Mais qui seraient donc ces gardiens du Temple glorifiant
« Molière » dans lequel Jean-Marie Besset serait
entré par effraction, en le gratifiant « par la
bande » dune « Gay Attitude »,
elle-même étayée par des sources contestées par
certains historiens mais admises par dautres ?
En diversion aux polémiques prévisibles, Jean-Marie Besset
montre notamment comment, sinspirant dune pièce de Cyrano
de Bergerac « Le pédant joué », Molière
élabore lintégration de la fameuse réplique:
« Mais que diable allait-il faire dans cette galère
? » dans sa prochaine pièce sintitulant « Les
Fourberies de Scapin »; ainsi, mine de rien, Jean-Marie Besset
se dédouane par avance de ses détracteurs en sautorisant
lui-même de semparer du patrimoine culturel pour le façonner
selon ses propres desiderata artistiques.
Quimporte, en effet, la pertinence secrète ou pas,
inhérente aux ébats pratiqués dans la chambre à
coucher de Molière, lessentiel serait dillustrer, dans
le cadre dune réalité socioculturelle propre au XVIIème
siècle, celui dun libertinage philosophique très prisé
au sein de lintelligentsia de lépoque et à laquelle
aurait effectivement adhéré Molière, notamment à
la fin de sa vie lorsque les modalités de sa liaison avec Armande
Béjart commençaient à lui peser.
Cest ainsi quhébergeant dans sa villégiature
dAuteuil deux comédiens de sa troupe, Molière aurait
pris goût, au contact de ceux-ci, dy laisser sorganiser
des agapes bien alcoolisées où les points de vue poétiques
pouvaient, sous caution de banquet platonicien, se transformer en bacchanales
ou en leurs projections fantasmées.
Toutefois, dans cette perspective, le jeune Michel Baron, protégé
et favori de Molière, serait devenu peu à peu lobjet
dun tel amour exclusif que son hôte pouvait savérer
ombrageux à légard de tous ses autres invités.
Dix comédiens « plein dallant » ont
été réunis par Régis de Martrin-Donos pour
créer cette pièce, dabord en janvier 2014, marquant ainsi
le départ de Jean-Marie Besset de la direction du CDN de Montpellier,
et maintenant, un an plus tard, au Théâtre 14, pour la faire
découvrir aux parisiens.
Lexhibition de la nudité masculine sur les planches ne
représente plus en soi, à lheure actuelle, un
phénomène sensible; en revanche, lidéologie
consensuelle de lépoque actuelle naime pas trop que les
créateurs remettent en question les valeurs établies. Danger
éminent, en effet, pour ceux qui osent sattaquer à
Shakespeare, à Racine et à tous les grands noms du
Théâtre classique !
Présentement, la problématique serait donc de savoir si
Jean-Marie Besset instrumentalise ou non Molière en lui faisant endosser
des murs qui, jusquici, ne faisaient pas forcément partie
de son image de marque.
Au demeurant, la mise en scène obéit à une
esthétique très stylisée, lécriture est
à la fois lumineuse et fort documentée, les comédiens
en pleine verve empathique. Lensemble est à apprécier
à sa juste mesure distanciée.
Theothea le 17/03/15