Magazine du Spectacle vivant ...

   

 

   

Les    Chroniques    de

  

13ème  Saison     Chroniques   13.56   à   13.60    Page  217

 

   

Âge tendre troisième tournée   

   

BONNE ANNEE 2009

     

SAMEDI DE FETE EN 2008

SAPHO AU CAFE DE LA DANSE

DICK RIVERS  A  L'ALHAMBRA

     

61ème Festival de Cannes

Palme d'or, juste " Entre les murs " de mai 08

            

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HORS-PISTE

de  Eric Delcourt 

mise en scène  Eric Delcourt & Dominique Deschamps

****

Théâtre de La Renaissance

Tel:  01 42 08 18 50   

 

       Visuel affiche                 

     

Du théâtre Fontaine au Théâtre de la Renaissance, d'une création en mai 08 en prolongations en janvier 09, "Hors piste" est désormais sur les rails qui ont précédemment conduit "La soeur du grec" au triomphe.

Leur auteur et, cette fois-ci, metteur en scène, Eric Delcourt récidive dans le vaudeville post moderne où la "déconnade assumée" serait le résultat d'une écriture au scalpel pleine de références déguisées, servie par une interprétation parodique à outrance.

En renouvelant la distribution féminine dont Marie Montoya était la coqueluche des critiques initiales, la direction d'acteurs monte d'un cran dans l'exacerbation générale des tempéraments trempés à l'encre de la caricature comportementaliste contemporaine.

Ainsi Cookie (Smadi Wolfman) et Blandine (Lilou Fogli) vont-elles, chacune dans leur style, affoler les compteurs sismiques des trois "copains d'avant" Tom (Olivier Bouana), Stan (Eric Delcourt) & Francis (Cyrille Eldin), en leur opposant un miroir à peine déformant du comportement machiste stéréotypé.

Réunis par Tom pour un week-end dans son superbe chalet d'Ariège, en l'occurrence face aux Pyrénées car "Les Alpes c'est mort", une ascension de l'extrême par hélicoptère est prévue pour le lendemain...

A coups de téléphones portables sur les sommets de la balourdise où l'incompétence de Pierre (Franck Molinaro), leur guide de haute montagne est à l'image d'une société high-tech se laissant diriger par toutes les velléités projetées en mirage du libre-arbitre, les six protagonistes vont se coltiner avec l'avalanche de leur vie.

Ce déluge de neige fraîche est à encadrer comme un trophée destiné au nettoyage à sec du cerveau.

Assurément, cela fait beaucoup de bien !...

Theothea le 22/01/09

MUSIC HALL

de    Jean-Luc Lagarce

mise en scène  Lambert Wilson

****

Théâtre des Bouffes du Nord

Tel: 01 46 07 34 50 

 

        visuel  dessin ©  Cat.S

   

Quelle serait la face cachée de Fanny Ardant ? Quels sont ces démons intérieurs ? Quelle serait la zone noire de sa personnalité ? Jamais, nous n'en saurons rien, car "La Fille" s'avance "lente et désinvolte" vers l'avant-scène des Bouffes du Nord et, d'un geste ample à la cantonade, lance avec un malicieux sourire à demi-masqué: "Restez assis".

Là, où "La Fille" s'apprête à faire son numéro quotidien entourée de ses deux boys (Eric Guérin & Francis Leplay) en faire-valoir, Jean-Luc Lagarce glisse les mots qui vont lui permettre de dénier toute tendance dépressive grâce à la structure d'une langue se conjuguant en rituel salvateur.

Sous une pelisse en fourrure doublée de rose fuchsia, une robe de soirée, tanguant entre vert citron et pistache, lestement rehaussée d'une ceinture en diagonale dorée, s'élève vers une perruque blonde faisant mine d'être le centre de gravité de "La Fille" siégeant sur son tabouret de bar.

Alors que, sur les tréteaux au ras du sol, traînent négligemment des canettes ou autres projectiles, cautions de la représentation de la veille, la première tâche du trio consistera à se recomposer un décor minimaliste nécessaire à leur espace vital, en gage d'un bien être à reconquérir chaque soir.

Cependant, en tribut à leurs rêves de splendeur artistique, ces amants du spectacle vivant jouent à se faire peur, en butte au cynisme du public qu'ils attendent avec l'appréhension de débutants.

S'étant mis lui-même hors-jeu, Lambert Wilson, au service exclusif de ses trois comédiens, imagine une chorégraphie du dépassement de soi intronisant "La Fille" sur un piédestal pour vocation à toutes épreuves.

