Les
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17ème
Saison
Chroniques 17.016
à
17.020 Page
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JULIE DES BATIGNOLLES
de
Pascal
Laurent
mise en scène
Eric Metayer
|
****
Théâtre La Bruyère
Tel:
01
48 74 76 99
|
Avec sa Julie, Eric Métayer a concocté une sorte de thriller
recomposé à la manière des familles
daujourdhui en invitant à sa mise en scène, à
la fois son fils Kevin en même temps que la mère de celui-ci
Viviane Marcenaro, mais sans sy attribuer lui-même de
rôle.
A linstar des tontons flingueurs, cest la tatche qui va en
faire le régal; en effet, à la manière de Michel Audiar,
Pascal Laurent a ciselé des répliques à
lemporte-pièce qui pourraient faire date.
Bien entendu, cette petite réunion des familles va tourner au vinaigre,
car cette bande de pieds nickelés, fussent-ils que trois,
réfugiée dans un cabanon de chasse après un rapt
improvisé, va trouver son acolyte en un représentant de la
maréchaussée peu scrupuleux mais tout aussi rocambolesque.
Le parler parigot des faubourgs en pimente la dégaine ad hoc, style
années 50 revisitées vintage alors que
çà fuse dans tous les sens autour de Julie ne sen
laissant pas conter pour autant et qui, pour une kidnappée de pacotille,
affiche un sacré répondant.
Les cinq comédiens excellent ainsi à se cantonner dans des
portraits parodiques de malfrats à la petite semaine rappelant les
polars en noir et blanc de la grande époque et permettant ainsi à
Eric Métayer deffectuer au Théâtre La Bruyère
un fondu enchaîné très cinéphile entre
« Les 39 marches » et sa « Julie des
Batignolles ».
Theothea le 11/10/12
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CHER MENTEUR
de
Jean Cocteau
mise en scène
Régis Santon
|
****
Théâtre La Bruyère
Tel:
01
48 74 76
99
|
« Cher menteur » est une charmante
déclaration damour du célèbre dramaturge irlandais
George Bernard Shaw pour une grande comédienne britannique Stella
Campbell, adaptée par Jérôme Kilty (décédé
à 90 ans le 6 septembre 2012) sous la forme dune correspondance
entretenue par les deux artistes pendant plus de quarante ans, du début
du 20ème siècle jusquà la Seconde Guerre mondiale,
1940, date de la mort de Stella Campbell.
Dans un décor scindé en deux, côté jardin,
une coiffeuse à miroir ovale et paravent, côté cour,
un somptueux écritoire, nos deux monstres sacrés échangent
des lettres pleines dhumour et desprit. Finement campés,
dans cette mise en scène signée Régis Santon, par Francine
Bergé et Marcel Maréchal, élégamment vêtus,
leur face à face spirituel est souvent doté de réparties
malicieuses et parfois pleines de dérision.
Lémotion vient au fur et à mesure du vieillissement
de leurs relations. Au commencement, un simple échange de lettres
entre un homme et une femme, Bernard Shaw est déjà adulé
et écrit pièce sur pièce, Stella Campbell est une
comédienne aguerrie, exubérante et exigeante. Le duo se perdra
de vue, parfois pendant de longues années, lamour réciproque
des planches les ramèneront sur scène, lui tentera de la convaincre
à accepter le rôle principal dans Pygmalion, pièce
écrite spécialement pour elle, alors quelle a deux fois
lâge de lhéroïne. Elle se fait attendre, refuse,
cabotine, il persiste, elle acceptera.
Fascination et séduction réciproques alimentent cette relation
qui, au fil des années, se teinte damertume pour mieux
senflammer. Au cours des ans, Stella Campbell perdra de sa superbe
et, manquant dargent, voudra vendre la correspondance du dramaturge.
Il refusera pensant que son image en pâtirait.
Dans cette pièce de théâtre, beaucoup damour,
de tendresse et parfois, la colère, un ton féroce mais toujours
jubilatoire, la dérision et la causticité moqueuse de Stella
face à lesprit goguenard du « clown Joey »
comme elle le surnommait.
