Les
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11ème
Saison
Chroniques 11.81
à
11.85 Page
187
Le retour
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LAISSEZ MOI
de Marcelle
Sauvageot
mise en scène
Anne Rotenberg
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****
Petit Théâtre de Paris
Tel: 01 42 80 01 81
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Visuel
affiche © François
Darmigny
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Dimanche 20h00, Claire Chazal présente comme à l'accoutumé
son journal télévisé; mardi 19h00, s'asseyant sur une
chaise à l'avant-scène du Petit théâtre de Paris
où dans le halo mordoré que capte si bien son visage de
trois-quarts, elle lit sur un grand cahier d'écolier le recueil des
lettres laissées en 1930 par Marcelle Sauvageot emportée à
l'âge de trente ans par une pleurésie.
Rupture d'image et interrogation sur la pérennité de la
relation amoureuse vont se confronter dans une mise en abîme où
l'une parle de l'autre, sans se départir du quant à soi qui
jaugerait l'autre des pieds à la tête à l'aune de son
double médiatique.
Et pourtant rien n'est tout à fait similaire au reflet cathodique,
si ce n'est la chevelure blonde dégagée par inadvertance
derrière l'oreille, si ce n'est le regard qui se lance de biais dans
l'angle mort de la phrase qui chute.
Claire Chazal, pieds nus ôtés de leurs chaussures à
hauts talons se positionne au gré des réglages lumières
signés Gaëlle De Malglaive dans des postures enrobées
tout de marron chic, trahissant la volonté d'Anne Rotenberg de ne
pas mettre en scène l'émotion inhérente à la
rupture d'affection catalysée par la longue maladie.
Le ton de la journaliste lançant les sujets d'actualité
par raffales s'efface alors au profit d'une mélopée qui, de
missives en temps épistolaires, se fraie les pauses d'un questionnement
à haute voix sur l'amour en balance avec l'amitié à
peu de frais.
En réactivité aux élégances dont l'amant se
départit avec aisance, point de plainte aiguisée par une petite
musique lancinante mais la revendication d'une quête d'absolu que seule
l'aimée délaissée pourra mener de front avec la mort
qui se profile.
La lectrice se love au sein de la dignité affirmée dans
le réconfort d'une écriture au féminin pluriel; Claire
empoigne Marcelle pour en témoigner les stigmates d'un orgueil
décliné dans la langue des confidences, celle que Truffaut
ou Rohmer reprendrait aisément à leurs contes cinéphiliques
en psalmodiant la voix off du récitant.
« No man, no cry » murmurerait l'écho en mâles
de reconnaissance: Voilà donc une entrée en scène bien
réussie devant un rideau de fer resté abaissé permettant
de préserver la proximité du témoignage dans
l'intimité partagée d'une lecture existentielle.
Theothea le 04/04/07
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PARTAGE DE MIDI
de Paul
Claudel
mise en scène
Yves Beaunesne
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****
Comédie Française
Tel: 08 25 10 16 80
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Photo © Guy
Delahaye
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En se passant le relais de mère à fille, Ludmila Mikaël
donne à Marina le flambeau génétique hérité
pareillement de Thierry Hands mais dont seul l'état de grâce
pourrait rendre compte, à trente-deux années d'intervalle,
d'un nouveau sacre à la Comédie-Française.
C'est effectivement sur le tard que la jeune pensionnaire, intronisée
début 2006, a pris les voiles de comédienne quasiment par antidote
à ses inhibitions et introversion, suite à une vocation
équestre abandonnée professionnellement au profit de cours
de théâtre éminemment révélateurs.
César de la meilleure actrice pour son interprétation de
Lady Chaterley, la voici désormais en incarnation d'Ysé que
Paul Claudel a conçue en souvenir autobiographique d'un surgissement
intempestif de l'Amour, lors d'un véritable coup de foudre alors qu'il
voguait vers la Chine en tant que jeune consul de trente ans.
Sur le pont supérieur du paquebot, trois personnages adossés
nonchalamment aux cordages du bastingage s'essaient à un jeu de
société où la jeune femme sera l'enjeu non seulement
d'une rivalité entre mâles mais surtout, à son corps
défendant, le symbole de la victoire du désir s'abandonnant
à l'emprise de Dieu sublimé en idéal absolu.
Le mari, l'aventurier et l'amant sonnent ainsi la charge d'une épreuve
initiatique qui surprend l'intéressée elle-même, à
son jeu défensif de mère et d'épouse rangées
des pulsions.
Cependant, parce que c'étaient elle et lui, va se réveiller
le volcan étouffé de la passion qu'ils se jureront d'éteindre
au plus vite pour être en accord avec l'ordre moral menacé.
