Magazine du Spectacle vivant ...

   

 

   

Les    Chroniques    de

  

16ème  Saison     Chroniques   16.036   à   16.040    Page  282

 

           

     

         

64ème Festival de Cannes 2011

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THEA BLOGS                    Recherche   par mots-clé                    THEA BLOGS          

HOLLYWOOD

de  Ron Hutchinson

mise en scène:  Daniel Colas

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Théâtre Antoine 

Tel: 01 42 08 77 71    

 

         photo  DR.

     

« Autant en emporte le vent » comme vous ne l’avez jamais vu ou plus exactement comme vous le verrez, enfin, en passant de l’autre côté du miroir ou plutôt des coulisses de la Metro-Goldwyn-Mayer, tout en rejoignant son producteur ainsi que ses metteur en scène et scénariste de substitution, enfermés durant cinq jours de 1939 pour en réécrire la future version filmée aux 10 Oscars.

Dopés au régime de bananes agrémentées de cacahuètes, David O. Selznick, Victor Fleming et Ben Hecht vont faire passer, allègrement, leur cogitation triangulaire en vitesse surmultipliée, déclenchant des scènes d’anthologie théâtrale, signées Ron Hutchinson dont les répliques à damner le 7ème art vont, grâce à l’adaptation française de Martine Dolléans, libérer, clefs en mains, la virtuosité d’un trio détonant, composé de Daniel Russo, Samuel Le Bihan et Thierry Fremont.

Les trois comédiens semblent prendre un tel plaisir au jeu du « brain storming hollywoodien » constamment « border line » que la précision millimétrée de la direction d’acteurs semble rendre à Feydeau ce qui, au Théâtre Antoine, appartient bel et bien à Daniel Colas.

Du grand art comique que les Marx Brothers ne rechigneraient pas à mettre au Panthéon de leurs valeureux successeurs, à travers le Monde.

En assistante zélée en chef, Françoise Pinkasser vient rasséréner, de sa prévenance, notre triumvirat hexagonal, tout au long de sa triviale poursuite aux idées en or, non sans leur rappeler que Vivian Leigh et Clark Gable s’impatientent, au dehors des Studios, pour reprendre, sans tarder, le tournage précédemment soustrait à Georges Cukor.

Cet aller-retour incessant entre farceuse interprétation "live" en temps réel et laborieux travail d’écriture cinématographique suspendu, avançant de concert mais à tâtons, quelque part entre idéologie d’une Amérique tendance réactionnaire, d’un côté, et sentiments universels inspirés par l’Amour avec un grand A, d'un autre, pourrait être en passe de devenir la vivifiante addiction d'une époque contemporaine en quête d’un Théâtre osant débrider, sans réserve, le quant à soi des acteurs.

A voir et à revoir, au moins autant qu'à lire et à relire jusqu'à l'envie, l’histoire de Scarlett O’Hara et Rhett Buttler !

Theothea le 11/11/11

OMKARA II

de & par  Raghunath Manet & Didier Lockwood

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Théâtre de la Gaité Montparnasse

Tel: 01 43 20 60 56   

 

         photo  DR.

   

A la suite du Jazz et la Diva Opus II, nous avions laissé, en 2008, Didier Lockwood à ses prérogatives de concurrence musicale sous famille recomposée et voici qu’en 2011, toujours à la Gaîté-Montparnasse qu’il affectionne particulièrement, le violoniste hors pair nous revient en compagnie de Raghunath Manet, son partenaire de prédilection, si l’on excepte bien entendu sa propre épouse, Caroline Casadesus.

Ainsi, le danseur indien émérite, maître de Veena, et le virtuose hexagonal prolongent-ils leur duo dans une création de Omkara version 2.

La chanteuse Aurélie Prost et le percussionniste Sri Murugan complètent cette rencontre métissée en apportant, notamment, au spectacle, un troisième œil protecteur évitant l’écueil d’un jeu en miroir narcissique.

Un souffle d’esthétisme chorégraphique envahit la scène intimiste sans que les codes culturels n’aient besoin d’être explicités par le langage oral; seul en effet compte le mariage des sonorités alors que les mélopées plaintives se conjuguent entre Occident et Orient de toujours.

La récurrence gestuelle se meut en leitmotiv fascinant que les cordes vocales et celles des instruments tissent entre la nostalgie jazzy de la vieille Europe et le fantasme d’une Inde progressiste sous label « Bollywood ».

Déjà entre thèse et antithèse, nous voyons poindre la perspective d’un Omkara III qui en développerait une synthèse transgressive.

