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Les    Chroniques   de

  

17ème  Saison     Chroniques   17.056   à   17.060    Page  313

 

                                 

   

              

     

   

     

              

   

            

     

65ème Festival de Cannes 2012

sous ondée crépusculaire

   

Les Molières 2013

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R E V I V A L

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INVENTAIRES

de  Philippe Minyana

mise en scène   Robert Cantarella

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Théâtre de Poche Montparnasse

Tel  01 45 44 50 21  

 

           photo ©   Theothea.com

                             

Angèle, Barbara & Jacqueline, ce trio au féminin sorti d’un improbable reality show à l’heure du thé dansant déboule en prime time au Théâtre de Poche Montparnasse, en y assurant la réouverture en fanfare pour cause de rénovation, 26 ans après la création d’ « Inventaires » au Théâtre de la Bastille.

Voici donc que le même metteur en scène, Robert Cantarella, remonte, à l’identique, avec les trois comédiennes d’origine, ce spectacle parodique qui défrayait déjà la chronique théâtrale en 1987 en révélant un nouvel auteur, Philippe Minyana.

Une cuvette, un lampadaire et une robe de 1954 constituent les trois fils conducteurs thématiques, de ce rendez-vous vintage avec le public parnassien de 2013 pour lequel Florence, Judith et Edith ne laisseraient, sans aucun doute, leurs rôles respectifs à nulle autre, tant elles en sont les dépositaires légitimes et surtout désormais le garant d’une forme de pérennité.

Sous l’habillage d’un jeu télévisé prétexte à confessions intimes portées à ébullition, en raison d’une émulation savamment entretenue de manière lumineuse et sonore, à coup de réflexes pavloviens, un meneur de jeu fort prévenant dirige, mine de rien, les trois candidates à un surenchérissement d’aveux intimes.

Celles-ci flattées d’être l’objet d’attention redoublée ne se font pas prier pour affabuler sur le registre de l’imaginaire décliné au quotidien, digne de midinettes en transe !

Cet inventaire hétéroclite de candeur à la Minyana se perçoit, d’entrée de jeu, comme matière à une course miroir de nos sociétés contemporaines toujours prêtes à lâcher la proie pour l’ombre.

Que Florence Giorgetti, Judith Magre et Edith Scob continuent à prendre autant de plaisir à brocarder, du premier au énième degré, leurs personnages de fiction, démontrent, à rebours, à quel point leur complicité avec les spectateurs reste entière, si non accrue, envers un phénomène de régression cérébrale partagé joyeusement par tous, dans l’exacerbation accomplie des sentiments.

Theothea le 28/01/13

LA VENUS AU PHACOCHERE

de  Christian Siméon   

mise en scène  Christophe Lidon   

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Théâtre de l'Atelier

Tel  01 46 06 49 24 

      

           visuel affiche

                                    

Oui, L’Artiste c’est elle !…

Sur la scène du Théâtre de l’Atelier, la direction de Christophe Lidon la poursuit du jardin à cour, sans qu’Alexandra Lamy ne lâche prise, ne serait-ce que pour permettre au spectateur de respirer !

Littéralement accrochée à cet échange épistolaire à trois correspondants, fomenté par Christian Siméon, la Vénus plonge dans une belle époque, celle où Misia aurait renvoyé dos à dos le mari vaniteux et l’amant présomptueux.

Quant à Geai, sa grande amie et confidente, elle aurait joué les entremetteuses, telle l’apprentie sorcière se brûlant aux turpitudes d’un monde décliné au masculin triomphant.

A l’instar du cinéma muet découvrant subitement la force des mots, Strindberg y neutralise Bergson, Toulouse-Lautrec y rivalise avec Renoir, Sarah Bernhard y déclame en soliloque alors que le financier Edwards y défit l’intellectuel Thadée et, qu’à force d’envoûtements, Misia, elle, aurait tiré les marrons du feu de la liberté au féminin qui n’en pouvait plus de couver en silence.

     

     

        photo ©   Theothea.com

                                 

Mais la Vénus a un revers identitaire, c’est le Phacochère qui attend son heure, pour vaincre sans gloire mais surtout dans le désenchantement.

Fini alors la belle époque et ses fastes réjouissants, bonjour le nouveau monde sans lettres, télégrammes ou autres missives par porteur spécial qui faisaient tant vibrer le temps de l’attente et de l’échange à distance.

Sur les planches arpentées, d’abord au rythme de l’effervescence, puis ensuite du ressentiment, Alexandra accompagne le geste à la parole de Misia et ne laisse donc à quiconque le soin de régler la couleur des sentiments bafoués au feeling d’une gestuelle hyper-chorégraphique.

