Magazine du Spectacle vivant ...

   

 

   

Les    Chroniques    de

  

14ème  Saison     Chroniques   14.81   à   14.85    Page  244

 

   

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THEA BLOGS                    Recherche   par mots-clé                    THEA BLOGS      

DAVID & EDWARD

de    Lionel Goldstein

mise en scène Marcel Bluwal

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Théâtre de l' Oeuvre

Tel:  01 44 53 88 88 

 

illustration ©  Catherine Bluwal  

   

« Est-ce que le secret d’une relation durable ne réside pas en une pointe de torture ? ». C’est ainsi que David, en ultime réplique à la pièce de Lionel Goldstein, interroge Edward, devenu, un an après leur rencontre initiale près d’une tombe à Manhattan, ce compagnon indispensable au souvenir partagé de leur bien aimée disparue.

En effet, l’un était le mari de Florence, l’autre l’éternel amoureux de Flo, tous deux étaient sous l’emprise du charme de l’épouse et de la muse respective.

Etait-ce la même femme? Etait-elle autre avec chacun des deux ? C’est ce cheminement du coeur et de l’entendement que les deux septuagénaires vont parcourir de l’enterrement au premier anniversaire, du cimetière à leurs retrouvailles.

David et Edward pourraient être, en quelque sorte, les deux versants de la mémoire qui tente de recomposer la contingence, nécessairement multiple, de l’être absent.

L’un ignorait tout de l’existence du second, l’autre, a contrario, souffrait de s’être fait ravi celle qui aurait pu faire son bonheur.

En phase ultime de sa vie, Flo émit le souhait de ne faire qu’une avec Florence et par conséquent demandait, à brûle pourpoint, à Edward de se faire connaître auprès de David.

Cruelle démarche tout autant que réconfortante pour les deux hommes, tentés l’un et l’autre par toutes les facettes du ressentiment exacerbé.

Au risque de se perdre dans la susceptibilité ou l’irritabilité du partenaire dévolu, l’un et l’autre manipulés par les forces d’une âme féminine plus persuasive que jamais, voilà que, sur le retour d’âge avancé, les deux Michel, ex condisciples du Conservatoire et de La Comédie Française sur la longue durée, pris, ainsi, à leur propre jeu du rôle de composition, se trouvent projetés en face à face, pour la première fois de leur carrière.

Ce défi méritait d’être lancé, relevé et emporté magistralement par David (Michel Aumont) et Edward (Michel Duchaussoy), qui, d’emblée par intuition, surent que leurs personnages ne pouvaient, en aucun cas, être interchangeables.

En outre, réunissant ces deux pointures françaises au Théâtre de l’Oeuvre, Marcel Bluwal effectue un coup de maître que la distanciation new-yorkaise, en toile de fond, rend implicitement, de portée universelle.

Cette pointe de torture, que chacun des deux saura apprivoiser selon son caractère va, effectivement, s’avérer le garant sinon de l’Amitié, tout au moins celui du souvenir vivace de l’Amour que leur joute oratoire infinie va, désormais, entretenir ad vitam aeternam.

Theothea le 15/02/10

MACBETH

de    William Shakespeare

mise en scène  Declan Donnellan

****

Théâtre Les Gémeaux

Tel:   01 46 61 36 67

 

photo ©  Cat.S / Theothea.com  

   

Assister à une représentation de Macbeth dans la langue originelle de Shakespeare, voilà une perspective, en soi suffisante, pour effectuer un déplacement à Sceaux.

En effet, après son Troïlus et Cressida (en 2008) et Cymbeline (en 2007), le Théâtre de Gémeaux accueille Declan Donnellan pour une version chorale, confortablement surtitrée.

L’ambition de sa mise en scène est, notamment, de faire ressentir l’indicible angoisse envahissant le tyran sanguinaire, a posteriori de l’acte criminel compulsif.

Comme si, englué dans la sidération, le poids de la culpabilité pouvait susciter la réitération d’une fascination pour le mal absolu et son cortège infini de malheurs.

Ainsi, dès l’amorce de l’engrenage, il apparaît que le couple Macbeth ne pourra plus faire machine arrière dans sa course folle vers le pouvoir, alors que chaque obstacle sera perçu comme un projet à exécuter, permettant d’oublier, dans l’instant, l’atrocité précédente.

Servant de catalyseur à des circonstances opportunes, le crédit porté, aveuglément, à une prophétie octroyant la couronne à son époux, va inciter Lady Macbeth à convaincre celui-ci de saisir sa chance meurtrière.

