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Les    Chroniques   de

  

18ème  Saison     Chroniques   18.121   à   18.125    Page  350

 

  • CENDRILLON                           
  • LE MISANTHROPE                 
  • GOLGOTA                                 
  • LE LEGS                                     
  • VOLTAIRE ROUSSEAU                        1846ème  chronique  (depuis 1996)

         

 

             

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CENDRILLON

    

Chorégraphie Thierry Malandain

****

Théâtre Chaillot

Tel   01 53 65 30 00

                    

            photo © Olivier Houeix  

   

La danse de Thierry Malandain mêle harmonieusement le classique et le moderne dans un état d'apesanteur, où les corps deviennent aériens, légèreté et fluidité caractérisent essentiellement ses ballets.

Dans un décor simple (Jorge Gallardo) à la Magritte, où la pantoufle de vair, objet du désir et du délit, devient ici un bel escarpin vernis violine, à talon aiguille, qui dégringole du plafond au plancher et, dans un alignement géométrique, remplit obsessionnellement trois panneaux, le chorégraphe nous propose une adaptation très personnelle du conte où la danse emprunte de théâtralité devient magie.

La sobriété des costumes (idem Jorge Gallardo) est de rigueur dans une harmonie élégante de gris perle, blanc, beige, excepté pour la marâtre (Baptiste Frisson) et les deux demi-soeurs de Cendrillon (Javotte : Frédéric Deberdt et Anastasie : Jacob Hernandez Martin) jouées toutes trois par des hommes hyper maquillés au crâne rasé.

Tel un échassier noir dressé sur des béquilles, la mère, prédatrice, puissante et tentaculaire, toujours flanquée de ses deux filles contrebalancent les envolées oniriques par leur pantomime burlesque, révélant ainsi leur jalousie et leur méchanceté, mais le clin d'oeil emprunt d'agressivité et de sadisme est ici très humoristique.

Le ballet s'ouvre sur une composition florale. Le choeur des elfes s'épanouit comme une fleur devant nos yeux ébahis et les bras s'élèvent tels des oiseaux s'échappant du coeur de la fleur.

Puis place à la danse, mouvements amples, portées virevoltantes, sauts aériens et élastiques, d' une complexité subtile et d'une maîtrise absolue, sont figurés par vingt danseurs, plein de conviction, du Malandain Ballet Biarritz.

La Cendrillon de T. Malandain est épurée. La citrouille se transforme ici en un immense cerceau lumineux dans lequel apparaît l'héroïne. Quant à la scène du bal, quelle merveille d'inventivité. Les douze courtisans du prince dansent la valse avec douze mannequins sur roulettes, vêtus de robes vernies noires et, aux douze coups de minuit, en battant le rythme d'une horloge, ils s'échappent un par un de la ronde du bal. C'est d'une beauté magistrale.

Le ballet se terminera d'une façon similaire au prologue, la fleur se referme. Elle sera délicatement arrosée par la marâtre et les deux soeurs toutes de vert vêtu, devenues douces, métamorphosées par la victoire de l'amour, sur un joli pas de deux, de Cendrillon (Miyuki Kanei) et du Prince (Daniel Vizcayo).

Un final plein d'espoir et de lumière, même la méchanceté est vaincue.

Une ode à la nature humaine, intense et poétique sur une musique composée en 1945 par Sergeï Prokofiev, somptueuse partition qui a inspiré d'autres Cendrillon, dont celle de Rudolf Noureev et celle, plus contemporaine de Maguy Marin.

Dommage qu'au Théâtre National de Chaillot, il n'y ait pas dans la fosse un orchestre symphonique live, tel l'orchestre symphonique d'Euskadi de San Sebastian présent à l'Opéra royal de Versailles où est passé précédemment le ballet.

L'élévation corporelle en apesanteur de toute une troupe dirigée avec une extrême rigueur par Thierry Malandain, Directeur du centre chorégraphique de Biarritz, communique une légèreté à l'âme du spectateur littéralement séduit et subjugué. Une Cendrillon féerique qui a du souffle.

