Magazine du Spectacle vivant ...

   

 

   

Les    Chroniques   de

  

18ème  Saison     Chroniques   18.076   à   18.080    Page  341

 

         

 

             

photo © Theothea.com

       

                      

   

             

                photo © Theothea.com

       

                      

     

66ème Festival de Cannes 2013

La Croisette 2013

   

Les Molières 2014

en perspective

   

R E V I V A L

Wight ! + 40 années après

     

Toutes nos  critiques   2013 - 2014

Les Chroniques de   Theothea.com   sur    

   

THEA BLOGS                    Recherche   par mots-clé                    THEA BLOGS          

COMME UN ARBRE PENCHE

de Lilian LLoyd

mise en scène Jean-Luc Tardieu

****

Théâtre La Bruyère

Tel   01 48 74 76 99

                    

           photo ©  LOT

               

Un titre intrigant, un texte écrit sous l’impulsion initiale de Michel Leeb, un cycle de plusieurs années pour parvenir à monter ce projet théâtral, un acteur emblématique et enfin un metteur en scène expérimenté prêt à relever le défi de diriger cette quête à rebours d’une amitié perdue au nom de l’Amour… et puis cet accident de la vie qui réunit davantage qu’il ne sépare !

Bref, de multiples éléments qui mettent l’eau à la bouche de ceux qui savent lire entre les lignes en ayant l’intuition de dénicher la perle théâtrale de l’année ! En effet, cet arbre penché avait tout d’un grand moment annoncé au-delà du ronronnement scénographique bruissant des chevaux attelés aux succès garantis !

Oui, mais voilà, le pressentiment, aussi fondé soit-il, peut aussi laisser place à l’immense déception de n’avoir vraiment pas adhéré à la représentation virevoltante d’un personnage gesticulant et soliloquant quatre-vingt minutes durant devant son ex-ami en « loocked-in syndrom ».

Réduit quasiment à l’état végétatif, ce dernier n’aura d’autre échappatoire que d’apparaître exclusivement dos au public; en pratique seule sa surface capillaire sera perceptible de la salle !

Mais tout ceci n’aurait guère d’importance, puisque le fond de l’affaire ne serait que pure amitié retrouvée après douze ans de fâcherie à la suite d’une rivalité amoureuse focalisée sur une certaine Claire. Le temps des retrouvailles ayant enfin sonné, en raison d’un accident avec tétraplégie à la clef, c’est donc aux sources de l’amitié que les véritables valeurs humaines devraient être retrouvées.

A ceci près que le ton de la direction d’acteurs et de l’interprétation balayent toute considération de dignité et de comportement à la hauteur d’un tel enjeu, en préférant la transgression bassement comique de façon à divertir, divertir et encore divertir !

Ce n’est d’ailleurs pas tant ce point de vue de mise en scène, tout à fait légitime par ailleurs, que nous stigmatisons mais plutôt l’impression générale de se sentir happé par une farce au goût fort douteux où un acteur peut jouer le rôle d’un handicapé à 100% durant l’entière représentation sans que le public ait conscience de son incarnation physique car celle-ci n’aurait d’autre objectif que de satisfaire au contrechamp type « cinématographique » nécessaire au confort ludique de son partenaire… en boucle orale sur lui-même !…

Cette transgression implicite des codes du spectacle vivant nous est, pour le moins, apparue problématique en soi ! Cependant à chacun d’apprécier cette posture de scénographie in-existentielle… à décoder au mieux disant logorrhéique !

Theothea le 29/01/13                      

     

             CriTweet Theothea.com

         

LES UNS SUR LES AUTRES

de Léonore Confino

mise en scène  Catherine Schaub

****

Théâtre de La Madeleine

Tel   01 42 65 07 09

                    

           photo © Bernard Richebé  

         

De « Building » à « Les uns sur les autres » en passant par « Ring », l’écriture de Léonore Confino s’intéresse au domaine sociétal en lui rendant sa part d’humanité toujours si proche de la vulnérabilité et du vacillement.