Cependant, passées les réjouissances de l’assassinat du souverain en place, le bel enthousiasme va commencer à se gripper en étant confronté au mensonge, au déni, au cauchemar, à l’insomnie et peu à peu aux crises de délire paranoïaque !…

Désormais de séquence criminelle en épouvante, le couple tangue d’effroi vers la fuite en avant, sans jamais pouvoir dominer la pulsion mortifère se retournant sur elle-même.

Sur la scène des Gémeaux, la vision fantomatique de l’horreur et de l’angoisse se décline dans une abstraction en noir et blanc, filtrée à cour et jardin selon des rayures de lumière tamisée provenant de colonnes en planches de bois ajourées par des « meurtrières ».

Telle une chorégraphie de folklore irlandais, la troupe du « Cheek by Jowl » cadence le drame avec ses musiques venues d’ailleurs, dans une énergie maîtrisée au sein de la rigueur austère qui sied à une descente aux enfers.

L’imagination celte des spectres, fantômes et autres sorcières se confond ici, dans la brume de l’esprit, avec l’hallucination du doute métaphysique, d’où la pulsion de mort sortira victorieuse par KO.

Les failles de la prophétie auront eu raison du couple maudit, tétanisé à vue par la forêt avançant sur eux.

Theothea le 16/02/10

VOUS AVEZ QUEL ÂGE ?

de    Françoise Dorin

mise en scène  Stéphane Hillel

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Comédie des Champs Elysées

Tel:  01 53 23 99 19   

 

photo ©  Cat.S / Theothea.com  

   

Vous avez quel âge, Monsieur Jean Piat ?

A 85 ans, le temps n’est rien d’autre qu’une coquetterie à laquelle tout le monde vous renvoie. A vrai, dire c’est çà ou mourir, alors j’ai décidé que « Vieillir, c’est épatant! ». Et je vous conseille fortement d’en faire autant.

En réelle état d’apesanteur et totalement revigoré par cette méthode « Coué » bien adaptée à la scène, l’esprit des spectateurs, en accointance avec celui du grand comédien, vient de vivre une cure de jouvence plus efficace que n’importe quelle prescription médicale.

Dans un environnement cardinal où du rouge théâtre au mauve tendance, la palette des perceptions s’essaye à créer un écrin pastel afin de susciter l’empathie des convictions positives d’avec les frustrations de l’âge, Jean Piat évolue comme un « poisson dans l’eau », tout en buvant du petit lait, celui qui permettrait de conserver le secret des artères en jubilation.

Un éternel sourire aux lèvres, l’improbable conférencier de la salle Gaveau dissertant sur « les méfaits de l’âge et du temps », au point d’avoir été pressenti et même appelé à la tête d’un futur « Ministère de la Vieillesse et de son Sort » a donc décidé, une fois pour toutes, de se sentir léger et d’appréhender l’âge séculaire, à la fois avec philosophie, pragmatisme et humour.

Et c’est ainsi que la salle rit franchement, à l’idée de faire une farce à la destinée, quelque peu tentée de ranger les générations avancées, hors des fascinations de l’ère numérique, en les tenant éloignées des registres de sa mémoire binaire.

Cependant, guidé par une bonne mesure en toutes choses, Jean Piat prend le soin de tracer les limites de son territoire ainsi que le champ d’investigation qui lui restera favorable, quelles que soient les aléas des fonctions physiques.

Dans cette perspective délibérément optimiste et bardée d’une bonne humeur contagieuse, la réponse à « Vous avez quel âge ? » peut, d’évidence, se constituer en élixir de jeunesse, ô combien « durable ».

Theothea le 17/02/10

LE PAQUET

    

de &  mise en scène   Philippe Claudel

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Petit Théâtre de Paris

Tel:   01 42 80 01 81

 

photo DR.  

     

Si le paquet de Gérard Jugnot semble lourd à porter, il ne faudrait pas, pour autant, croire le comédien enchaîné à un boulet existentiel car il lui suffirait, sans doute, oser l’abandonner pour recouvrer la légèreté de penser.

A vrai dire, son personnage anonyme, s’apparente à un SDF que la vie aurait abîmé en une suite de ruptures successives dont la destinée a le secret.

Banal à souhait, ce type possède pourtant la curieuse particularité d’accumuler toutes les tares que la société concocte allègrement dans les coulisses de la réussite exacerbée.

Touche à tout de génie, la mythomanie ne l’embarrasse point, pourvu qu’elle lui serve de tremplin à une reconnaissance sociale qui, de toute évidence, tarde à s’exprimer.

Bref, d’accidents en abandons, d’échecs en fatalité, tout s’organise autour de lui pour l’expulser du cercle des réjouissances.