Theothea le 08/11/11

JE DISPARAIS

de Arne Lygre 

mise en scène:  Stéphane Braunschweig

****

Théâtre de la Colline

Tel:  01 44 62 52 52   

 

         photo  ©   Elisabeth Carecchio

       

Si une création théâtrale était réductible à sa scénographie, celle de Stéphane Braunschweig, directeur du Théâtre de la Colline mettant en scène « Je disparais » de Arne Lygre, traduit du Norvégien en Français par Eloi Recoing, emporterait aisément le Molière de l’abstraction conceptuelle visualisée en panoramique.

En effet, non seulement la métaphore d’une chambre noire photographique à soufflet se développant de un à trois compartiments de taille dégressive s’apparente au mieux d’une quête identitaire en régression dans une fuite en arrière toute, mais de plus la réalisation sur la scène de la Colline d’une telle perspective cinétique s’emboîte avec une aisance si parfaite qu’elle est en mesure de faire effet de miroir jusqu’à en inverser le sens de la pesanteur de ses propres planches.

Bref, à la limite de l’imaginaire, la scénographie de Stéphane Branschweig pourrait apparaître comme le réceptacle idéal préexistant, en complète apesanteur, au texte de Arne Lygre.

Ensuite viendrait l’interprétation philosophique de cette volonté quasi schizophrénique de sortir de soi pour appréhender un ailleurs ne cessant de se dérober à l’entendement ainsi que pour tenter de communiquer avec des semblables échappant aux règles de la cohérence.

En se débattant ainsi avec des fantômes oniriques, les personnages exclusivement féminins, à l’exception d’un seul mâle, forcent à leur tour, la direction d’acteurs à épouser le dédale du cauchemar éveillé, fût-il situé, par exemple, en pleine mer ou sur une île perdue.

C’est ainsi que l’interprétation des acteurs devrait, elle, subir le poids des mots, restant en suspend de la pensée toujours en avance d’une angoisse existentielle alors que des « hyper-répliques » se chargent du commentaire à la troisième personne du singulier:

« L’autre femme est allongée par terre. Il n’y a rien en dehors de cette pièce, pense-t-elle et elle regarde autour d’elle, remarque des détails qu’elle n’avait jamais vus avant. Mon monde, pense-t-elle et elle a conscience de sa place, parfaitement conscience, le corps comme un objet en relation avec le plafond, les murs. L’espace limité. Elle-même. »

Jeu de rôles, dédoublement, virtualité et autres outils formels de la distanciation identitaire se complètent, ainsi, en cinq personnages (Irina Dalle, Alain Libolt, Pauline Lorillard, Annie Mercier & Luce Mouchel) pour n’en former, sans aucun doute, qu’un seul, celui de l’auteur s’exerçant cérébralement à spéculer sur la relativité de la condition humaine.

Theothea le 12/11/11

CAUBERE JOUE BENEDETTO : Urgent crier  !

de  André Benedetto

mise en scène & par Philippe Cuabère  

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Maison de la  Poésie

Tel: 01 44 54 53 00  

 

         photo  ©  Michèle Laurent 

   

« Urgent, crier » est le titre du premier des recueils de poèmes d’André Benedetto qui s’était installé à Avignon, figure titulaire du festival et fondateur du off, en 1966.

Pour lui rendre hommage, Philippe Caubère a décidé cette année, au mois de juillet, dans le off, de déclamer les paroles de cet auteur-acteur au Théâtre des Carmes, sanctuaire militant dont Benedetto avait été le directeur de 1963 jusqu’à sa mort soudaine en juillet 2009.

Caubère, qui a tout connu à Avignon, la Cour d’Honneur, le off, le in, la carrière de Boulbon, depuis son « Roman d’un acteur » jusqu’à « L’homme qui danse » en passant par « Claudine ou le Théâtre » ou « Épilogues », a voulu faire scintiller l’homme militant engagé et rebelle qui l’avait tant ébloui, du temps de la jeunesse.

C’est au tour de la Maison de la Poésie de recevoir la flamboyance du verbe de AB André Benedetto, entre AA (Antonin Artaud) et BB (Bertold Brecht).

Caubère, dans un premier temps, nous surprend. D’une curieuse retenue et avec une voix singulière à l’accent rocailleux du sud qui n’est pas le sien tendance marseillais, d’un débit bas et rapide, presque inaudible, qui force l’écoute, il incarne l’auteur à la « gueule d’ange ».