Theothea le 30/01/13       

TROÏLUS ET CRESSIDA

de  William Shakespeare   

mise en scène  Jean-Yves Ruf   

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Comédie Française

Tel  08 25 10 16 80 (0,15e/mn)  

         

           photo © Christophe Raynaud de Lage

                               

Adieu Salle Ephémère promise à d’autres destinées théâtrales ! Bonjour Salle Richelieu rénovée selon des normes techniques valorisantes notamment en ce qui concerne l’acoustique !

Le matériau propre à réverbérer le son, c’est le bois conjugué sous de multiples formes, du plancher aux portes de loges ou de balcon en passant par les sièges… tous dépouillés de leurs tentures, moquettes ou autres garnitures en tissus.

Voici donc qu’après une année de travaux, tout le monde rentre à la Maison… de Molière, les professionnels du spectacle, les comédiens et bien entendu le public qui, ensemble, assistent en cette fin janvier 2013 à ce grand retour célébré par la création de Troïlus et Cressida dans une perfection auditive inégalée jusque-là.

Pièce virile s’il en fût, tant la femme y est cantonnée à un rôle de monnaie d’échange machiste que deux peuples rivaux, en l’occurrence les Grecs et les Troyens négocient sans plus trop savoir les tenants et les aboutissants de leur lutte atavique !

Enjeux guerriers, politiques et philosophiques se disputent l’attention des uns contre les autres dans la durée d’un vécu shakespearien conjugué essentiellement au masculin pluriel.

   

     

           photo © Theothea.com

                         

Sur les six élèves comédiens, deux tout petits rôles féminins sont attribués à Carine Goron (Cassandre) et Nelly Pullicani (Andromaque) alors que, tout record battu, sur les quatorze comédiens du Français présents sur scène, un seul est dédié à une femme héroïne de la soirée, certes en raison de son interprétation valeureuse de Cressida (Georgia Scalliet) mais aussi grâce à la lassitude de contempler tant d’égos du sexe opposé, implicitement mal à l’aise.

Autant il paraît que cette mise en scène de Jean-Yves Ruf eût pu avoir une réelle pertinence au sein d’une programmation saisonnière bâtie autour d’une thématique illustrant, par exemple, les aberrations d’une parité systématique, autant à l’occasion de la réhabilitation de la salle Richelieu, il eût été tellement appréciable de découvrir un spectacle joyeux et festif mettant, notamment, en valeur chacune des nuances de cette palette architecturale sonore, enfin recouvrée !

Opportunité manquée ! Dommage !

Toutefois ce déficit de timing approprié n’ôte en rien à la performance artistique pleine d’humour latent que se livre une brochette de sept sociétaires pour un nombre similaire de pensionnaires !

Mesure pour mesure, répétons-le en signe de fort belle réussite; les spectateurs seront désormais satisfaits d’entendre le son des voix claquer net sans ressentir le désagrément des fréquences étouffées par les couches successives de matériaux absorbants.

Merci donc à ceux qui ont contribué à cette superbe rénovation, œuvrée pour le bien de tous.

Theothea le 01/02/13        

THEATRE SANS ANIMAUX

     

de & mise en scène   Jean-Michel Ribes    

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Théâtre du Rond-Point

Tel   01 44 95 98 21

 

           photo © Giovanni Cittadini Cesi  

                            

Au théâtre du Rond-Point, dont il est le Directeur, devenu un lieu mythique dédié à l’écriture contemporaine et à la Culture, Jean-Michel Ribes reprend un succès créé par lui-même en 2001 « Théâtre sans animaux » au Tristan Bernard, couronné par trois Molières dont celui de la meilleure pièce comique et un attribué à la pétulante Annie Gregorio, qu’on retrouve aujourd’hui sur scène avec Philippe Magnan et Christian Pereira.

Deux nouveaux interprètes, Caroline Arrouas et l’irrésistible Marcel Philippot les accompagnent, en 2013, dans les chemins de traverse de l’absurde et du surréalisme.

Dans un cadre familier empreint d'une confondante banalité, huit sketchs vont faire succéder une suite de portraits de gens qui semblent raisonnables mais qu’une incartade, un mot de trop font disjoncter et dériver dans un imaginaire loufoque.

Alors, le langage se disloque et jongle avec le non sens. Le grain de sable qui vient enrayer la machine provoque le dérapage, l’incohérence ou la rupture d’une logique absurde ou fantaisiste et la joute verbale se transforme en combat extravagant.

Prenons le sketch de la « Tragédie » : Tout part d’un petit mot « bravo » qui va entraîner un cataclysme conjugal.

Jean-Claude refuse d’adresser ce simple « bravo » à sa belle-sœur qui vient de jouer Phèdre de Racine:

« Je te demande de lui dire juste un petit bravo…/ Je ne peux pas »

« C’est le mot qui te gêne ? / Non, c’est ce qu’il veut dire »

L’insistance de Louise pour qu’il prononce ce mot entraîne d’abord un refus puis le rejet, l’exaspération et finalement la rupture du couple. Rien qu’un mot de cinq lettres, martelé de façon obsédante.