Ainsi, telle une princesse Shiva en tournée du pauvre, "La Fille" pourra décliner ses ambitions d'ex-Diva confrontées à l'incompréhension général à l'égard de son artisanat à fleur de peau, comme en écho au leitmotiv de Joséphine Baker:

"Ne me dis pas que tu m'adores mais pense à moi de temps en temps..."

Au final ce soir-là, des embrassades de roses viendront joncher le parterre depuis la corbeille pour que "La Fille" qui voulait être "Fanny Ardant", le soit pour de vrai, le temps des rappels enflammés.

Theothea le 19/01/09

JOURNAL A QUATRE MAINS

de    Flora & Benoîte Groult

mise en scène  Panchika Velez

****

Théâtre de Poche Montparnasse

Tel:  01 45 48 92 97   

 

     Photo ©   Lot  

   

Sur la scène du Théâtre de Poche, deux lits s'opposent symétriquement comme lieu intime des confessions adolescentes de deux sœurs très complices dans leur dissonance de caractère.

La plus jeune d'une quinzaine d'années, mutine, légère, coquette, semble prendre les choses de la vie avec une bonne dose d'insouciance; l'aînée en intellectuelle, poursuit des études de latin grec, tout en se montrant davantage inhibée et réfléchie.

Ces deux jeunes filles pleines d'énergie, issues de la haute bourgeoisie et plongées à leur insu dans un moment crucial de l'Histoire, à savoir les années de guerre 40-45, côtoient les grands artistes de l'époque et vont ainsi devoir ruser avec l'occupation en surfant sur ses contraintes, mais sans toutefois s'impliquer outre mesure.

Car, ce récit à deux voix est surtout un récit de confidences sentimentales où l'une cherche à plaire avec tous les atours de la séduction, et où l'autre, se défiant du "mâle", se mariera néanmoins durant la guerre afin de quitter l'appartement familial.

Son époux rural sera tué mais pas d'appesantissement sur les meurtrissures de la vie, car bientôt les Américains seront là avec leurs bras grands ouverts de charmeurs! …

Ainsi, les évènements sont effleurés par touches impressionnistes et, tel un prélude de Chopin aérien et musical, cette pièce tirée du "Journal à quatre mains" de Flora et Benoîte Groult, se révèle comme un parcours initiatique, mené à la fois avec légèreté et gravité, tout en octroyant beaucoup de vitalité à ces croqueuses de l'existence.

Les deux monologues se croisent dans une savoureuse modernité de regard et de mots, parsemés d'un humour parfois impertinent.

Dans leurs combinaisons couleur pêche abricot ou dans leurs robes en coton fleuri, les deux comédiennes se complètent merveilleusement au diapason de leurs différences.

Lisa Schuster, ayant adapté le "Journal" avant d'en confier la mise en scène à Panchika Velez, s'affiche espiègle à souhait alors qu'Aude Briant, avec une énergie carrée, incarne une subtile Benoîte, tergiversant entre sagesse naturelle et voluptueuse tentation.

Une force secrète de l'évocation et une dimension comique émanent de ce récit qui, telle la balle de tennis, jaillit, rebondit, passe d'une raquette à l'autre sans relâche dans un rythme taquin et d'entente fraternelle que Flora a défini par cette phrase: "Je t'aime parce que tu as voyagé à travers mon enfance. Tu es une pièce maîtresse de mon passé".

Cat.S & Theothea, le 31/01/09

UN GARCON IMPOSSIBLE

de    Petter S. Rosenlund

mise en scène  Jean-Michel Ribes

****

Théâtre du Rond-Point

Tel:  01 44 95 98 21   

 

      visuel programme  

   

En stigmatisant la famille et la société occidentale qui en cautionne la structure, Jean-Michel Ribes fait une lecture morale du dramaturge norvégien Petter S. Rosenlund.

La programmation 08-09 du Théâtre du Rond-Point étant axée sur la thématique familiale, la pièce "Un garçon impossible", créée en Norvège en 1997, y trouve aisément sa place, alors précisément que chacun des membres de la tribu étudiée semble y trouver la sienne avec beaucoup d'approximations.

En effet quel père (Eric Berger), quelle mère (Hélène Viaux), quelle amante (Isabelle Carré), quel grand-père (Jean-Yves Chatelais) trouvent-ils leur réelle fonction au sein d'un jeu de rôles où des soignants professionnels, empêtrés dans leur propre schizophrénie, s'essayent à pister l'esprit malin afin de diagnostiquer la source du mal profond dont souffre le corps social ?

En optant pour le ton de l'absurde et de l'humour noir, Jean-Michel Ribes choisit de nous faire rire d'une situation clinique où chacun des protagonistes marche à côté de son ombre maléfique.