Qu’une famille « tuyau de poêle » se donne en objet d’observation selon une coupe transversale et voilà que les rôles stéréotypés de père, mère, fils et soeur se projettent autour de la table familiale dans un chaos dont personne ne détient les clefs.

Et pourtant, branchés aux données numériques permettant de résoudre n’importe quelle problématique issue des nouvelles technologies, les deux ados rivalisent en coups pendables censés maintenir l’attention des adultes bien au-delà du seuil de bienveillance.

Par ailleurs, s’ajoutant au modus vivendi farfelu de cette maisonnée à trois niveaux, la présence incontrôlable du grand-père (Pierre Vial) handicapé corse, à elle seule, l’autonomie de chacun.

Toutefois rien ne semble pouvoir suspendre, ne serait-ce qu’un instant, l’anorexie transparente de l’une (Marie Petiot), les expérimentations sauvages de l’autre (Benjamin Witt), le courant d’air à trace continue laissé par le pater familias (Olivier Faliez) absent pour réunionite au CNRS, si ce n’est l’appel à l’aide, proféré en cycles quotidiens par la mère des batailles : « A table » !…

A l’image de l’affiche du spectacle, c’est donc bel et bien un véritable sac de nœuds qui maintient l’osmose de cette famille lambda, forcément dépositaire d’un lourd secret paralysant, au plus profond du patrimoine génétique commun, son flux vital et affectif par un ensemble de comportements aberrants et destructifs.

Cependant, la lumière sera au bout du tunnel inconscient; il suffira qu’un pion du maelström sorte du jeu pour qu’une lettre testamentaire éclaire d’un jour nouveau le blocage ancestral et qu’ainsi les pendules de la destinée se mettent de nouveau en phase avec la cohérence familiale.

Agnès Jaoui est en quelque sorte le métronome de cette fable scénographique où la truculence se disputerait aisément avec Les Groseille de service, si seulement la vie pouvait être un long fleuve tranquille !…

Theothea le 30/01/14

ROMEO ET JULIETTE

de  William Shakespeare 

mise en scène  Nicolas Briançon 

****

Théâtre  de la Porte Saint-Martin

Tel   01 42 08 00 32

                    

           photo © ARTCOMART  Victor Tonelli   

   

Après « La nuit des Rois » au Comedia et « Le songe d’une nuit d’été » déjà à La Porte Saint- Martin, c’est comme en point d’orgue d’une trilogie shakespearienne que Nicolas Briançon a mis en scène son « Roméo et Juliette » à la manière du 7ème Art revisité tel « Le Parrain » d’Hollywood sur scène !

Ambiance Mafiosi pour les Capulet - Montaigu, Romantisme branché West Side concernant les deux tourtereaux ainsi qu’orchestre tzigane en toile de fond pour cette aventure haletante sans cesse réitérée, c’est donc en dominante noir et blanc que le modernisme classieux va s’affronter aux atavismes amoureux contrariés, par nature… forcément éternelle !

Lui, Niels Schneider, elle, Ana Girardot vont se livrer au baptême du feu, celui de l’Amour Passion que rien n’arrête, pas même le caractère aléatoire de la destinée faisant basculer l’imbroglio familial dans le tourbillon dramatique alors qu’un simple grain de sable aurait fort bien pu en décider autrement ! Toutefois alea jacta est !…

Au sein d’un décor neutralisé au gris feutré, des volets latéraux glissent en fondu enchaîné, des cloisons s’avancent et reculent en profondeur de champ, un lit baladeur circule en va-et-vient telle une mise au point relative entre « balcon » transgressif, « couche » nuptiale et « cercueil » symbolique; ainsi tous ces éléments de langage scénographique concourent à incarner la boîte magique, cet assemblage de poupées russes se fédérant en caméra scrutatrice interne comme si l’oeil était dans la tombe et regardait Roméo et Juliette !…

En effet, écrite d’avance, cette histoire nous remue au plus profond de nous-mêmes car Shakespeare a su la rendre métaphorique par le lyrisme de sa langue et, à tout seigneur tout honneur, Nicolas Briançon, lui, a le talent et l’humilité d’en tirer profit spectaculaire et sensible !

