Magazine du Spectacle vivant ...

   

 

   

Les    Chroniques    de

  

14ème  Saison     Chroniques   14.21   à   14.25    Page  232

 

   

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SIMPLEMENT COMPLIQUE

de  Thomas Bernhard    /    Hommage à l' Âge   

mise en scène  Georges Wilson

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Théâtre des Bouffes du Nord

Tel: 01 46 07 34 50

 

   photo ©  Theothea.com 

   

C’est très simple de pouvoir admirer un grand acteur tout en rendant hommage à l’âge et à l’expérience théâtrale, il suffit de se rendre au Théâtre des Bouffes du Nord où cinq semaines durant, Georges Wilson se mesure à Minetti, célèbre acteur allemand du XXème siècle qui, ayant consacré toute sa vie au spectacle vivant, a inspiré le « Simplement compliqué » de Thomas Bernhard.

C’est donc l’heureuse opportunité pour Georges Wilson de s’interroger sur le sens d’une existence dédiée au métier de comédien, en recherchant dans sa propre mise en scène du personnage, désormais relié au monde par des rumeurs dérisoires, ces accointances que lui et son double nourriraient de concert, avec une indéniable tentation à l’égard de la misanthropie et du nihilisme.

Ainsi, il ne lui sera pas nécessaire de se cacher sous la couronne de Richard III, dont l’autre prend un malin plaisir à s’auréoler une fois par semaine, en souvenir du grand rôle de sa vie, pour apprécier, à sa juste valeur, la vanité des vanités, celle de n’avoir définitivement besoin de personne.

Et pourtant, le rendez-vous hebdomadaire avec Catherine, cet enfant de neuf ans, qui vient lui livrer son pichet de lait, est attendu avec le fol espoir d’un bain de jouvence, à jamais rédempteur.

En attendant, d’un fauteuil décati à l’autre usé jusqu’à la corde, le vieil homme livre un valeureux combat avec un ennemi à sa force et à portée de mains, les fameuses souris qui semblent avoir envahi son univers au point de lui tenir une compagnie, affectivement paradoxale.

Ainsi, sur une parallèle à mi-distance de Bernhard et de Minetti, Georges Wilson, de sa voix distincte et bien placée, trace un chemin « irréductible » avec l’aspiration partagée pour trouver en soi, la force de combattre et de terrasser toute inclination au renoncement, à l’aune d’une humanité et d’une plénitude, à fleur de peau.

Theothea le 12/10/09

LES GRANDES FORÊTS

Hommage à l'Âge   

de & mise en scène   Geneviève Page 

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Théâtre des Bouffes du Nord

Tel: 01 46 07 34 50

 

     photo ©  Theothea.com 

   

C’est dans le cadre d’un « Hommage à l’âge » créé par Micheline Rozan, codirectrice du Théâtre des Bouffes du Nord avec Peter Brook, que des artistes comme Georges Wilson, Geneviève Page, Pierre Henry, Jean-Claude Carrière et d’autres... tous, plus ou moins octogénaires, ont pu, durant un mois et demi, témoigner, avec panache, que la valeur sait, aisément, s’affranchir du nombre des années.

Si donc, la pièce « Simplement compliqué » de Thomas Bernhard, mise en scène et interprétée par Georges Wilson, tenait le haut de l’affiche, en étant représentée sur l’ensemble de la période, c’est par exemple sous forme de récital d’Hélène Martin, de concert  « Satie » de Madeleine Malraux, de rétrospective secrète par Pierre Henry, de spectacle musical iranien par Jean-Claude Carrière, qu’en représentation unique ou déclinée jusqu’à six reprises, les murs des Bouffes du Nord pouvaient résonner de ces multiples talents actualisés dans la mémoire collective d’un XXIème siècle, juste débutant.

Avec ses « Grandes Forêts », Geneviève Page nous faisait pénétrer dans son domaine poétique, à la fois familier et protecteur où, telle une amoureuse des grandes tirades élégiaques, René Char, Charles Péguy, Henri Michaux, Jacques Prévert, Jean Tardieu côtoyaient allègrement les grands classiques Victor Hugo, Racine, Alfred de Musset, Marivaux, Ronsard, Jean de la Fontaine, Molière, Appolinaire....

