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Les    Chroniques   de

  

29ème  Saison     Chroniques   00.06   à   00.10    Page  491

 

     

     

       

                   

                 

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A.D.N.

"A.D.N." Le Test Azzopardi - Folle course identitaire & poursuite parodique au Théâtre Michel

                 

de  Caroline Ami et Flavie Péan

mise en scène  Sébastien Azzopardi

avec  Benoît Facerias, Anne Plantey, Alexandre Guilbaud, Valérie Even, Judith D’Aleazzo et Eric Pucheu    

***.

     

Théâtre Michel

      

© Emilie Brouchon

   

Alors que Caroline Ami & Flavie Péan les deux auteures nous informent que le fait de société dont elles se sont inspirées a eu lieu à Washington en juin 2014, il est loisible à qui le souhaiterait de retrouver leurs sources factuelles sur le Web pour prendre connaissance d’un syndrome "typologique" constituant le très surprenant mobile génétique ainsi que la clef thématique de leur pièce de théâtre.

Mais donc, comme tout un chacun des spectateurs invités à ne pas « divulgâcher » le plaisir de découvrir en live les ressorts de cette comédie haletante, nous n'en dirons pas davantage sur cette révélation scientifique et scénaristique cocasse.

En revanche, nous confirmerons que les deux comédiennes désormais dramaturges, s’immisçant dans la cour des grands puisqu'elles avaient déjà réuni leurs talents d'écriture, une première fois, dans un conte jeune public "Merlin: la légende Arthur et la fée maléfique ", ont décidé pour cette deuxième collaboration scripturale d'abonder leur trame originale présente par une pléiade de spécificités sociétales puisées dans la mouvance LGBTQIA+.

Délibérément décalés, cette succession de sujets s’incrémentant avec dérision et humour dans une enquête policière façon « Cluedo » s'ouvre à l'actualité américaine contemporaine comme on le sait toujours légèrement en avance d'un train, celui des mœurs privées, psychosociales ou politiques outre-atlantique en pleine ébullition.

C’est là précisément que Sébastien Azzopardi entre en piste avec son arsenal d’inventivité délirante et sa maîtrise d’un faisceau d’actions concomitantes se répercutant à qui mieux mieux face à l’assistance en phase immersive sous expertise policière débutant dès l’assassinat de la mère sur le point pourtant de faire des révélations à son fils débouté de sa récente paternité.

En effet, suite à la fécondation in vitro de son épouse, voici qu’un test A.D.N. devant authentifier la procédure génétique vient dénier à Tomas ses prérogatives paternelles au profit d’un oncle familial apparemment inconnu et, de surcroît dans la foulée, de le désigner comme le meurtrier par strangulation de sa propre mère sur laquelle ces mêmes traces A.D.N. auraient été relevées.

Le fond et la forme effectuant en l’occurrence une valse à mille temps chaotique, un véritable sac de nœuds existentiels semble se dresser au premier plan d’une scénographie extrêmement mobile où le millimétrage dialectique pourrait relever de contraintes propres à Feydeau.

Arrimés de plusieurs rangées de panneaux coulissant sur scène s’interposant entre eux à la manière d’une chambre noire photographique où l’intervention simultanée de plusieurs volets entrecroisés permettrait de régler la vitesse de l’obturateur, les interprètes se poursuivant les uns les autres au gré des rebondissements de l’investigation policière peuvent apparaître aux spectateurs par flashs intermittents voire stroboscopiques alors que des vidéos projetées contextualisent des lieux significatifs de Washington ainsi que des moyens de transports en commun ou privés relatifs à la progression frénétique de l’enquête.

Ce Thriller palpitant scénarisé comme une bande dessinée et mis en images comme au temps du cinéma muet est emmené en accéléré récurrent par cinq comédiens (Anne Plantey,  Alexandre Guilbaud,  Valérie Even,  Judith D’Aleazzo,  Eric Pucheu) dont la pleine ubiquité de la scène à la salle se transforme en terrain de jeu pour multiples rôles à géométrie variable autour de Tomas ( Benoît Facerias ) lui, en quête permanente de vérité identitaire face à l’adversité, indices et fausses pistes confondus, ainsi que confronté aux preuves réputées jusqu'alors intransgressibles de l’A.D.N.

Un véritable must prémonitoire, subversif et burlesque !

