Félicitons-nous, tout dabord, de lesprit de curiosité
et douverture sur le monde, exprimé par la direction de La
Comédie-Française, permettant ainsi laccès, pour
la première fois, au répertoire dune uvre en langue
arabe, traduite en loccurrence par Rania Samara.
Il sagit donc de la dernière pièce écrite par
lauteur syrien Saadallah Wannous en 1994, situant ce conte dramaturgique
au milieu du XIXème.
Une lutte de pouvoir machiste où les autorités politique,
policière & religieuse risquent, chacune, de perdre la main au
profit des deux autres, va entraîner un surcroît de victimisation
de la femme parce que celle-ci représente le maillon le plus
vulnérable reliant ces différentes instances sociales.
De la prostituée à lépouse honorable, toutes
vont se sentir bafouées par des calculs stratégiques ne visant
quà asseoir lautoritarisme institutionnel au détriment
du respect de la personne privée.
Par un jeu de renversement et de transgression, la métamorphose
de la candeur supposée en perversité fantasmée, finira
de perturber lensemble des classes sociales locales, effarées
dun retournement subit des valeurs ancestrales conditionnant
jusque-là la femme au plus profond de son intimité.
Si la mise en scène de Sulayman Al-Bassam a lintention
prioritaire déchapper au folklorisme arabe traditionnel, celle-ci
souhaite néanmoins cadrer lenjeu dramaturgique au plus près
du réalisme contingent en enfermant les phases successives de cette
parabole aux mille et une trahisons, au cur dune maison qui peut
tout aussi bien devenir tribunal, prison que bordel luxuriant.
Ce concept de huis clos modulable a lavantage de démultiplier
les modalités de loppression, derrière de hauts murs
qui, malgré leur badigeonnage artistique ou non, ne peuvent cacher
que labus de pouvoir, quel quil soit.
Souhaitant épurer la thématique passionnelle en
lélevant au niveau universel, cest dans labstraction
de décor sublimant lhéroïne ( Julie Sicard ) que
se conclura la mise à mort symbolique par un grand frère,
effrayé de sa propre audace.
Ainsi, la messe est dite, puisque le rituel pourra se renouveler à
linfini jusquà nos jours, sans que la rébellion
ne puisse en finir avec la tyrannie des murs imposés par
lensemble de ces pouvoirs vacillants et, par conséquent, tellement
redoutables.
Quant à la métamorphose en devenir, elle ne cesse de se
renouveler à lécoute dune vigilance empathique
qui, chemin faisant, pourrait fort bien atteindre sa cible socio culturelle
au sein de la Salle Richelieu !
Theothea le 31/05/13