l’autre, chacun de ces chômeurs en fin de droit!... Si les «Chippendale» osent, pourquoi pas eux, pareillement?

Le paradoxe s’installe: Comment retrouver la dignité de la vie sociale, en offrant précisément la provocation, en modèle de distanciation?

Voilà bien du grand art, en parfait équilibre instable sur corde raide, qui déclenchera l’imagination et l’excitation hilarantes autant chez les comédiens que chez les spectateurs!...

Menée dans un train d’enfer, en une succession de chassés-croisés des membres du groupe, tentant de se préparer psychologiquement et artistiquement au «spectacle de leur vie», la mise en scène élabore une trépidante comédie musicale, supervisée par Gérard, le patron du bar devenant leur coach et par Glenda, une ex-danseuse, promue en chorégraphe égérie!...

Une véritable leçon d’humanité où la pudeur morale tient lieu de cache-sexe virtuel et où l’audace individuelle initie et garantit le succès du projet collectif!...

Le dépassement de soi, en faisant violence par l’humour, à l’image de soi jusque-là préservée, voilà bien un défi propre à réveiller l’inertie ambiante!...

Un casting ciselé au scalpel garantissant la crédibilité des personnages dans des caricatures universelles!... une «rock and roll attitude» pour un spectacle de délire sous contrôle!... Et puis surtout, des comédiens qui assument leurs rôles et qui s’y impliquent sans réserve!...

Theothea le 20/11/00

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