Puis, cassant ce rythme, armé d’un micro, aussi tranchant qu’une lame, il clame sa révolte artistique qui réveille nos consciences endormies et nous jette à la figure, tel un coup de tonnerre, la digression d’une langue qui dénonce et qui émerveille. On retrouve le Caubère animal accaparant l’identité du Benedetto pamphlétaire.

Alors, puisant dans les textes de l’acteur-sud, quintessence du pur comédien méditerranéen, à l’instar des Raimu, Gérard Philipe & Alain Cuny, Philippe Caubère s’empare de trois grands visionnaires du théâtre :

D’abord, à tout seigneur tout honneur, Jean Vilar, le sétois, un acteur qui s’engage physiquement, d’une présence extraordinaire; il sera l’homme qui, face au fameux mistral, dans la cour du Palais des Papes, va l’investir et fonder le festival d’Avignon en 1947. Les mots déferlent par la voix de Caubère, accompagnés d’images d’archives projetées sur grand écran, avec de beaux portraits de Vilar qui aura voulu faire d’Avignon un lieu d’expression et d’échanges et se fera pourtant conspuer en 1968. Il devra affronter une jeunesse radicale et contestataire qui osera lui jeter des anathèmes du genre : « Vilar, Béjart, Salazar ! » soutenue par le Living Theater.

D’ailleurs, à propos du festival de 68, Benedetto, l’homme au regard de braise, lui n’y voyait pas le peuple, il n’y voyait que « les flics ».

Vient, ensuite, le poète marseillais Antonin Arthaud, le visionnaire halluciné et torturé, l’inventeur du concept de « théâtre de la cruauté » dont les dessins magnifiques de souffrance sont projetés sur l’écran, lesquels expriment ce qu’il y a d’obscur dans l’esprit et dont la matière, enfouie au plus profond de soi, doit nourrir le théâtre.

Enfin, voici un Magnificat sur le metteur en scène et critique littéraire Gilles Sandier, se promenant régulièrement dans les jardins d’Allah et défenseur d’un théâtre politique et militant.

Dans cette alternance de rythme pausé ou, au contraire, vibrant, tel un fauve, Philippe Caubère s’appuie sur la présence d’un guitariste, Jérémy Campagne qui joue autant des morceaux de musique andalouse que, dans un style fougueux, des accords d’Hendrix ou des Doors, selon un tempo qui donne la pulsation du spectacle, comme avait aimé le faire Benedetto avec les musiciens de la compagnie Lubat.

« Urgent, crier » est un hommage adressé à une communauté de langage ainsi qu’au théâtre vivant, exigeant et populaire qui veut se faire entendre face au vent de la Méditerranée et qui doit donc hurler pour parvenir à nos oreilles, hurler pour éveiller nos consciences, pour remuer en nous les endormissements.

Philippe Caubère réhabilite un artiste engagé rageusement corps et âme.

Ainsi, Caubère & Benedetto, apparaissent fusionnels dans un même combat poétique.

Cat.S / Theothea.com, le 22/11/11

L'OURS, LA FOLLE NUIT ET LA DEMANDE EN MARIAGE

de  Anton Tchekhov

mise en scène:  Benoît Lavigne

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Cine 13 Théâtre

Tel: 01 42 54 15 12   

 

         photo  ©   Theothea.com 

     

Pour un coup d’essai professionnel, la compagnie « Les Grues Maux » s’offrent un triple coup de Maître avec d’abord, en tout Seigneur tout honneur, Anton Tchekhov au pinceau, ensuite Benoît Lavigne à l’orchestration & enfin grâce à la brillante alternance de trois jeunes violonistes, Amandine Corgiat, Juliette Carradec & Lucien Alfonso.

Cependant pour que le tryptique amoureux au programme du théâtre montmartrois de Salomé Lelouch fût sujet à révélations, encore fallait-il que les cinq jeunes recrues y brûlent du feu de dieu.

Alors, disons que d’emblée dans « L’Ours », le spectateur est tellement emporté par la fougue antagoniste partagée entre Bérangère Gallot et Stephen Szekely qu’il lui paraît quasi conforme qu’ Estelle Kitzis, Lauriane Lacaze & Hervé Jouval, leurs trois partenaires à suivre dans « La folle nuit » et « La demande en mariage », s’affichent, tout autant, à la hauteur du vertige Tchekhovien où les forces légitimes de séduction s’affrontent à celles de légalité.

La valeur n’attendant point le nombre des années, il est donc urgent d’évaluer celle qui, actuellement au Ciné 13 Théâtre, pourrait fort bien être la première marche d’un succès qu’ a posteriori, d’aucuns découvreurs devraient s’enorgueillir d’avoir su déceler à temps.

Theothea le 10/11/11

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