Tirant son « paquet » roulé dans un improbable tapis, voilà, en cet instant, notre homme parvenu sur la scène du Petit Théâtre de Paris où il paraît heureux de pouvoir, enfin, s’asseoir sur un banc public.

Désormais en confiance, il va pouvoir raconter ses malheurs et confier ses tourments à ceux, qui, face à lui, l’observent tel, l’acteur jouant un rôle de composition.

Mais à ce jeu de miroirs placés en vis-à-vis, le spectateur pourrait, soudain, se trouver projeter sur la scène imaginaire de son propre exil.

Attention ! Danger et risque de se retrouver soi-même à devoir tirer ledit paquet au sortir du théâtre !...

Tel serait pris qui croyait venir applaudir le clown et qui s’en repartirait avec le blues du looser.

Ce n’est, certes pas, l’objectif recherché par l’auteur-metteur en scène Philippe Claudel,  de vouloir soulager son interprète d'un poids que, néanmoins, celui-ci apprécierait partager avec un alter ego de fortune.

Où donc se termine la solidarité ? Où commence l’indifférence ? Voilà bien des questions sous-jacentes à ce paquet de problèmes non résolus, au moment où les protagonistes vont quitter, chacun de leur côté, le lieu de la représentation.

Dans ce happening, Gérard Jugnot a, assurément, le beau rôle et c’est tant mieux !….

Theothea le 18/02/10

COLOMBE

de    Jean Anouilh

mise en scène    Michel Fagadau

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Comédie des Champs Elysées

Tel:   01 53 23 99 19

 

photo ©  Cat.S / Theothea.com  

     

Annie Duperey & Sara Giraudeau fêtent l’esprit de « Colombe »

      

La mère et la fille, enfin réunies sur les planches, se donnent à cœur joie, en deux rôles cousus main par Michel Fagadau, sous la fabuleuse touche « costumes » de Pascale Bordet.

Aider à s’envoler la Colombe de Jean Anouilh, c’est tout le mal que le « milieu frelaté » du théâtre va initier, au grand dam d’un jeune mari inexpérimenté dans les choses de l’amour, au rythme des quiproquos entretenus par des prétendants plus ou moins bien intentionnés.

Ce processus d’autonomie, face à la timidité, à la dépendance morale et à l’aveuglement sentimental de la jeunesse, va résulter d’un profitable concours de circonstances, pourtant fort mal engagées initialement.

Julien (Gregori Baquet) est sur le point de partir au service militaire, en refusant tous les passe-droits de réforme que pourraient lui octroyer les relations, haut placées, de sa mère, comédienne de grand renom, mais avec laquelle ce fils n’est pas en grande affection.

Et pourtant, tel la victime consentante se réfugiant dans la gueule du loup, il voudrait confier à sa génitrice, la protection de sa jeune épouse (Sara Giraudeau) et de leur nourrisson.

Madame Alexandra (Annie Duperey) règne en fascination, autant dans sa loge qu’en coulisses et sur le plateau des répétitions, où auteur (Jean-Paul Bordes), directeur (Etienne Draber), metteur en scène, régisseur (Rufus) se plient, non sans rechigner, à tous ses caprices contradictoires.

Armand (Benjamin Bellecour), son deuxième fils, de loin préféré à l’aîné, joue allègrement les entremetteurs entre sa mère adorée et le reste du monde.

A l’opportunité d’une permission, le sergent Julien va constater les dégâts que l’émancipation de Colombe a gagné, à la faveur d’un rôle grandissant au sein de la troupe théâtrale.

Drame de l’amour qui file entre les doigts, en restant seul au monde face à l’adversité dont les autres vous imputent la responsabilité.

Cocu avec la bénédiction maternelle, quel triste sort va, ainsi, s’abattre sur celui dont personne, même le public, n’aura envie de prendre la défense !…

Cependant « une de perdue, une de retrouvée », tel pourrait s’augurer, à l’issue de la tragi-comédie, le combat fratricide de la jalousie avec le sentiment amoureux.

L’interprétation chorale emmène, joyeusement, la pièce dans tous les recoins du Vaudeville, tout en défendant, bec et ongles, la ligne directrice de l’affranchissement des contraintes destinées à rendre servile, tout un chacun.

Ce travail de dentelles qui sied fort bien à la subtilité de Sara Giraudeau, est pareillement assuré dans une jubilation monstrueuse et fort gratifiante par Annie Duperey.

A la Comédie des Champs-Elysées, l’ombre protectrice de Bernard Giraudeau pourrait planer entre mère et fille, au point que le plaisir suprême serait de les voir, par la suite, au-delà du succès annoncé de « Colombe », réunis tous les trois sur les planches pour un emblématique jeu de rôles, en famille de chœur.

Theothea le 19/02/10

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