Alors qu'après bien des tribulations asiatiques et autres tourments
conjugaux et maternels, le retour du refoulé agira en boomerang à
plusieurs coups de semonce jusqu'à sanctifier leur innocence
transgressée, le flux de la lumière divine pourra, en accordant
le pardon ultime, consacrer l'union d'Ysé et de Mésa.
Eric Ruf, Christian Gonon, Hervé Pierre entourent au mieux Marina
Hands qui confirme un charisme à la fois athlétique et sensuel,
à la hauteur des plus grandes stars du spectacle vivant,
c'est-à-dire au plus profond de l'humilité artistique par laquelle
le talent d'Yves Beaunesne peut valoriser sur l'échelle des
luminosités et selon une palette des nuances et contrastes, cet élan
mystique si cher à Claudel.
Theothea le 14/04/07
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LE PRESIDENT
de Thomas
Bernhard
mise en scène
Blandine Savetier
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****
Théâtre de La Colline
Tel: 01 44 62 52 52
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Photo © Marthe Lemelle
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A la fois comédie et drame, cette tragédie du pouvoir en
quête de lui-même contemple le processus de la déchéance
dans le miroir du délire psychotique.
Côté drame, il y a le peuple en pleine insurrection pour
obtenir la chute d'une mascarade dans laquelle sombre un couple
présidentiel en rupture de tous liens avec l'éthique de ses
responsabilités.
Côté comédie, il y a le théâtre qui permet
de singer la confrontation de l'homme et du tyran en jouant avec la
présence ou le retrait de multiples masques virtuels.
Que Madame La Présidente (Dominique Valadié) soit assise
à sa table de toilette en maugréant contre la servitude de
sa vie d'épouse en rébellion à la fois contre son mari
et ses concitoyens, voici que se met en place la phase révélatrice
d'un naufrage annoncé.
En seul réconfort à cette décadence, subsiste à
ses pieds un couffin vide; c'est celui de son chien tué lors d'une
récente tentative d'attentat présidentiel et à l'égard
duquel elle va développer une dévotion monomaniaque
déclamée sans retenue en présence de sa femme de chambre
(Charlotte Clamens) médusée et coite.
En s'abandonnant ainsi à une hystérie à peine feinte,
des éclairs de lucidité psychologique parsèment
néanmoins des propos en apparence incohérents mais laissent
deviner une angoisse indicible que d'incessants coq-à-l'âne
lui permettent de maintenir à distance tant mal que bien.
Que Monsieur le Président (Eric Guérin) se prélasse
dans un Palace-Casino du Portugal en soliloquant sur tous les maux
gouvernementaux faisant obstacle à la mégalomanie de son ambition
politique, que de plus ce Président se complaise à s'afficher
avec une maîtresse subjuguée devant tant d'arguties mythomaniaques,
voici qu'apparaissent les stigmates d'une fonction déchue jusqu'à
laisser l'apprenti dictateur reclus dans ses caprices, tels des jouets pour
enfants très attardés.
Cependant, initiée à partir d'une révolution immanente
allant jusqu'à évoquer le parricide suscité par la
détestation du peuple, la monstruosité de cette fantasmagorie
à mille lieux d'un imaginaire d'opérette déclenche un
véritable court-circuit psychique qui interroge la conscience
citoyenne.
Ainsi l'auteur, en livrant ce conte métaphorique fidèle
à son image littéraire, pressentait-il les spasmes qu'en aurait
provoqués la création théâtrale dans son pays
d'origine. C'est pourquoi le dramaturge a interdit toutes représentations
de son oeuvre en Autriche durant 50 ans après sa mort en 1989.
Davantage visionnaire que moraliste, Thomas Bernhard laisse ainsi en
testament, une perception ironique, cynique voire désabusée
du pouvoir issu de la comédie humaine que la direction d'acteurs de
Blandine Savetier cherche à illustrer avec un humour ubuesque.
Theothea le 26/04/07
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RUTABAGA SWING
de Didier
Schwartz
mise en scène
Philippe Ogouz
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****
Comédie des Champs-Elysées
Tel: 01 53 23 99 19
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Photo
© Lot
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Avec deux nominations aux XXIèmes Molières, il
savère que le Swing et le Rutabaga sont désormais
associés dune part pour espérer le trophée du
Théâtre public ayant trouvé sa plénitude au
théâtre privé avec deux reprises successives au Petit
Montparnasse et à La Comédie des Champs-Elysées,
dautre part pour une célébration de Didier Schwartz
cité en tant que meilleur auteur de cette saison théâtrale
06-07.
Aussi, à quelques jours de cette cérémonie qui va
exalter les plus prisés dentre les spectacles, force est de
constater que cette pièce a réussi à fédérer
la réflexion des critiques et des spectateurs sur le thème
de la collaboration grâce à un chassé-croisé
vaudevillesque jalonné de chansons de cette période
interprétées par les comédiens eux-mêmes.