Devant nous, la subtile Francine Bergé, sensible et juste, nous
émeut toute en élégance, changeant de costumes au gré
des période de sa vie. Elle se joue du bon bougre de Bernard Shaw
interprété par un Marcel Maréchal malicieux au possible,
trébuchant parfois sur les mots mais son regard espiègle et
son humanité lexcusent pour ces imprécisions.
Il faut prendre le temps de glisser dans les interstices dune telle
intimité comme si le spectateur était un voyeur, dabord
en retrait, qui oserait petit à petit sinfiltrer dans leur relation
et sabsorberait de leur épanchements verbaux pour fusionner
avec eux.
La séduction sopère au fil de la pièce et nous
serons vraiment touchés quand, au final, Stella, au crépuscule
de sa vie, dans un magnifique abandon, ôtera sa perruque blonde toute
bouclée pour laisser éclater sa chevelure courte argentée.
Un superbe geste pour saluer une vie fabuleuse qui sachève.
Cat.S / Theothea.com, le 23/10/12
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LA ROSE TATOUEE
de
Tennessee Williams
mise en scène Benoît Lavigne
|
****
Théâtre de l'Atelier
Tel: 01 46 06 49 24
|
|
photo
© Emmanuel Robert Espalieu conception graphique: Kevin
Boyer
|
En dirigeant 13 comédiens sur la scène du Théâtre
de lAtelier, il fallait avoir le goût du défi et apparemment,
Benoît Lavigne nen est pas dénué.
Deux couples séparés par une génération vont
se partager lempathie du public: Serafina & Alvaro ainsi que Rosa
& Jack. Lune est couturière et mère de la seconde,
celui-ci marin alors que celui-là est camionneur.
Avec Tennessee Williams comme on le sait, les rencontres passionnelles
ne sont jamais très éloignées de la chaleur moite de
la Nouvelle-Orléans.
Aussi, avec de surcroît du sang sicilien, la flamme risque
dêtre volcanique et comme Cristiana Reali est habituée
à camper ce genre de passionaria exubérante, cest avec
délectation que sont attendues ces scènes danthologie
sensuelle dans laquelle la belle apparaît toujours avec la fougue
dune Carmencita.
Et puis, comme ladage telle mère, telle fille doit
forcément être respecté, lapparition de
Léopoldine Serre savère aussi cohérente que
révélatrice de son jeune talent, plein dexaltation et
de pétulance à ravir son joyeux partenaire, le sympathique
Martin Loizillon.
Bref, tout serait pour le mieux dans le meilleur des mondes amoureux,
si le mari de Serafina et donc père de Rosa nétait pas
le réel catalyseur de lamour familial originel qui régnait
entre eux trois et cest donc, parce que celui-ci va être
assassiné, que les cartes de la libido vont être redistribuées
après le temps du deuil.
Faisant jouer la drôlerie, la dérision et
lespièglerie en contre-emploi de la colère feinte et
autres fulminations décalées, la veuve va mener, tant bien
que mal, son monde à sa main, en tentant, notamment, dimposer
à sa fille un comportement vertueux forcément hors
datteinte.
Les huit autres comédiens assurent, autour des deux duos amoureux,
une présence chorale aussi surréaliste que lhistoire
elle-même, en incitant les quatre partenaires à composer, au
mieux, avec la fantasmagorie.
Fortuitement, une rose tatouée sur le sein de Sefarina lui
apparaîtra en des circonstances quasi miraculeuses et cest sans
doute, à ces signes du ciel bien interprétés, que devraient
se soumettre la destinée de lAmour.
Oui; à lévidence, Cristiana Reali a vraiment quelque
chose de Tennessee, il sappelle Rasha Bukvic.
Theothea le 16/10/12
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LE GROS, LA VACHE ET LE
MAINATE
de
Pierre
Guillois
mise en scène
Bernard Menez
|
****
Théâtre Comédia
Tel: 01 42 38 22 22
|
Après avoir résidé au
Rond-Point en début
2012, voici que le trio improbable, le fameux gros accompagné dune
vache et dun mainate sinstalle au Comedia jusquaux fêtes
de fin dannée.