Theothea le 18/11/2024       

   

       

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LES LIAISONS DANGEREUSES

LES LIAISONS DANGEREUSES De Choderlos de Laclos à Arnaud Denis / Emprise, Séduction & Perversion à La Comédie des Champs-Elysées

               

d'après Choderlos de Laclos

mise en scène  Arnaud Denis 

avec  Delphine Depardieu, Valentin de Carbonnières, Salomé Villiers, Michèle André, Pierre Devaux, Marjorie Dubus & Guillaume de Saint-Sernin  

****      

Comédie des Champs-Elysées

      

© Cédric Vasnier

     

Près d’une décade plus avant, Arnaud Denis n’avait donc point été l’élu finaliste du casting dédié pour jouer le rôle de Valmont sous la direction de John Malkovich au Théâtre de l’Atelier.

Une impérieuse envie de corriger le destin habitait depuis lors le Comédien-Metteur en scène pour qui, l’opportunité souriait à nouveau plus récemment, lorsque le producteur Pascal Héritier lui proposait à la fois d’adapter et de mettre en scène « Les liaisons dangereuses » ainsi que de jouer lui-même Valmont.

Et il en fut ainsi en 2023 à La Tête d’or à Lyon où Arnaud Denis créait sa propre version remaniée et recentrée sur le duo mythique avec Anne Bouvier en Marquise de Merteuil.

Cependant cette prestigieuse affiche ne pourrait perdurer puisque une « hernie inguinale » fort mal réduite viendrait entraver la poursuite du projet dont Arnaud Denis ne pourrait plus qu’assurer la direction d’acteurs.

Cependant de ce mal bien malencontreux allait surgir l’excellence sous forme d’un nouveau binôme irradiant « Delphine Depardieu & Valentin De Carbonnières ».

Ceux-ci se sont emparés de leurs rôles respectifs avec une évidence confondante.

La préciosité du langage du XVIIIème ajoutée à une aisance démaniérée de le formuler dans la langue pastichée par Arnaud Denis faisait ainsi liens entre les extraits de leurs lettres échangées de façon à les transposer précisément en enjeu théâtral.

Le charisme de Delphine Depardieu dans cette partition lui aura, d’ailleurs, déja valu, à ce jour, de devenir la lauréate du Prix du brigadier remis le 12 décembre 2024.

Cependant il pourrait être étonnant, à l’époque actuelle régie notamment par « MeToo » et l’ensemble des mouvements émancipateurs associés, d’observer que non seulement la critique quasi unanime mais aussi et surtout le public faisant un triomphe à cette adaptation qui aura souhaité contextualiser l’enjeu dramaturgique en le maintenant en son siècle d’origine sous les mœurs et costumes alors en cours, auront permis ensemble d’échapper par une sorte de magie surnaturelle à tout anathème idéologique édicté par la bien-pensance contemporaine.

En effet comment donc tant d’indélicatesse, de cruautés, de perversions, de prédations machiavéliques et sulfureuses peuvent-elles avoir franchi impunément la ligne rouge du supportable aux yeux du gardiennage des relations genrées voulant les préserver de toute emprise toxique ?

Si ce n’est parce que ce recueil épistolaire s’érigeait en libre expression artistique à l’abri précisément de tous les diktats moraux.

Ainsi qu’également parce que l’opinion devait y trouver de façon sous-jacente la dénonciation radicale des objectifs poursuivis par Merteuil et relayés par Valmont ?

Mais c’est encore au-delà de ces considérations spéculatives que devrait se situer le blanc-seing de l’immunité car, tout en affichant la distanciation linguistique de l'humour, Arnaud Denis semblerait avoir procédé selon l’intuition du retournement vertueux depuis son contraire.

Ainsi l’énergie sans faille que met Merteuil à vouloir venger la condition féminine de toute l’histoire du patriarcat, ne pourrait, au demeurant, qu’en forger une personnalité initiatrice d’un féminisme bien compris.

En conséquence Valmont, lui, qu’il soit mu par ses propres motivations de conquérant ou seulement influencé par les défis que lui dicterait Merteuil, serait dans tous les cas, un être paradoxalement faible ne sachant pas se dominer lui-même.

Son sort est donc scellé, il sera sacrifié sur l’autel de la lâcheté : « Ce n’est pas ma faute ! ».

Et Merteuil, elle, pourra fuir le monde où elle souhaite mais son aura restera, paradoxalement, celui d’une pourfendeuse de l’iniquité.

Et bien entendu, c’est la langue de Choderlos de Laclos qui sortira, comme depuis des lustres, grande gagnante de leur lutte sans merci et, par ailleurs pareillement, c’est la perspicacité bien éclairée d’Arnaud Denis qui récoltera tous les satisfecit que ce duel de manipulations et de surenchères au sommet aura su engendrer de façon magistrale.

