Les
Chroniques
de
|
|
15ème
Saison
Chroniques 15.056
à
15.060 Page
265
The Rabeats au Grand
Rex
Tournée Âge tendre
2011
R E V I V A L
Wight ! 40
années après
63ème
Festival de
Cannes
2010
et son théâtre
d'ombres
Les
MOLIERES
2010
Les Nominations
Point de vue
Toutes nos
critiques
2010 -
2011
Les
Chroniques
de
Theothea.com
sur
THEA
BLOGS
Recherche
par mots-clé
THEA
BLOGS
|
ALBERTINE DISPARUE
lecture intégrale
par
Jean-Laurent Cochet
|
****
Salle Gaveau
|
|
A loccasion du cent quarantenaire de la naissance de Marcel Proust,
Jean-Laurent Cochet sest élancé dès 10 heures
du matin, le samedi 22 janvier 2011, pour la première des dix
séquences dune heure et demi chacune qui allaient lui permettre
en vingt heures dhorloge de lire à haute voix, la version
intégrale d « Albertine disparue ».
Epaulé en ouverture de chaque séquence, par le quatuor Noctis,
pour progresser dans cette lecture évènementielle, lhomme
de théâtre relevait ainsi un défi de quinze heures où
il lui faudrait assurer entre jour et nuit dominicale, seul face au public
de la salle Gaveau, le maintien dune écoute attentive et dun
imaginaire dédié, tout en suspend autour de cette uvre
de Marcel Proust
|
|
Avec plus dune demi-heure davance sur le programme initial,
à laube du dimanche matin, le maître mettait le point
final à son challenge tellement fantasque, en marquant une brève
pause symbolique avant que dénoncer la toute dernière
phrase du roman:
« Et, voyez-vous, ce nest même pas ce caprice
denfant que je me reproche le plus. »
Frais comme à la première heure, le comédien prenait
alors, la dimension de son succès en goûtant avec plénitude,
la standing ovation qui nen finirait point de saluer sa performance
solitaire
en apparences.
Theothea le 26/01/11
|
CALIGULA
de
Albert
Camus
mise en scène:
Stéphane
Olivié Bisson
|
****
Théâtre de
l'Athénée
Tel: 01
53 05 19 19
|
De Gérard Philipe à Bruno Putzulu, de la création
du rôle au Théâtre Hébertot jusquà
sa reprise à lAthénée dans la version initiale
de la pièce écrite par le jeune Albert Camus, plus de soixante-dix
années de maturité artistique permettent de revenir au passage
à lacte fondateur, celui de la transgression du libre arbitre
par langoisse du vide absolu.
Dans un monde corrompu où chacun est un loup pour lhomme,
celui qui ose saffranchir de toute éthique, de tout état
dâme et simplement de tout respect de soi-même, pourrait
devenir le héros du roman de ses pulsions contradictoires
jusquà pouvoir devenir lempereur de lunivers.
Aucun crime, aucun meurtre, aucune violence gratuite ne pourraient, alors,
suffire à étancher le désir impérieux de
« décrocher la lune » jusquà obtenir
une improbable satisfaction à cette ambition démesurée
et incomparable.
A sa décharge, la disparition de Drusilla, sa sur tant
adorée, a projeté lesprit de Caligula dans un monde hors
daccès à toute consolation et cest donc en
paranoïaque notoire quil va exercer son pouvoir impériale
au cours du premier siècle après Jésus-Christ.
La réalisation de Stéphane Olivié-Bisson imagine
une chambre denfants où les cauchemars nocturnes se nourriraient
du papier peint et des ombres fantomatiques peuplant lobscurité
afin daboutir à lobjectif de destruction programmée
par une terreur irrationnelle dont ladulte ne serait jamais en mesure
de se débarrasser du souvenir obsédant.
Ainsi, pour mieux conjurer le désespoir indicible associé
à lépouvante infinie, lapprenti despote va-t-il
organiser autour de sa personne, un cycle sans fin et sans frein où
labus de pouvoir érigé en système mènera
délibérément le tyran au « suicide
supérieur » qui, selon Camus, est lexpression directe
dune véritable « tragédie de
lintelligence ».
