Chronique
réunissant
"Le
Mariage", "La mère
confidente", "Les dernières
lunes", "La reine
écartelée", "Nuits
dans les jardins d'Espagne".
A cette période de l’année, lorsque s’éloignent
Les Molières et que s’annonce le
Festival
d’Avignon, le théâtre à Paris prend ses quartiers
de transit, soit pour créer des séries limitées de
représentations exceptionnelles, soit pour tester des créations
audacieuses, soit pour mener à terme des succès de
fréquentation!... Bref, il se pare de couleurs hors saison et cherche
un souffle que les beaux jours vont nécessairement lui ravir!...
Ainsi Jean Piat
(Les
dernières lunes) et Tsilla Chelton (Une femme de lettres),
captent-ils, grâce à leur notoriété hors pair,
un public conquis d’avance, à très juste titre!...
Au Théâtre Montparnasse, ce père veuf dialoguant avec
son fils marié ainsi que virtuellement avec son épouse
décédée, et même par la suite en
tête-à-tête solitaire avec une plante verte, illustre
avec tact le sentiment d’abandon commun à tous ceux qui vivent
l’exclusion de la vieillesse!....
Avec son sourire juvénile, Jean Piat réussit à nous
faire croire totalement au rôle de composition, en fustigeant l'âge
des déconvenues!...
Notre préférence va cependant aux scènes de confrontation
avec l’excellent Stéphane Hillel, son fils dans cette pièce
de Furio Bordon!....
A l’inverse sous l’impulsion de Jean-Pierre Miquel quittant cet
été son fauteuil de secrétaire général
de la Comédie Française, «Le Mariage» de Gombrowicz
dont la mise en scène de Jacques Rosner fait corps avec la subversion
surréaliste du propos, tend complètement à tort, à
faire déserter une partie des spectateurs après
l’entracte!...
Dommage notamment pour Roland Bertin quittant lui aussi le Français
début juillet, alors qu’il n’avait jamais été aussi
pertinent que dans ce rôle du père-roi, ainsi que
précédemment dans «Le retour» de Pinter.
Regrettable pour Andrzej Seweryn qui compose un «prince Henri»
aussi inquiétant que versatile, mais si proche d’une humanité
en grand désarroi!... Oser et réussir
«Le mariage» de Gombrowicz à la Comédie
Française, voilà ce qui est de toutes évidences, à
porter au crédit de la direction de cette vénérable
Institution!...
En revanche plus fédérateur
«La mère confidente» de Marivaux au
Vieux-Colombier où Claire Vernet s’essaye au comportement
schizophrénique de celle que Marivaux voudrait alternativement confidente
et mère!... Un écartèlement qui obligera tous les
protagonistes à s’écouter entre eux et sans doute à
se comprendre!... Mise en scène de Sandrine Anglade qui pourrait
effectivement évoquer la galaxie «Rohmer»!...
Et voici précisément «La reine écartelée»
de Christian Siméon, s’inspirant de «Amy Robsart» de Victor
Hugo pour en faire une comédie reprise au théâtre de
«L’étoile du nord» avant de migrer au
Festival d’avigon off
(théâtre du balcon). Mise en scène percutante de
Jean Macqueron, interprétation énergique et au second degré
de personnages historiques proches d’Elisabeth Tudor reine d’Angleterre,
pris en flagrant délit de mensonge pour raison d’état, à
moins que ce ne soit pour cause de libido, sous emprise de censure!...
Efficace, drôle et malicieux!... Christophe Garcia en Sancho Pança
de Robert de Leicester est irrésistible!...
Quant à Annie Girardot, la grande oubliée de «La
Pianiste» film tellement récompensé au
festival de Cannes,
c’est en ce mois de juin au Théâtre Molière, comme si
elle nous conviait à une répétition de ces «Nuits
dans les jardins d’Espagne» de Alan Benett adaptée par Jean-Marie
Besset!... Toute en fragilité volontariste, elle y théâtralise
sa lecture du script, agitant son personnage de Rosemary comme une poupée
de chiffons, lançant des messages de détresse!...
Bientôt tous les
festivals de
l’été vont nous tendre les bras!... A chacun de profiter
de ces opportunités estivales pour aborder à Paris avec ferveur
au-delà de l’été, la très prometteuse saison
théâtrale 2001-2002!...
Theothea le 12/06/01
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