En effet en 1942, au café de Madame Barray à Chambier, les
échos de la guerre se révèlent dans le comportement
que les habitués affichent devant loccupant, alors que les masques
se dissimulent au gré des actes de résistance et selon les
mesures de rétorsion ennemie.
Et pourtant la vie y continue avec son désir de divertissement
symbolisé en loccurrence dans la répétition dun
tour de chant amateur quun officier allemand (François Feroleto)
peut apprécier tout en ayant réquisitionné une des trois
chambres.
Un facteur (Jacques Haurogné), un bibliothécaire (Bruno
Abraham-Kremer), une coiffeuse (Marion Posta), une serveuse (Amala Landré)
et le patron du bar (Emmanuel Curtil) semploient à ce projet
artistique alors quun otage (Jacques Herlin), condamné à
mort par la Kommandantur locale, se réfugie dans
létablissement en suscitant demblée une cohabitation
de cache-cache tout à fait grand-guignolesque.
Lauteur ne prend pas parti sur les tenants et aboutissants moraux
que cette situation tragi-comique va engendrer, mais il laisse tout au contraire
lobservateur en prise directe avec la confusion, le doute et le trouble
que ne cesse de compenser le charme désuet de cette époque.
Cette volonté relayée par une mise en scène à
latmosphère bon enfant, digne dun jour de fête cher
à Jacques Tati, se manifeste grâce à un
accompagnement au piano-bar (Ezequiel Spucches) que la vie au quotidien se
charge de rythmer dans la convivialité villageoise des années
quarante, quelque part entre de Gaulle et Pétain.
Cest la Libération qui marquera le coup fatal à tant
de postures contenues dans le quant-à-soi, en révélant
au grand jour, courage et lâcheté dans toute leur splendeur
respective.
Un véritable spectacle de divertissement au service dune
cause citoyenne où chacun y trouvera du grain éthique à
moudre dans une joyeuse mélancolie.
Theothea le 04/05/07
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LES MOTS ET LA CHOSE
de
Jean-Claude Carrière
mise en scène
Daniel Bedos
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****
Théâtre de l'Oeuvre
Tel: 01 44 53 88 88
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Photo © Eric Devert
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En ayant repris, il y a quelques saisons son propre texte des mots et
de la chose pour l'interpréter
sur les planches en compagnie d'abord de Carole Bouquet, ensuite de
Marie-Sophie L., Jean-Claude
Carrière excellait en malicieux professeur de maintien BCBG dans la
préservation de la richesse du vocabulaire et d'expressions bien
françaises illustrant le sexe sous toutes ses coutures lexicales.
Pour la tournée hexagonale consacrant le succès public de
cette leçon de choses, ce fut au tour de Jean-Pierre Marielle, en
duo avec sa compagne Agathe Natanson, de reprendre le flambeau de la
métaphore osée mais bel et bien populaire afin d'en délivrer
la pédagogie pleine de transgressions imagées en total sourire
décomplexé.
Gérard Maro, directeur du Théâtre de l'Oeuvre proposa
donc au couple de faire une halte parisienne printanière qui
d'emblée s'impose comme une pause bienvenue en 2007, après
tant de cogitations électorales circonstancielles largement au-dessus
de la ceinture.
Grâce à la mise en scène originelle de Daniel Bedos
associant pour l'une un canapé de relaxations et pour l'autre un pupitre
magistral autour desquels va s'organiser, au fur et à mesure de la
psalmodie érotique, la dispersion des feuillets lexicographiques qui
vont peu à peu joncher le sol de leur semence aphrodisiaque, c'est
toujours la magie du violoncelle qui apporte les respirations musicales au
vocabulaire tellement audacieux en valorisant présentement le doigté
talentueux et sensuel de Pierre-François Dufour.
De l'auteur renommé au comédien aguerri se succédant
ainsi à tour de rôles sur les planches, Jean-Pierre Marielle
inverse en quelque sorte la posture de Jean-Claude Carrière, en paraissant
soigner la mélancolie coquine à l'égard des choses de
l'Amour là où la joyeuse malice brillait précédemment
de tous ses feux didactiques.
Les subtilités de langage continuent de s'y confronter en
exclusivité avec la crudité des saveurs linguistiques pour
la meilleure des choses, mais la partenaire féminine s'y trouve
rehaussée au niveau d'initiatrice en pulsions charnelles plus affriolantes
les unes que les autres.
La félicité d'Agathe Natanson se déguste ainsi à
vue d'oeil libertin alors que Jean-Pierre Marielle en intercepte avec
délectation les fumets de l'imaginaire torride, hors d'atteinte du
vulgaire.
C'est ainsi que pour avoir pensé la chose sans devoir en panser
le moindre maux, Jean-Claude Carrière est devenu Maître d'
Oeuvre.
Theothea le 14/05/07
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