A la surprise près, lengouement est intact, tant le jeu des
comédiens est surréaliste, cest-à-dire tout à
la fois poétique et totalement transgressif.
Dailleurs, même si le mainate ne senvole plus devant
la salle ébaubie, son absence fait place à une simulation
parodique, tellement raccord avec lhallucination collective, que le
délire de Jean-Paul Muel apparait toujours plus vrai que nature.
Avec son comparse Pierre Vial, le duo nen finit jamais de pousser
le bébé encore plus loin au-delà du politiquement correct
mais les rails tracés par lauteur-metteur en scène Pierre
Guillois sont tellement bien balisées que toute la troupe évolue
sur un nuage inaccessible à la moindre polémique.
Spectacle culte, sil en fut, emmené par un Monsieur Loyal
déguisé en Bernard Menez, cette opérette barge a tout
dune grande fable outrancière bien quinénarrable
sur la destinée humaine.
Theothea le 14/10/12
Au Théâtre du Rond-Point en février
2012 :
"Le Gros, la Vache et le Mainate " Tout simplement cultissime
!
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LES DERNIERS JOURS DE STEFAN
ZWEIG
de
Laurent Seksik
mise en scène
Gérard Gélas
|
****
Théâtre Antoine
Tel: 01 42 08 77 71
|
Poursuivis dans leur exil au Brésil par les fantômes des
nazis développant toujours davantage leur emprise destructrice sur
le monde, Stefan et Lotte ont trouvé refuge à Petropolis, en
cette année 1942, dans un appartement en location temporaire.
Lors de ces derniers jours quil leur reste à vivre, le roman
et la pièce de Laurent Seksik se rejoignent en un tableau de clinique
psychiatrique où la non assistance en personnes en danger serait imputable
à la fuite épuisante du repliement sur soi
celui de Stefan
décourageant tout contact avec autrui.
En effet, quelles que soient les tentatives de Lotte pour lui transmettre
son désir de vivre leur passion amoureuse sans laisser prise à
langoisse existentielle les taraudant jusque dans leurs retranchements,
tout va se passer comme si la mauvaise conscience du réfugié
politique les harcelait à linstar de lil pourchassant
Caïn jusque dans lobscurité de la tombe où celui-ci
sétait retranché.
Cest, bel et bien, la dépression qui travaille le corps et
lesprit de Stefan Zweig qui, au vu des informations internationales,
réussissant à parvenir jusquà eux, abandonne peu
à peu lidée que le cours des évènements
puisse se renverser en son contraire.
Lacuité exigeante de son analyse géopolitique a même
fixé, précisément, que lorsque Singapour tomberait sous
lavancée allemande, le signal de la phase finale irréversible
serait atteint.
Lécrivain est donc, désormais, déterminé
à en finir avec cet ersatz de bonheur à deux, impossible à
partager sous les calamités du bannissement mondial.
Lotte qui, tout en étant fragilisée par ses crises
dasthme, respire profondément la joie de vivre, est
effondrée par cette perspective ultime et se résoudra, dans
un premier temps, à fuir le lieu du drame à venir.
Cest, sous la vigilance bienveillante de Gérard Gélas,
quElsa Zylberstein et Patrick Timsit habitent ces deux rôles
romantiques à souhait, en incarnant limpossibilité psychique
du bonheur individuel lorsque celui-ci est confronté au concept de
désolation universelle.
Lui, taiseux et soucieux, elle, enjouée et volubile, semblent
lancés sur une trajectoire perdue davance car la lutte menée,
en tâche de fond à leur insu, entre les pulsions de vie et les
pulsions de mort, est un combat symbolique dont-ils ne possèdent,
ni lun ni lautre, les clefs de léventuelle
distanciation.
A apprécier avec lâme dune tragédie
grecque.
Theothea le 15/10/12
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