Ayant décelé chez Bruno Putzulu, ce don du
déséquilibre et du funambulisme permettant dassocier
lyrisme et réalisme, le metteur en scène sappuie sur
un indéfectible esprit de troupe pour feindre, de manière
inéluctable, lanéantissement symbolique de la pulsion
de mort, ainsi théâtralisée.
Theothea le 31/01/11
|
TOUTOU
de
Agnès
& Daniel Besse
mise en scène:
Anne
Bourgeois
|
****
Théâtre
Hébertot
Tel: 01 43 87
23 23
|
« Merci pour Toutou et merci pour tout ». Loin
dêtre bêtifiante, lune des répliques finales
de cette pièce la positionne délibérément dans
le signifiant psychanalytique, en esquissant dans le miroir du couple
contemporain, les stigmates du processus compensatoire.
« Un être vous manque et tout est
dépeuplé » énonçait Jean de la Fontaine
!
Appliqué aux relations humaines davec la gente canine, le
risque de manque affectif est pointé, dans la perception créatrice
des Besse, comme le ressort aveugle à la croisée de tous les
déséquilibres psychologiques potentiels.
Ainsi, au cours de la rituelle promenade du soir, Alex (Patrick Chesnais)
a perdu Toutou ou plus exactement celui-ci a échappé
inopinément à la vigilance de son maître.
Lors du retour esseulé à lappartement, Zoé
(Josiane Stoléru), son épouse a demblée
lintuition que leur vie vient de basculer dans lindicible.
Désormais, ni leur jeune fils étudiant à New York,
ni lami de longue date (Sam Karmann), lui-même en quête
de réconfort, ni la voisine en solidarité canine, ne pourront
venir contrebalancer le traumatisme induit par cette rupture existentielle.
En effet, que représente Toutou dans la sphère relationnelle
dune famille lambda, lorsque subitement le contrat tacite du tiers
à quatre pattes déchire les liens du statu quo ?
Toutou constitue ce point focal où les affects des uns et des autres
peuvent librement se déverser sans que les lois du ridicule n
y trouvent rien à redire, tandis que
celles du « psychiquement correct » y trouvent largement
leur compte.
Cest ainsi que la normalité vacillante va induire des
comportements exacerbés, contradictoires et emplis dune mauvaise
foi pathologique à limage dêtres abandonnés
par leur destinée alors que tout pourrait leur sourire, si la
dépendance à un atavisme fondateur non identifié ne
leur faisait prendre des vessies pour des lanternes.
Anne Bourgeois dirige ses acteurs avec mesure et tact; ce qui ne fait
que renforcer les effets comiques et néanmoins dévastateurs.
Lécriture des Besse est une sorte de friandise parabolique à
déguster dans la pertinence du ravissement et à la hauteur
du capharnaüm qui régente la pensée universelle.
Theothea le 26 janvier 2011
|
DIPLOMATIE
de
Cyril
Gely
mise en scène:
Stephan
Meldegg
|
****
Théâtre de la Madeleine
Tel: 01 42 65
07 09
|
Deux personnages historiques, deux comédiens tête daffiche
pour un enjeu capital, la destruction ou non de Paris, au petit matin du
25 août 1944.
Si leur duel rhétorique va se dérouler en temps réel
sur les planches du Théâtre de La Madeleine, cest selon
les modalités dune leçon de diplomatie imaginaire où
lauteur entreprend dopposer lordre martial de la
hiérarchie militaire davec le réalisme géopolitique
grâce à un entre-deux paroxystique quoique fictif.
Pour étayer la crédibilité de cette entrevue nocturne,
purement spéculative, il fallait la stratégie contextuelle
dune botte secrète:
Un escalier dérobé avec entrée discrète à
larrière de lhôtel Meurice, investi en siège
international de la Kommandantur, allait fournir à Cyril Gely larme
décisive de cette rencontre au sommet.
Pour ou contre limplosion de lensemble des ponts de Paris
à lexception dun seul permettant de sextraire du
centre de Paris submergé par les eaux de la Seine ?
La problématique devra se résoudre, avant laube, face
à un décor panoramique et depuis une terrasse du palace
réquisitionné, surplombant les Tuileries, la Concorde ainsi
que les toits de la Ville lumière confiée pour le moment au
paisible sommeil de ses habitants !
