Magazine du Spectacle vivant ...

   

 

   

Les    Chroniques   de

  

17ème  Saison     Chroniques   17.081   à   17.085    Page  318

 

                                 

   

              

     

        

   

        

   

   

   

   

     

        

   

              

   

   

            

     

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SOLNESS LE CONSTRUCTEUR

de  Henrik Ibsen

mise en scène  Alain Françon

****

Théâtre de la Colline

Tel  01 44 62 52 52

 

           photo ©   Elisabeth Carecchio

                             

Si une pièce de Théâtre devait être un jeu de rôles dont le titre éponyme serait celui de son personnage catalyseur, le « Solness » d’Henrik Ibsen pourrait aisément être rebaptisé « Hilde »… sous la mise en scène d’Alain Françon, de retour à la Colline… en invité exceptionnel.

Ainsi, revenant, comme un boomerang, dans la vie du grand constructeur, dix ans après que celui-ci ait fait à la petite princesse cette promesse hasardeuse de lui offrir un château, alors n’ayant eu cesse depuis de penser à son dû, la jeune femme s’est désormais mise en quête d’obtenir son cadeau !

S’attachant davantage à l’utopie de construire un château dans les airs, à l’intention de cette fée sortie de nulle part, Alain Françon, de toutes évidences, est enclin à privilégier cette perspective mégalomaniaque plutôt qu’à ressasser le profond sentiment de culpabilité familiale intégrée par l’architecte.

En effet, puisque de toutes façons, on ne peut bâtir que sur des cendres, qu’importe les dégâts collatéraux de l’incendie domestique ainsi que les jumeaux morts dans la fournaise, c’est le talent de créativité qui doit être exalté et même se surpasser devant le charme, la séduction et l’ensorcellement du lutin, devenue femme (Adeline D’Hermy) !

Qu’importe la neurasthénie chronique et castratrice de son épouse (Dominique Valadié) tentant de ramener à leur logique rationnelle les objectifs professionnels de son mari (Wladimir Yordanoff), celle-ci l’incite à se méfier, en priorité, de sa propension au vertige.

Qu’irait-il donc escalader cette tour immense pour y déposer une couronne, s’il devait effectuer ce défi glorieux au prix de sa vie ?

Pourquoi se méfier d’une supputée concurrence de la jeunesse associée à ses travaux constructifs si c’est pour tomber dans le panneau destructif de celle qui vous préfèrerait suicidaire plutôt que vigilant ?

De cette fable métaphorique sur la toute puissance du rêve indispensable à la nature humaine ou de sa réciproque le cauchemard, Alain Françon ajoute à la fine analyse comportementale d’Ibsen, la subtilité des sentiments et ressentiments à fleur de peau dont ses acteurs exacerbent la plaie grande ouverte… à l’amour autant qu’aux vents mauvais !

Theothea le 07/04/13    

MEDEE

de  Pierre Corneille   

mise en scène   Paulo Correia   

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Théâtre de la Tempête

Tel   01 43 28 36 36

 

           photo © Fraicher-Mathey

                           

Le moins que l’on puisse dire est que la Médée de Pierre Corneille, revue et adaptée aux technologies contemporaines par Paulo Correia, ne laisse pas indifférent et aurait même tendance à radicaliser les points de vue critiques.

Sans vouloir renvoyer, a parité, les uns et les autres à leurs subjectivités partisanes, une étrange impression nous donnerait aisément l’illusion de pouvoir défendre, tour à tour, chacune de ces thèses antagonistes.

En effet, opposer la force et l’authenticité du texte dans sa perspective traditionnellement théâtrale d’avec une scénographie numérique s’inspirant de l’héroïc fantasy est quasiment impossible à résoudre.

En contrepartie, il nous semblerait nécessaire de considérer ce spectacle comme une création originale trouvant son identité artistique dans une dimension inexplorée jusque-là.

D’un côté, le mythe de Médée a été, maintes fois, modélisé de manière multiple et complexe mais, par ailleurs, l’art cinématographique a développé le goût et la fascination à l’égard des contes fantasmagoriques, c’est pourquoi la Médée interprétée par Gaële Boghossian aurait pu constituer un essai de synthèse surnaturelle au royaume du virtuel mais elle pourrait, également, être bien davantage qu’une des reines tragiques de la destinée en se hissant jusqu’à l’incarnation universelle d’une humanité en plein désarroi existentiel !

Seule alors, l’intuition du spectateur serait en mesure de rivaliser avec les intentions visionnaires du metteur en scène, tout en rendant à Corneille ce qu’il a de commun avec Sénèque, à savoir le fil conducteur de la Tragédie, symbolisé par le verbe.

Le Théâtre de la Tempête a osé affronter ce défi métaphorique; que celui-ci soit apprécié selon sa haute valeur transgressive !

Theothea le 02/04/13

DIS-MOI OUI

de  Louis-Michel Colla

mise en scène  Eric Laugerias

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Théâtre des Mathurins

Tel  01 42 65 90 00  

 

        visuel affiche  

                         

Entre la Gaîté-Montparnasse et les Mathurins, la valse des comédiens autour d’Eric Laugérias se sera accomplie au gré d’une mise en scène reprise en mains par lui-même, faisant passer le spectacle initialement de 80 minutes à quasiment deux heures, lors des dernières.

Dans cette version finale, c’est sur mesure que le plébiscite public se sera élaboré, grâce à l’établissement d’un véritable jeu de rôles, apparemment stéréotypés mais relevant en fait d’une pérégrination de Pieds nickelés se prenant tour à tour dans le tapis de fausses bonnes solutions, face à la spontanéité des prises de tête, en boucle récurrente.