C’est ainsi que la fameuse partenaire de Gérard Philippe, notamment dans « Fanfan la tulipe » (1952) par Christian Jacque ou dans « Lorenzaccio » au Festival d’Avignon 1958, renouait avec son point d’orgue, voir « son tube » selon son petit-fils, autrement dit et donc superbement déclamé, la fameuse « Prière à la vierge de Prouhèze » dans « Le soulier de Satin ».

Comme si le texte de Paul Claudel apparaissait en apothéose d’une comédienne de vingt-ans, vibrant du plaisir sublime de s’abandonner, corps et âme, à la puissance du verbe, Geneviève Page s’avançait dans le halo de lumière, en implorant, à nouveau, les forces de l’invisible.

Un grand moment de spectacle vivant rendant, d’emblée, indispensable le renouvellement annuel de cette initiative judicieuse et admirable qu’a constitué ce premier « Hommage à l’âge » !...

Theothea le 13/10/09

LA PARANOÏA

de  Rafael Spregelburd

mise en scène  Marcial Di Fonzo Bo

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Théâtre de Chaillot

Tel: 01 53 65 30 00

 

   photo ©  Christian Berthelot 

   

Si la définition clinique de la paranoïa était d’être poursuivie par la fiction au point d’en masquer le réel, cette perspective pathologique en valant bien une autre, Rafael Spregelburd aurait visé, juste dans la cible, pour illustrer sa vision du « deuxième pêché capital » mis en scène par Marcial di Fonzo Bo au Théâtre de Chaillot.

En effet, à l’aune de l’ « Heptalogie de Hieronymus Bosch » et donc après « La Estupidez », la saison dernière, voici à nouveau le Théâtre des Lucioles venant alimenter la machine à fantasmes, en se télétransportant aux environs de 5000 et 20000 ans, après Jésus Christ.

A cette époque, ceux qui restent des humains, ont été pris en otage par des « intelligences » venues d’un autre univers; désormais, celles-ci prennent un malin plaisir à perpétuer l’espèce devenue rare en la contraignant à inventer toujours plus de nouvelles histoires car les entités extra-terrestres sont tellement friandes d’oeuvres fictionnelles qu’elles les ont déjà toutes consommées sous tous les formats, du livre au téléphone portable, en passant par le film, sans être, toutefois, en mesure d’en créer par elles-mêmes.

Aussi, quelques cobayes ataviques convoqués dans un hôtel de nulle part, vont découvrir la teneur de leur mission, en gage de survie, et sous cette exigence, devoir phosphorer, à la vitesse de la lumière, pour échapper à l’extinction de l’espèce terrestre.

Entre les maîtres de l’espace et les esclaves de la pesanteur s’engage une course poursuite contre la montre, à la manière d’une enquête policière, dont raffolent les séries b et les sitcom à la sauce « gore ».

C’est, ainsi, qu’entre vidéo et théâtre, les sept acteurs vont se démultiplier à l’infini dans un tambour scénographique à remonter la chronique du temps cinématographique.

De codes en idiomes, de traductions en interprétations, ceux-ci vont réinventer une histoire à dormir debout qui pourrait fort bien assoupir les ardeurs délirantes des geôliers, les tenant, à distance, sous leur coupe.

Si la maîtrise d’une technologie, intégrant le geste de l’acteur à des projections délirantes, est remarquable dans sa réalisation en temps réel, si le jeu des comédiens se fraye une voie séduisante entre l’énième degré de l’entendement et l’énergie vitale du sauve-qui-peut, si la mise en scène occupe l’espace de la salle Gémier au point d’en ressentir les effets pervers de la paranoïa, le parti-pris de l’urgence perpétuelle finit, néanmoins, par avoir raison de l’implication du spectateur, prenant, alors, ses distances dans une bulle protectrice.

Mais patiente, il reste encore cinq pêchés capitaux à expier, grandeur techno-humanoïde.

Theothea le 14/10/09

MINETTI

de  Thomas Bernhard

mise en scène  Gerold Schumann

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Théâtre de l' Athénée

Tel: 01 53 05 19 19

 

   photo ©  DR-TDV-S.Ferreira

   

Si Bernhard Minetti se félicite du masque que James Ensor lui aurait confectionné à l’occasion de son interprétation du Roi Lear, Serge Merlin, lui, se façonne, grandeur nature, un faciès d’Antonin Artaud qui, en cette nuit de réveillon, va transcender, à merveille, les cohortes du bal masqué sillonnant le hall du vieil hôtel d’Ostende, désuet à souhait.