Fort heureusement, la destinée de Paris ne sera pas celle de Berlin,
à quelque temps de là !
Lune sera sauvée in extremis de la folie meurtrière
dune chaîne de commandement en perdition, lautre sera
anéantie sous le feux des bombes alliées au détriment
des civils mais aussi de sa richesse architecturale !
Pour lheure, le défi entre Niels Arestrup et André
Dussollier est non seulement de jouer la montre, mais surtout de faire
échec et mat à ladversaire en le ralliant la cause
supérieure du partenaire:
Obéissance légitime opposée au libre arbitre.
Dans la pièce de Cyril Gely, cest la sauvegarde programmée
de la famille du Général Dietrich von Cholitz qui constituera
largument décisif à labandon du projet fou.
La main de velours du Consul de Suède Raoul Nordling aurait
réussi à rendre raison aux soubresauts ultimes du processus
démoniaque engagé.
Il suffirait, dès lors, à André Dussollier de prendre
à rebours lescalier dérobé pour que tombent
définitivement les masques du Théâtre et quen
dernière instance, Paris soit sauvée et, par la suite,
libérée !
Theothea le 04/02/11
|
LA VERITE
de
Florian
Zeller
mise en scène:
Patrice
Kerbrat
|
****
Théâtre
Montparnasse
Tel:
01
43 22 77 30
|
« La vérité, il ny a que çà
de vrai ! » conclut lune des dernières répliques
de la pièce alors que pourrait être davantage attendu:
« Il ny a que la vérité qui
blesse !».
Cependant, puisquil sagit dune comédie,
lauteur sest emparé de toutes les armes du Vaudeville
jusquà en pervertir lhorlogerie de précision afin
den retourner les effets comiques, à la manière du
boomerang.
Non seulement, dans cette partie carrée, la vérité
va devenir lalliée à conquérir mais sa
résistance intrinsèque va contraindre chacun des trois autres
à ajuster sa stratégie pour mieux la détenir, à
son profit.
Si, bien entendu, la vérité devient cet enjeu
privilégié, cest, bel et bien, parce que le mensonge,
à géométrie variable, menace chacun à son propre
piège.
Alors voilà, Florian Zeller a installé son candide dans
la posture du mythomane qui ne doute de rien, ni de personne:
Que ce soit Laurence (Christiane Millet) son épouse, Alice (Fanny
Cottençon) sa maîtresse ou Paul (Patrice Kerbrat) son meilleur
ami, aucun dentre eux ne devrait déroger aux rôles qui
leur sont assignés a priori, car cest ainsi que tout serait
pour le mieux dans le meilleur des mondes.
Toutefois, dès quil lâche un tant soit peu la bride
à son système de protection rapprochée, Michel est contraint
de donner en gage, un surcroît de transparence qu'il est bien en peine
d'assumer.
Chaque fois quil pense être parvenu à une nouvelle
version de la vérité dûment équilibrée
entre ses trois acolytes, le sol se dérobe sous ses pieds en raison
dun venin non identifié.
Cest donc Pierre Arditi qui a été choisi par
lauteur pour jouer ce personnage hâbleur et sûr de lui,
tel que le comédien a pu lincarner à de nombreuses reprises
en des situations conjugales et libidinales similaires.
A ceci près qu invité, à juste titre, à
se caricaturer lui-même par le point de vue dédoublé
de Patrice Kerbrat (metteur en scène & co-interprète),
le renversement de la donne traditionnelle va, ici, contraindre lacteur
à devoir changer de registres, au cours de plusieurs étapes
psychologiques quil lui faudra surmonter dans le doute absolu, peu
à peu contracté par son personnage.
Du grand art théâtral que celui-ci partage allègrement
avec trois partenaires lui renvoyant leur part de vérité, avec
laplomb redoutable de ceux qui ne vous voudraient que du bien !
Une pièce Rohmérienne qui ne cesse dinterroger les
ombres de la vérité au nom dune confiance mutuelle
discréditée par le mensonge.
Une farce hilarante, ô combien exploratrice des petits arrangements
contradictoires avec soi-même.
Theothea le 03/02/11
|
Recherche
par
mots-clé
|
|
|