Dans un autre sketch, des hommes ordinaires poussant des caddies de golf, ont l’air de deux potes amicaux et vont délirer à partir du prénom Bob, trois lettres. L’insistance de l’un à appeler l’autre Bob alors que celui-ci ne le supporte pas envenime une situation au départ banale.

Les circonstances sont parfois burlesques et surréalistes. Quand un stylo à bille de trois mètres cinquante atterrit dans le salon d’une maison, la mère de Séverine, nationaliste creusoise tendance grenouille de bénitier, va y voir la manifestation du divin, un signe du destin et exhorter son mari et sa fille à prendre conscience de ce présage.

Jean-Michel Ribes, créateur des fameux « Palace », « Merci Bernard », « Brèves de comptoir », « Musée haut, Musée bas », « René l’énervé » s’y entend pour réunir une équipe de comédiens qui rendent parfaitement cocasse un univers décalé.

Il faut voir Marcel Philippot dans le rôle d’un benêt découvrant qu’il est plus intelligent que son frère aîné écrivain, ou le voir dans son salon, en coiffeur « normal » qui va se laisser berner par un irascible client, Christian Péreira, qui lui fera admettre qu’il peut devenir goéland.

Et miracle, déployant les bras telles des ailes, le coiffeur, à la fin de la séance, ramassera une plume avec les cheveux qu’il balaie. Illusion et croyance quand tu nous tiens...

L’impassible Philippe Magnan a oublié le prénom de sa fille âgée de dix-huit ans, excellente Caroline Arrouas : « Je peux savoir pourquoi tu me réponds quand je t' appelle Monique? » lui demande-t-il, ne comprenant pas pourquoi il l’aurait affublé d’un pareil prénom.

Il faut voir ensemble les cinq comédiens délirer au musée autour d’une question cruciale, pourquoi ne peint-on plus de carpes ? Et finir le sketch en imitant les nageoires des poissons avec leurs bras. Adéquation physique entre l’homme et le merlan ?

Les gags se perdent peut-être un peu sur cette grande scène et n’ont pas tous le même piment. Mais la succulence des comédiens réussit pleinement à nous délecter de cette planète rocambolesque.

Cet humour corrosif est sain comme le rire qu’il provoque.

Cat.S / Theothea.com, le 15/02/13 

MARIA CALLAS

de  Jean-Yves Rogale   

mise en scène  Raymond Acquaviva   

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Théâtre Dejazet

Tel  01 48 87 52 55  

 

        photo ©   Theothea.com

                     

« Vous chantiez ? Eh bien dansez maintenant ! »

C’est bien ce que La Dame blanche semble acquiescer, façon chorégraphique, à chaque intermède entre deux tableaux chronologiques où les deux Callas, La Maria mal dégrossie, et l’autre, la Diva gravure de mode, rivalisent à armes féminines acérées, manières schizophrènes.

En effet, sur la scène du Théâtre Déjazet, deux comédiennes, Lola Dewaere & Sophie Carrier, se mesurent au mythe de Callas, en une relation duelle où l’influence maternelle latente se télescope avec l’ambition de La Cantatrice en plein épanouissement.

Ainsi, en lutte profonde avec elle-même, Maria Callas va affronter à la fois sa carrière et sa vie amoureuse, à l’instar de deux entités vulnérables à la merci du moindre revers.

Entre la boulimie protectrice de l’adolescence et la séduction exacerbée de la maturité, son sens du perfectionnisme la pousse résolument à écarter sans ménagement ceux qui pourraient faire obstacle à l’accomplissement d’une destinée hors du commun.

A commencer par sa mère (Andréa Ferréol) qui aurait chercher à forcer son talent par des méthodes désuètes, ensuite c’est son imprésario, mentor et mari (Raymond Acquaviva) qui fera les frais subjectifs d’un procès en incompétences.

A peine, débarrassée des « boulets » qui, ainsi, auraient pu l’entraîner vers le bas, sa rencontre au sommet avec Aristote Onassis (Pierre Santini) sera, à son tour, menacée par l’apparition d’une rivale de taille internationale, Jackie kennedy (Cécile Pallas).

Si proche de l’Amour extatique et de l’idéal artistique, c’est malgré tout le manque de confiance en soi qui ressurgira aux moments clefs de son existence et finira par avoir raison de tant de luttes internes.

Et pourtant son charisme et l’admiration inconditionnelle de son public feront bloc, en se perpétuant jusqu’à nos jours, autour d’un talent vocal à nul autre pareil.

En osant la transgression et la démystification d’une pseudo Tragédie antique au profit d’un cynisme et d’un humour de Comédie, la violence des dialogues mis en scène par Jean-Yves Rogale pourrait s’apparenter à des règlements de compte récurrents avec le cordon ombilical ayant, sans cesse, tenté de nouer la Voix de la Diva.

Theothea le 05/02/13 

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