Cat.S / Theothea.com, le 25/04/14     

           

           

            photo © Olivier Houeix 

         

LE MISANTHROPE

de Molière

mise en scène  Clément Hervieu-Léger

****

Comédie Française

Tel   01 44 58 15 15

                    

            photo © Brigitte Enguerand  

             

Clément Hervieu-Léger ayant joué le rôle d’Acaste au Français sept années auparavant sous la direction de Lukas Hemleb, c’est donc sous proposition de Muriel Mayette qu’il a choisi de monter, lui-même, aujourd’hui « son » Misanthrope à la suite de « sa » Critique de l’école des femmes.

Disons-le d’emblée, l’ample reconnaissance éditoriale, suscitée par sa mise en scène actuelle à Richelieu, vient contrecarrer les détracteurs de l’Administratrice de La Comédie-Française en fin de mandat à qui, il est entre autres, reproché un « déficit artistique » par suite de nombreuses réalisations confiées à des comédiens Maison.

Voilà donc pour la problématique diplomatique contradictoire alors que, par ailleurs, est toujours florissant à l’affiche « Le songe d’une nuit d’été », mis en scène par Mayette-Holtz elle-même, que ces pourfendeurs ont du mal à apprécier, essentiellement pour des raisons formelles et symboliques mal acceptées…

Bref, Le Misanthrope, lui, est globalement bien reçu, voire encensé et pourtant certaines voix indépendantes, dont la nôtre, y décèlent une audibilité contre-performante et une agitation en trompe l’œil, plutôt vaine.

Tout le monde, bien entendu, s’accorde sur la qualité de la distribution et de l’interprétation qu’il n’est pas nécessaire d’analyser, ici, en détail mais dont il nous plaît de relever le nom de Georgia Scalliet qui, en incarnant Célimène de manière si malicieuse, si pétillante, si enjouée, pourrait faire débaptiser la pièce de Molière par ce titre substitutif : « La séductrice ».

Ainsi, en contrepoint de la mélancolie galopante dans les trois escaliers scéniques, peut-être à la recherche d’un improbable esprit éponyme en colimaçon, la dépression souffretante et aigrie semble avoir contaminé l’ensemble des visiteurs opportuns, au point de les virtualiser, bien qu'ils fussent rendus drôles, par ricochet, face à la douleur affichée ostensiblement par Alceste.

Loïc Corbery est donc en charge de détester l’Humanité et l’ensemble de ses codes sociaux, sous prétexte que Molière aurait été trahi par Racine et que présentement Célimène échappe à l'Atrabilaire amoureux au profit d’une ribambelle de fats prétendants faisant la cour à la belle…

Certes, c’est très bien joué mais le problème, c’est aussi d’être mal entendu, même au cœur de l’orchestre, ce qui est un comble après les importants travaux d’acoustique réalisés récemment.

En conséquence, la perception de la pièce pourrait aisément tourner à l’impression d’une course poursuite ponctuée de longs bavardages à décoder par chacun, à distance, selon sa propre connaissance plus ou moins approfondie du texte en vers.

Ceci dit, la critique laudative insiste sur la qualité de jeu de tous les comédiens ainsi que sur l’originalité du point de vue d’Hervieu-Léger rendant l’enjeu misanthropique intemporel et par conséquent fort proche de nous-mêmes.

Ainsi, à l’instar d’un film muet en noir et blanc, les personnages paraîtraient s’agiter dans un « cercle d’illusions » à remettre en perspective; ce qui, par les temps qui courent, pourrait être un gage de succès à la mode !

Theothea le 21/04/14           

GOLGOTA

de Bartabas

mise en scène  Andrés Marin

****

Théâtre du Rond-Point

Tel   01 44 95 98 21

                    

            photo © Nabil Boutros 

     

Ce spectacle de Bartabas se présente en salle Renaud-Barrault comme dans l’espace temps d’une retraite au cœur de l’intime.

Ainsi, en venant déposer, de manière récurrente, un cierge et son obole dans la tirelire dédiée à la dévotion en milieu de bord de scène, un Monsieur Loyal, quelque peu sacristain, se fait porteur d’espoir des spectateurs du Rond-Point alors que ceux-ci sont encore en état de déambulation bruissante précédant les trois coups de la représentation théâtrale.

Alors, pour atteindre à l’état de grâce, c’est la prière psalmodiée en chants grégoriens par Christophe Baska le contre-ténor qui, dès l’ouverture du rideau, prendra le relais, au diapason d’un luth (Marc Wolff) et du cornet (Adrien Mabire).