A la Comédie des Champs-Elysées, les mélopées récurrentes de la 7ème symphonie de Beethoven introduisent avec maestria cette corrida assoiffée de victimes abusées qui n’en peuvent mais.... Ces mêmes ultimatums musicaux viendront d’ailleurs au final en apaiser les turpitudes exposées.

Entre-temps, Salomé Villiers (Madame de Tourvel) & Marjorie Dubus (Cécile de Volanges) auront magnifiquement expié le non consentement universel face aux prédateurs intemporels...

Ainsi tout est classe !... L’élite aristocratique repousse au plus loin d’elle-même les affres de la souffrance d’autrui provoquée délibérement mais son intuition sensitive lui fait pressentir que cette situation de marionnettistes ne pourra perdurer.

Il lui faudra donc s’effacer discrètement au profit d’un monde nouveau... et très certainement plus juste.

Theothea le 27/11/24

     

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LES FAUSSES CONFIDENCES

« Les Fausses Confidences » Marivaux / Françon Tournée 24-25 passant par Les Amandiers Nanterre

                       

de   Marivaux

mise en scène    Alain Françon 

avec   Pierre-François GAREL, Guillaume LÉVÊQUE, Gilles PRIVAT, Yasmina RÉMIL, Séraphin Rousseau, Alexandre RUBY, Georgia SCALLIET, Maxime TERLIN, Dominique VALADIÉ

****  

     

Théâtre Des Amandiers

      

©   Jean-louis Fernandez

       

A la suite de sa création en 2021 de « La seconde surprise de l’amour » lui ayant permis par antidote apaisante de faire résilience à une agression vitale subie et par essence traumatisante, Alain Françon prolonge désormais son délicieux compagnonnage de Marivaux avec une comédie amoureuse où la spéculation des sentiments est soumis à un essorage sensiblement peu délicat.

C’est donc précisément à l’aune des tourments et entraves successifs que pourra être éprouvée la réelle valeur des convictions affichées face aux pressions influentes fusant contradictoirement de toutes parts.

S’éloignant résolument de tout psychologisme, le metteur en scène décide une fois pour toutes de n’accorder son crédit qu’au texte, à ses inflexions, à ses intonations, à son rythme quitte à les contredire ponctuellement par des relâchements inopinés et décalés dans la gestuelle des comédiens.

Fort de cette perspective, point d’explication sémiologique à priori, c’est exclusivement par la parole marivaudienne exprimée dans l’instant présent que se fera la compréhension des enjeux en présence.

Ainsi d’emblée nous découvrons que Dorante est follement épris d’Araminte mais que cet amour lui semble inaccessible tant leurs situations financières sont dissemblables. Dubois son ancien valet entré au service d’Araminte va s’improviser stratège en lui conseillant de postuler au rôle d’intendant laissé vacant alors que Monsieur Remy oncle de Dorante contribuera à cette entrée en fonction sous le regard courroucé et méfiant de la mère d’Araminte...

Une fois en place, bien des quiproquos fomentés ou spontanés vont émailler l’objectif amoureux poursuivi... alors que moult propos alambiqués à la fois par pudeur ou vénalité vont tisser un labyrinthe de malentendus feints ou candides.

Cependant le cheminement de cette intrigue sera réellement dicté par les tergiversations d’Araminte tentant de démeler le vrai du faux, la sincérité du calcul, la posture de l’imposture mais surtout cherchant à voir clair dans son propre désir de femme...

En effet ces « confidences » pourraient fort bien dissimuler et, de fait, constituer le narratif contrarié d’une émancipation malaisée mais ardemment souhaitée.

Aussi qu’un portrait survienne inopinément dans le fatras de la réfutation ou de l’aspiration et voilà que les coeurs et les esprits s’emballent sur l’identité de l’auteur et du sujet au point d’en brouiller la pertinence du ressenti collectif.

C’est bien pourquoi Alain Françon recommande à ses comédiens de ne ne prêter leur attention qu’à ce qu’ils disent plutôt qu’à ce qu’ils pourraient éventuellement penser ou intuitionner.

Ainsi de leurs échanges dialectiques complexes, maladroits voire évanescents naîtra dans l’imaginaire du spectateur la lueur d’une sincérité échappant au rationnel, celle d’un « marivaudage » en l’occurrence bien compris.