Elégant, allégorique et emblématique comme le fameux bal dansant, c’est-à-dire celui de toutes les rencontres, le flux tendu entre Amour absolu et forces antagonistes autant qu’archaïques, flirte néanmoins avec les compromis de la diplomatie toujours prête à sauver les apparences.

C’est notamment Valérie Mairesse qui, ici, est en charge de prendre sur elle pour attirer les foudres du ressentiment mêlé au ridicule qui pourrait ne pas tuer ! C’est aussi Bernard Malaka qui tente désespérément, en dernier ressort, ces coups de dés, hésitant entre fatalité et espoir infini.

Bref, un spectacle magnifique, élevant « haut les cœurs » et où chacun, paradoxalement, sort gagnant du réalisme exacerbé… après avoir été la proie des rivalités adverses !

Theothea le 02/02/14

EDITH S.

de Maryse Wolinski

mise en scène Marylin Alasset

****

Théâtre  Dejazet 

Tel   01 48 87 52 55

                    

           visuel affiche

       

Si la destinée devait se construire dans l’entendement, il est certain que les déterminations successives d’Edith Stein illustreraient un parcours de vie que l’adversité aurait forgé à coups de renoncements, d’adaptations et même de revirements !

En superposant le visage de Sœur Thérèse-Bénédicte de la Croix tout en le décalant, par élévation, de celui de la comédienne Géraldine Danon, le navigateur et, néanmoins, portraitiste Titouan Lamazou, en l’occurrence ici affichiste, exprime avec grâce la douce schizophrénie théâtrale qui consisterait à habiter un personnage tout en laissant celui-ci planer au-dessus de nos têtes, c’est-à-dire celle du public en général et celui de l’interprète en particulier.

Pas d’échappatoire en effet, sur la scène du Théâtre Dejazet, Edith et Géraldine ne forment qu’une seule et même personne, alors qu’autour d’elle d’autres s’affairent à essayer de lui faire changer de cap, d’opinion et même de principe de vie.

Reprenons donc le cours de cette histoire sainte scénographiée par Maryse Wolinski:

Juive pratiquante par origine familiale, voici un premier pas de côté à l’adolescence rebelle en devenant athée convaincue; puis la Philosophie ayant pris le pas du fil conducteur de sa vie, Edith S. devra renoncer à l’enseignement supérieur en raison de l’activisme

nazi et faire, en parallèle, un nouveau saut de côté en se convertissant au catholicisme.

Par la suite, sous la pression persistante de la censure professionnelle, c’est une étape encore plus radicale qui l’entraînera à briguer le Carmel, comme point culminant de l’ascèse.

C’est alors paradoxalement en tant que carmélite, que Sœur Thérèse-Bénédicte renouera avec son peuple d’origine, en une osmose transcendée des deux religions, Juive & Chrétienne.

Déportée et gazée à Auschwitz, Edith S. sera finalement canonisée en 98 et sanctifiée en 99 par Jean-Paul II.

Sur les planches du Dejazet, Géraldine Danon semble comme en lévitation dans ce rôle qu’elle incarne avec une conviction profonde transparaissant en permanence dans le regard qu’elle porte sur son environnement contingent, ses partenaires et, sans aucun doute, sur les spectateurs fascinés par tant de déterminisme irradiant.