Horizonte, Le Tintoret, Soutine & Zurbaran viendront par la suite esquisser en mimétisme duel, les pas de l’homme chorégraphiés au rythme de l’animal.

L’effet miroir jouera ainsi à pleine effervescence, entre Pèlerinage rédempteur & Flamenco équestre que l’âne Lautrec et le bon sacristain orchestreront en une sorte de ballet tourneur, façon derviches surfant sur le sable lunaire d’un gris soyeux autant que profondément mystérieux.

C’est aussi l’encens ou son ersatz prégnant la concentration vigilante du duo Bartabas - Andrés Marin qui finira de superposer les strates de mémoire composant les tableaux fascinants successifs en un chapelet pascal du plus bel effet du jour… en l’occurrence vendredi saint.

En effet, c’est bien le Golgota sans « H » à l’espagnol qui est dans le collimateur de Bartabas et c’est donc La Passion dans tous ses états poignants et douloureux que visent les soubresauts et autres derniers soupirs en un rituel homme-cheval épuisant toutes les forces vives jusqu’à la fin du monde fusionnel.

Il ne restera plus au sacristain qu’à tirer le rideau des métaphores rédemptrices pour que le public sorte du songe éveillé en un nouveau spectacle du réel… comme à l’aube d’un jour sans tâche originelle.

Theothea le 23/04/14

                 

     

             photo © Nabil Boutros 

         

LE LEGS

de Marivaux

mise en scène  Marion Bierry

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Théâtre Poche Montparnasse

Tel   01 45 48 92 97

                    

            photo ©  Victor Tonelli

     

prochainement

           

              photo ©  Victor Tonelli

         

VOLTAIRE ROUSSEAU

de Jean-François Prévand

mise en scène  Jean-Luc Moreau

****

Théâtre Poche Montparnasse

Tel   01 45 48 92 97

                    

                      photo © Brigitte Enguerand  

     

Si sa mise en scène joue « le duo », c’est la faute à Jean-Luc Moreau !…

Si son partenariat est « au taquet », c’est la faute à Jean-Paul Farré !…

Mais si tous les deux honorent Voltaire et Rousseau, c’est bien grâce à la fluidité littéraire de Jean-François Ferrand.

Bref, vingt-trois années plus tard, Philippe Tesson, le directeur du Poche-Montparnasse reprend les mêmes et ceux-là recommencent à flirter avec l’excellence des tréteaux ayant porté le duel depuis 1991 au La Bruyère, à la Gaîté-Montparnasse, à la Comédie de Paris et à l’Oeuvre.

En s’attachant cette fois-ci davantage aux implications humaines que sous-tendaient la dialectique idéologique entre les deux écrivains emblématiques des Lumières, les comédiens livrent symboliquement leur combat fratricide, à mains nues et sans langue de bois.

Difficile néanmoins de ne pas prendre parti pour Voltaire durant la plus grande partie de leur confrontation, tellement celui-ci revient sans cesse à la charge et tellement Rousseau, lui, se contente d’esquisser les coups en ne cherchant qu’à justifier les torts qui lui sont reprochés.

Car, à vrai dire, si Rousseau était venu jusqu’à Ferney dans la propriété de Voltaire, ce n’était pas tant pour croiser le fer sur leurs différents intellectuels que pour tenter de savoir si son adversaire philosophique était véritablement l’auteur du Pamphlet qui lui valait un bannissement général.

Ayant donc quasiment acculé Rousseau dans les cordes, Ferrand permettra à l’auteur de l’Emile de se reprendre et de se jeter dans un baroud d’honneur final, tout à fait à la hauteur des idéaux prônés, jusqu’à déstabiliser ainsi la superbe de Voltaire.

Sans toutefois pouvoir parvenir au match nul, c’est à l’instar du taureau blessé à mort que Rousseau se défendra alors vaillamment des convictions de son détracteur, permettant ainsi à Jean-Luc Moreau d’effectuer un formidable numéro de bravoure.

Mais il faut dire que Jean-Paul Farré n’aura vraiment pas été de reste durant toute la représentation, en démontrant une énergie du diable le portant au plus haut de son art d’acteur.

A voir et à revoir à satiété !

Theothea le 30/04/14

               

     

                         photo © Brigitte Enguerand  

         

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