Dans un décor de colonnades conceptuelles néo-classiques où failles et ouvertures invitent aux échappées belles hors-champ, la dizaine de comédiens (Compagnie des nuages de neige) se relaient sur les planches, ce soir-là donc aux Amandiers, dans une chorégraphie du verbe resté indéchiffré mais tellement plaisant jusqu’à rendre le potentiel de l’Amour flagrant et indéniable.

Theothea le 09/12/24

   

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VISITES A MISTER GREEN

« Visites à Mr. Green » En quête de tolérance éclairée au Théâtre de Passy

                 

de  Jeff Baron 

mise en scène  Thomas Joussier 

avec  Patrick Préjean &  Thomas Joussier  

***.

     

Théâtre de Passy

      

©  D.R.  

     

Depuis son entrée professionnelle sur les planches, Thomas Joussier privilégie la pièce emblématique que lui avait conseillée John Berry l’un de ses maîtres à penser avec lequel il aurait dû jouer si celui-ci n’était pas malheureusement disparu durant les répétitions.

Reprenant le flambeau de cette création de l’auteur américain Jeff Baron ayant triomphé à Broadway, Thomas Joussier, depuis 2001, adapte, met en scène et la joue, à intervalles réguliers, de reprise en reprise.

D’abord en compagnie de l’immense Philippe Clay, puis ensuite successivement Jacques Boudet, Claude Evrard et désormais Patrick Préjean au Théâtre de Passy, Thomas Joussier endosse systématiquement le rôle de Ross jeune cadre dynamique qui, en raison d’une conduite automobile trop rapide, aurait déséquilibré un piéton de 86 ans et aurait ainsi été condamné à une peine de travaux généraux l’obligeant à venir rendre visite une fois par semaine à sa victime Mister Green.

Celui-ci vivant reclus depuis qu’il fut devenu veuf, n’apprécie point a priori cette démarche préférant continuer à survivre dans son foutoir personnel sans aide extérieure perturbatrice.

Cependant ces prémices étant d’emblée posées, commence alors une situation relationnelle contradictoire où les deux hommes vont d’abord cohabité tant bien que mal mais aussi peu à peu à la lumière de confidences plus intimes s’apercevoir qu’aux failles de l’un pourraient peut-être correspondre celles de l’autre si, toutefois, chacun des deux décidait de faire un pas vers ce qui ne lui est pas habituel, à savoir remettre en question ses propres certitudes et réflexes de vie.

Selon un jeu de miroirs réflexifs se renvoyant l’image à l’infini, c’est comme si se dressait alors entre l’un et l’autre une véritable échelle des valeurs destinée à relativiser toute conviction ancrée dans l’idéologie héritée de l’éducation et la culture mais aussi de celle acquise auprès de la bien-pensance, ou jugée comme telle, dans l’instant présent.

Cette démarche subtile, faite d’affinités autant que de reproches davantage réparateurs que sententieux, aura pour effet d’installer un climat de confiance réciproque mêlée néanmoins à des rapports de forces contrariées mais finalement plus compréhensibles que divergents.

Il ne serait pas judicieux de révéler ici les réels enjeux qui vont se succéder au fil de leurs échanges mais ce qui ressort de cette progression en binôme c’est la dimension pleinement universelle des préoccupations focalisant l’empathie spontanée des spectateurs au gré d’un suspense constamment renouvelé.

Bien sûr, le jeu des deux interprètes est forcément très important au regard de l’impact provoqué sur l’écoute émotionnelle du public.

Si désormais Thomas Joussier semble faire corps et âme avec le personnage de Ross, Patrick Préjean a, lui, l’élégance et la disponibilité heureuses de rendre Mister Green à la fois tellement bougon et pourtant si sympathique.

Une performance festive donc qui se termine actuellement au Théâtre de Passy avec la fin de l’année 24, mais gageons que Thomas Joussier rebondira à nouveau ultérieurement avec ce fameux duo symbolique.

Theothea le 16/12/24

           

     

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LE SOURIRE DE DARWIN

                 

de  Isabella Rossellini 

mise en scène  Muriel Mayette-Holtz 

avec  Isabella Rossellini  

***.

     

Théâtre de La Scala Paris

      

© Theothea.com

   

La Scala de Paris métamorphosée depuis sa construction en 1873, ayant été longtemps un célèbre café-concert, est aujourd'hui un véritable lieu de création théâtrale où les artistes dévoilent leur projet dans une plénitude absolue. C'est ainsi que, ce samedi 23 novembre 2024, devant une jauge archi-bondée, Isabella Rossellini semble se mouvoir dans un bien-être physique communicatif.