A cet instant de la nuit du 31 décembre, Minetti, Bernhard et Merlin ne font plus qu’un personnage en proie au soliloque pathétique sur les planches du Théâtre de l’Athénée.

Comme Godot, ils attendent la venue d’un messie, en l’occurrence celle d’un directeur de théâtre qui devrait signer le contrat d’une reprise du Roi Lear, après une mise à l’écart du célèbre comédien, durant la trentaine d’années d’exil forcé.

En effet, abhorrant le cadre confortable du théâtre classique, Minetti, devenu lui-même directeur d’un théâtre provincial, avait empêché la programmation du répertoire traditionnel; ce qui lui occasionna une flopée de procès qu’il perdit systématiquement et le mirent au ban de la société.

Aussi, dans cet hôtel flamand, à l’instar d’un musée Grevin imaginaire, des interlocuteurs quasi pétrifiés, vont se succéder à l’écoute des griefs et autres ratiocinations du vieil artiste qui, paradoxalement, feront surgir de cette aversion des classiques, un culte exclusif à l’égard de Shakespeare convergeant vers l’apothéose du Roi Lear.

Sublime rabâchage du monologue qui, une heure et demie durant, contraint son interprète au dépassement de soi, c’est-à-dire, tout simplement, à l’excellence.

Après Michel Bouquet et, très récemment, Michel Piccoli, c’est donc au tour d’une pointure, très entraînée au verbe Berhardien, de composer avec ces flux récurrents pour en distiller la force tellurique, emportant, à son passage, toutes les réserves du ressentiment.

Tel un Rodrigue dont le temps n’aurait pas réussi à calmer la détermination et la fougue, c’est en Don Quichotte, livrant son ultime combat, que Serge Merlin squatte le palace décati pour en faire un tour d’honneur de prestige, en éloge absolu à Thomas Bernhard.

Theothea le 15/10/09

LA NUIT DE L'AUDIENCE

de  Jean-Claude Idée & Frédérique Tirmont

mise en scène  Patrice Kerbrat

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Petit Théâtre Montparnasse

Tel: 01 43 22 77 74

 

   photo © Lot

   

Viva Agnès de Salm-Salm !...

De Bardot à Fossey, de Maria à Agnès, c’est ainsi, en aventurière épique et haute en couleur, que se fantasment les coulisses de l’Histoire opposant l’ancien au nouveau monde.

Dans l’intimité d’une entrevue fictive en 1900, l’Impératrice déchue, Charlotte de Hasbourg, tenue recluse depuis trente ans par son frère le Roi des Belges, Léopold II, la considérant comme folle depuis la mort de son époux, l’Empereur Maximilien exécuté au Mexique, va donc donner audience à une aristocrate anglaise fantasque, veuve d’un prince et épouse de diplomate, en mission de rédemption universelle.

Cette rencontre d’Agnès avec Charlotte est donc le fruit d’une cogitation scénographique entre l’historien, Jean des Cars et l’auteur, Jean-Claude Idée.

Ce face à face des deux femmes, ne se connaissant pas et que tout sépare alors qu’elles vont se deviner plutôt que de se comprendre, va inciter Patrice Kerbrat à diriger les deux comédiennes vers une montée en puissance progressive que de multiples fusées d’artifice jalonnent afin de ne jamais perdre de vue, le ton de la comédie déjantée.

En découle, un double numéro d’actrices, s’appréciant comme un régal, face à l’éventail d’une féminité en pleine séduction de ses contraires respectifs.

Brigitte Fossey et Frédérique Tirmont rivalisent d’ingéniosité, de candeur, de toupet et, en un mot, de joie de vivre, à tel point que la jeunesse des émois balait, au passage, toutes les vraisemblances de la petite histoire, au nom d’une impertinence roborative.

Aussi qu’Eugénie (Christine Guerdon) et Napoléon III (Jean-Yves Chilot) soient, à cause d’elles, contraints de s’enfuir par le balcon en se jetant dans l’eau glacée, fait partie des raccourcis de la Grande Histoire qui se déguste dans un éclat de rire cathartique.

Qu’importe la paranoïa du huis clos impérial pourvu qu’on ait l’ivresse du jeu en costumes !...

Theothea le 16/10/09

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