Theothea le 04/02/14

   

                          

             CriTweet Theothea.com

         

LES FAUSSES CONFIDENCES

de Marivaux

mise en scène Luc Bondy

****

Théâtre de L'Odéon

Tel  01 44 85 40 40 

                    

           photo ©  Pascal Victor 

       

Après 15 jours de représentations, cette création de Luc Bondy, nouveau directeur de l’Odéon, est sans aucun doute, sortie de sa période de rodage et de mise en place définitive de réalisation.

Aussi pour l’apprécier à sa juste mesure, deux options s’ouvrent à notre analyse : La première consisterait à s’appuyer sur le texte de Marivaux et les notes d’intentions du metteur en scène.

La seconde pourrait être de se référer exclusivement à nos observations et impressions durant les deux heures un quart de spectacle.

Une synthèse de ces deux points de vue pourrait être envisagée à la lumière des critiques déjà parues.

A vrai dire, ce canevas d’approche pourrait fort bien s’appliquer à chaque compte-rendu théâtral mais s’il nous tente d’y recourir ici, c’est qu’il nous semble y avoir grand écart entre les deux options initiales citées plus haut.

En effet, point de doute, « Les fausses confidences » est un chef d’œuvre littéraire de diplomatie, de subtilités et de décalage permanent entre le but poursuivi, l’Amour et les résultats contradictoires obtenus. Que Luc Bondy ait une pleine conscience de cette richesse à exploiter sur scène est également une évidence à la lecture de ses intentions.

Certes, mais voilà, le parti pris de direction des acteurs ne cessera de surprendre…. à la grande satisfaction ou non des observateurs critiques.

De manière générale, le jeu est nerveux, saccadé entraînant des comportements déphasés voire quasiment à contre-pied. Tout se passe, comme si les comédiens étaient en situation enivrée de happening où tout peut arriver à chaque instant … alors que, bien entendu, aucun des gestes, aucun des déplacements, aucune de leurs intonations ne sont laissés au hasard.

Bref, une mise en scène calculée, millimétrée, et même sophistiquée suscitant en son for intérieur comme un écho d’avant-garde branchée…. mais aussi comme une étrange impression d’abandonner, à tort ou à raison, l’idéologie traditionnelle du Marivaudage à chaque virage effectué en dérapage contrôlé.

Ainsi chahuté dans sa perception immédiate, le spectateur a le choix de se laisser happer par les circonvolutions des comédiens esquissant la transe des sentiments débridés au prorata des confidences jetées en pâture.

Au hit-parade de ces tours de piste, Bulle Ogier remporte haut la main le trophée de l’hilarité consensuelle. En Arlequin fantasque, Jean-Damien Barbin tire à merveille son épingle de ce jeu délibérément loufoque.

Tous sont au diapason d’une perpétuelle redistribution des cartes du Tendre, à vitesse accélérée d’un film faussement muet, tellement on y parle argent avec le non-dit de l’Amour.

Alors bien sûr, il y a sur la scène en losange s’avançant dans les premiers rangs de l’orchestre, la star, l’unique… tellement habituée depuis des années au plateau de l’Odéon, celle qui par son incomparable présence se moule a volo dans les directives de son metteur en scène du moment, tout en maintenant son superbe mystère : Isabelle Huppert !

Et pourtant, par quel curieux stratagème de l’inconscient a-t-on la sensation de voir Blanche-Araminte, ressuscitée du « Tramway » nous revenir en boomerang hystérisé d’un au-delà du plaisir exacerbé, en réplique à Dorante (Louis Garrel) ?

Si telle devait être la problématique de l’Amour dans son droit de suite, ce serait en priorité celle des spectateurs affichant « complet » durant deux mois à l’Odéon !

C’est d’ailleurs bien, dans cette perspective, qu’il faudrait lire l’ensemble des critiques parues depuis la Première, car l’immense majorité est prête à valoriser la mise en scène de Luc Bondy, pourvu que celle-ci permette de jouer, de tout son saoul, avec La Star.

Theothea le 05/02/14

       

          photo ©  Pascal Victor 

         

Recherche   par mots-clé