Rayonnante et énergique, elle reprend pour quelques dates en tournée un spectacle conçu par elle en avril 2022 à l’occasion de l’inauguration de la nouvelle salle des Franciscains du Théâtre National de Nice et mis en scène par Muriel Mayette-Holtz, qui en est la Directrice et ancienne administrative de la Comédie-Française.

La fille d'Ingrid Bergman est lumineuse dans '' Le sourire de Darwin ''. Un sourire qui l'accompagnera tout au long du spectacle, tel un véritable emblème d'une expression universelle qui serait innée et que tout le monde appréhende comme une marque de sympathie et d'empathie. Le sourire serait génétiquement déterminé puisqu'il apparaît chez les enfants aveugles de naissance alors que d'autres expressions seraient acquises et façonnées au fil du temps.

Sur un fond d'écran projettant des femmes du cinéma muet en noir et blanc dans un état d'épouvante et de douleur utilisant la distorsion faciale et gestuelle pour exprimer ce qu'elles ressentent et qu'elles ne peuvent rendre avec les mots, Isabella déboule pieds nus, très à l'aise, et s'empare de leur langage corporel qu'elle parodie avec une malicieuse jouissance en articulant les paroles qu'elles auraient émises dans un tel état paroxystique « Je suis désespérée, il m'a quittée, il est parti.... ne me regardez pas je suis affreuse ».

Main sur le front, geste menaçant avec son autre poing, l'actrice offre un véritable numéro de pantomime, elle sait montrer au public comment on joue avec les codes pour donner l’impression d’un gros plan, d’un travelling. Les Georges Méliès, Charlie Chaplin, Buster Keaton sont pour elle une référence absolue.

Elle démontre qu'une même phrase « Je vous aime et je veux rester avec vous toute ma vie » peut exprimer des sentiments différents suivant l'intonation avec laquelle les mots sont prononcés, tout aussi bien l'amour que le rejet où explose son talent d'actrice longtemps refoulé, dit-elle, à cause d'un vrai complexe d'infériorité à l'égard de la fabuleuse renommée de sa mère. Elle sera cependant propulsée au rang de star mondiale grâce au réalisateur David Lynch, qui la dirige dans le film '' Blue Velvet '' et enflammera le monde du petit écran.

De ces émotions humaines, elle glisse vers les émotions qu'éprouveraient également les animaux. Est-ce qu'un chien ou un chat ne tremblera pas comme l'homme sous l'effet de la peur ? Pour certains, il ne s'agirait que d'instinct. Comme le naturaliste Darwin qui défendait la continuité entre l’humanité et les animaux, Isabella en tant que biologiste et éthologue (à 55 ans, elle a passé un master d'éthologie ) s'intéresse au comportement humain à la lumière d'exemples empruntés au monde animal et observe l'importance du rituel. Ainsi, nous amuse-t-elle, en parlant de l'attitude des poules offrant leurs pattes en l'air lors des bains de poussière qu'elles affectionnent particulièrement.

Comme éthologue d'une part et comme actrice d'autre part, elle se met dans la peau d'animaux et se transforme en revêtant des habits ( costumes de Rudy Sabounghi ) pour les mimer; ainsi le singe tel King Kong, cet immense gorille, qui montre une sorte de lien entre l'humain et l'animal ou, revêtue d'une robe fourreau verte aux grands volants bleutés dressés en éventail, elle pousse un bruit de trompette pour imiter le paon et faire la roue.

Elle ira jusqu'à se grimer en Darwin qui soutient l'idée d'un processus évolutif par lequel de nouvelles espèces se forment à partir d'ancêtres communs. Ainsi, on peut changer la race d'un chien à partir du chiot sur plusieurs générations. Les changements de race, c'est comme les langues avec le temps, çà change... le latin devient le français, l'espagnol, l'italien. Puis se déforme en un dialecte qui devient une nouvelle langue etc...

Elle nous parlera encore de l'instinct maternel; la vie sexuelle des animaux hermaphrodites comme le ver de terre ou l'escargot qui, avec le temps, passent de mâle à femelle.

Par le biais de la comédie, le monologue d'Isabella Rossellini prend la teneur d'une érudite conférence accompagnée de facéties rendant le texte plus vivant et plus drôle. Elle joue comme une enfant. Elle peut être un chimpanzé, un mollusque, un oiseau avec un naturel confondant et nous communique ainsi ses passions et ses connaissances avec une impressionnante légèreté. Bravo l'Artiste !

           

Cat’S / Theothea.com le 02/12/24    

       

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