Retrouver Catherine Hiegel en directrice des comédiennes, Catherine
Salviat & Judith Magre interprétant une pièce de Thomas
Bernhard au Théâtre de Poche Montparnasse, cest en soi
tout un programme dont on se réjouit à lavance.
En choisissant les trois premiers dramuscules (drames en minuscules) au
nombre de neuf écrits en 1988 au crépuscule de sa vie
dauteur autrichien exécrant ses congénères
contemporains, la metteuse en scène, ex-doyenne de La Comédie
Française, construisait un spectacle denviron une heure auquel,
elle eut lidée dajouter, entre les 2ème et 3ème
saynètes, un quizz interactif dune vingtaine de citations exprimant,
objectivement ou à leur insu, des relents de racisme ordinaire,
cest-à-dire ne prenant pas conscience de la plus ou moins grande
énormité humaine proférée selon les critères
de bonne conscience en usage du XVIème siècle jusquà
nos jours.
Cette diversion censée, de surcroît, faire gagner des places
gratuites aux spectateurs découvrant et annonçant lauteur
de ces phrases successivement citées par Catherine Salviat qui, ainsi
durant de très longues minutes, se transforme pour la cause en animatrice
du jeu
de Poche, nous a semblé totalement incongru par rapport
à la dramaturgie métaphorique de Thomas Bernhard utilisant
lartifice fictionnel pour se distancier idéologiquement de ces
personnages, certes caricaturaux mais, bel et bien, mis en perspective
scénographique.
Le risque encouru, en objectivant ainsi lidentité des
personnalités prises à contre-pied dune éthique
citoyenne, universellement formatée, est tout simplement celui dune
situation de démagogie implicite, renvoyant dos à dos, des
intentions douteuses, voire maladroites, extraites de leur contexte spatial,
temporel et sémantique.
Cette séquence interactive ludique nous paraît donc relever
de la fausse bonne idée de réalisation théâtrale.
En outre, à ce titre, elle nous semble manquer son objectif qui
était dillustrer, voire de souligner les propos relevés
par Thomas Bernhard
. mais qui, de fait, se suffisaient largement à
eux-mêmes pour inciter le spectateur à la réflexion
morale.
Quant à la mise en scène des trois dramuscules
sélectionnés, puisque cest bien deux dont il
sagissait initialement, linterprétation drôlement
emphatique et outrancière quen font Catherine Salviat &
Judith Magre en compagnie masculine dAntony Cochin, constitue,
effectivement et de manière convaincante, le régal dont on
savourait davance la portée subliminale.
Theothea le 02/12/13