Eric Laugérias a le don pour faire ressortir les intuitions contradictoires de chacun des membres du quatuor imaginé par Louis-Michel Colla, au point de se transmettre le mistigri de l’un à l’autre, sans jamais faillir à la fallacieuse vraisemblance de situations rocambolesques se déroulant en vase clos dans une improbable chambre de sixième étage.

Au sein d’un sac de nœuds relationnels engendrés par beaucoup de mauvaise foi sincère, chacun en prendra pour son grade, fût-il comme Dédé fonctionnaire de police expérimenté mais bel et bien tout aussi maladroit que ses trois autres partenaires de jeu, Vincent, Marie & Liliane.

Du début à la fin du show, les spectateurs pouffent de rire, sans jamais pouvoir appuyer sur « pause », car ce diable de Laugérias en connaît tellement la mécanique qu’il ne laisse à personne, que ce soit sur scène ou dans la salle, le soin de choisir celui de la bande des quatre qui pourrait être amnistié… pour circonstances atténuantes.

Le grand ordonnateur affole le tournis de la mauvaise conscience, celle qui précisément a tout faux, dans une justesse tellement remarquable que les saccades de rires pourraient ne jamais se conclure, même au-delà de la représentation… tout en laissant des traces de fous rires indélébiles dans l’imaginaire!

Theothea le 29/03/13

LA MAISON D'OS

de  Roland Dubillard   

mise en scène  Anne-Laure Liégeois   

****

Théâtre du Rond-Point

Tel  01 44 95 98 21

     

           photo ©  Christophe Raynaud de Lage  

                            

C’est bien entendu pour Pierre Richard que le spectateur se décide d’assister à une représentation de « La Maison d’os » et c’est, en définitive, Roland Dubillard qu’il découvre ou, mieux, redécouvre mais c’est surtout la réalisation d’Anne-Laure Liégeois qui fera lien avec cet auteur, dit vivant, car c’est effectivement quelque temps avant sa disparition que la metteuse en scène décidait de porter sur les planches du Rond-Point ce texte écrit et interprété par Dubillard lui-même, en 1962.

Ainsi, comme si la boucle devait se refermer sur le corps de l’artiste, un demi-siècle plus tard, les os craquent de partout chez ce clone du Maître faisant écho à l’autre clown, maître du destin !

Ni l’un ni l’autre n’auront de réponse métaphysique à émettre par-delà les contingences du langage mais l’un et l’autre s’emploieront à disséquer celui-ci au plus près de toutes les associations libres et autres contradictions rhétoriques.

   

   

            photo ©  Christophe Raynaud de Lage  

                         

Forte de ses trois pôles d’écriture privilégiés, « Amour, « Pouvoir » et « Mort », Anne-Laure imagine leur centre de gravité scénographique, à l’instar du Grand escalier d’une revue de Music Hall, de telle façon que l’antihéros puisse se poser la seule question qui vaille en ce bas monde : « L’ai-je bien descendu ? ».

C’est, d’ailleurs, avec une véritable armée de domestiques l’aidant à passer de vie à trépas, que l’auteur va tenter de noyer le poison instillé par la société, celui qui consiste à passer sans cesse de la plus détestable servitude à celle du cynisme absolu rendant compte, à eux seuls, des vicissitudes de la nature humaine, de toutes évidences, en plein désarroi avec elle-même !

En jouant le jeu du pur Esprit, Pierre Richard donne la réplique dialectique à ses quatre partenaires se décomptant en autant de valets de tragi-comédie qu’il pourrait y avoir d’interrogation problématique sur la survivance de soi.

Theothea le 14/04/13

TORQUATO TASSO

de  Johann wolfgang von Goethe

mise en scène  Guillaume Delaveau

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Théâtre des Amandiers

Tel  01 46 1470 00     

 

           visuel affiche (haut) & photo (bas) ©   Pascal Gély

                           

Ce texte de Goethe, adapté en français par Bruno Bayen, est avant tout un plaidoyer pour l’artiste à exercer son droit à susceptibilité dans son domaine de prédilection, de façon à pouvoir gagner en indépendance ce qui, pour un Oui ou pour un Non, pourrait lui être soustrait par l’Institution ombrageuse.

Ainsi, la réalisation de Guillaume Delaveau, cherche à illustrer que, ce qui peut permettre au talent de s’épanouir, pourrait en même temps se révéler être le nœud gordien qui en étouffe la créativité, dès l’origine.

Dans la salle modulable des Amandiers, les six comédiens s’exercent donc à dualiser l’émergence de l’œuvre d’Art en rendant compte de la civilisation dont elle est porteuse, tout en subissant de plein fouet les contradictions schizophrènes de son élite, fort partagée sur le bien-fondé de sa participation et, a fortiori, de ses éventuelles subventions !

Ceci dit, le reproche qui pourrait être adressé à la mise en scène serait celui d’instrumentaliser le texte, en ayant recours à des pléonasmes scénographiques, certes symboliques, mais qui ont une fâcheuse tendance à souligner ce qui pourrait être entendu sans fioritures et dans une bien plus grande abstraction.

Toutefois, la japonisation du décor renforce, à juste titre, l’hypersensibilité règnant en maîtresse sur le plateau et c’est donc, dans l’exacerbation des détails qui interpellent, des nuances qui frappent l’imaginaire et des lumières qui frisent les jeux d’ombres que le spectateur se trouve en proie au doute réconfortant son appréciation vigilante - Surtout ne pas prendre des vessies pour des lanternes !

Theothea le 15/04/13

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