Au centre d'un vaste hall d'accueil où débouchent les portes pare-feu transparentes de salles et couloirs médicaux contigus d'un improbable hôpital, le chassé-croisé vaudevillesque s'organise autour de l'inceste et l'adultère, la stérilité et la réincarnation, la somatisation et le symbolique, dans lequel comme à guignol, un ballet de chaises musicales aura raison de tous les masques de clown en surenchère.

C'est donc Jim, le fils de famille (Micha lescot) qui extraira les marrons du feu de cette course poursuite avec l'invraisemblance relationnelle, en trucidant ses proches l'un après l'autre, consciencieusement et sans état d'âme apparent, tout perché sur des chaussures à roulettes le rendant majestueux et insaisissable dans sa démarche meurtrière.

Serial killer à 8 ans; la détermination rationnelle n'attend point le nombre des années pour celui qui se souvient que sa meilleure amie était une araignée qu'il protégeait dans une boîte à chaussures jusqu'à la décision impulsive de l'exécuter.

Aussi, mieux vaudrait rire jaune au Théâtre du Rond-Point avec cette montée en puissance d'un humour intempestif inversant, pour la démonstration, les préceptes de causalité car selon Jean-Michel Ribes "ce n'est évidemment pas l'enfant qui est impossible, mais, le monde dans lequel il naît qui l'est ".

Theothea le 26/01/09

HAIR

de  Gérôme Ragni & James Rado

mise en scène  Ned Grujic

****

Théâtre Le Trianon

Tel:  01 44 92 78 04   

 

        visuel affiche  

   

De haïr à Hair, la différence syntaxique ne tiendrait ici qu'à un cheveu:

C'est pourquoi, en mettant le double point sur le " i " articulant, de manière subliminale, une signification sémantique contradictoire, plus que jamais, l'enjeu de cette comédie musicale des seventies arbore sur l'affiche, une force symbolique, grâce à son fameux effet de faciès en miroir, tout en opposant le rouge, couleur du sang à celui du vert, couleur de l'espoir.

Ainsi de 1969 à 2009, loin d'une quarantaine la mettant au rancart de l'Histoire, c'est l'immanence d'un cri collectif qui resurgit du tréfonds de la mémoire paradoxale pour fustiger la guerre en imposant Paix et Amour à travers un langage fleuri remis au goût du jour.

Du Vietnam à l'Irak, de la révolution libertaire à la communication high-tech, de "I have a dream" de Martin Luther King à "Yes we can" de Barack Obama, il n'y aurait qu'un pas à franchir, le seul qui vaille, celui de la bonne volonté, ouvert sur un humanisme à concevoir de nouveau.

C'est inspiré par un tel objectif emblématique que le metteur en scène, Ned Grujic a eu le désir d'une re-création à la française de HAIR, afin de porter sur la scène du Trianon 40 ans plus tard, une distribution de choc où garçons et filles, sautant plusieurs générations, peuvent fédérer autour du spectacle vivant, l'espoir d'un monde nouveau.

Les point forts de la réalisation sont à capter dans le charisme et l'interprétation de cette jeune troupe dynamique ainsi que dans le parti-pris métaphorique de l'adaptation artistique du texte (Sylvain Meyniac) et de l'orchestration (André Villani & Alberto Centofanti) sous forme de parabole synthétique.

La chorégraphie (Raphaël Kaney-Duverger) et le décor (Giulliano Spinelli) sont conçus à la manière de tableaux du Pop-Art dont l'esthétisme relèverait de points de vue picturaux à la fois complexes et sobres.

L'impression kitsch, qui se dégagerait des costumes (Sara Bianchi) et du look, a le mérite de se démarquer d'une mode vintage contemporaine, sans pour autant trahir l'idéologie de l'époque hippie.

Les voix (Emanuelle Frielo) sont soutenues par une bande-son dont la qualité acoustique est relative aux contraintes architecturales du Trianon.

Cependant "Let the sunshine", "Aquarius" et "Hair" pour ne citer que les airs les plus connus, peuvent ainsi résonner dans les coeurs et les esprits, comme au premier jour et c'est cela qui compte.

Animés par le feu de Dieu, les quatorze comédiens, emmenés par Fabian Richard, Laurent Ban & Liza Pastor, décoiffent les codes, parodient les lacunes, transgressent les rôles et c'est en définitive l'humour qui, sans en avoir l'air, impose sa loi à tous ceux qui osent, en choeur, le pari de la distanciation.

Theothea le 28/01/09   

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