Magazine du Spectacle vivant ...

   

 

   

Les    Chroniques    de

  

12ème  Saison     Chroniques   12.41   à   12.45    Page  198

 

       

JEAN MICHEL JARRE  -  OXYGENE  LIVE

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LA MEGERE APPRIVOISEE

de  William Shakespeare

mise en scène  Oskaras Korsunovas

****

Comédie Française

Tel: 08 25 10 16 80

  

       dessin  ©  Cat.S 

     

En confiant à Oskaras Korsunovas le soin de faire découvrir quelques sens cachés de "La mégère apprivoisée", Muriel Mayette, le nouvel administrateur de la Comédie-Française, inscrit le dramaturge à son fronton institutionnel pour une remise en perspective philosophique du spectacle vivant:

C'est parce que "La vie est un théâtre" que celle-ci doit être théâtralisée au point de devenir "supra réelle" avec l'objectif de faire émerger l'autonomie du désir.

Evoluant ici sous une scénographie à trois niveaux depuis l'enfer jusqu'au ciel transitant par la vie elle-même, c'est l'amour qui sera l'enjeu garantissant la liberté du choix d'autrui.

En effet flanqués de "boucliers-costumes", les protagonistes du psychodrame shakespearien apparaissent tels des sujets doutant du bien-fondé de leur image.

A l'instar de toréadors jonglant avec la cape et l'épée, réunies en une seule arme synthétisée en miroir dont le verso ferait apparaître les atours distinctifs de chaque rôle, ceux-là s'agitent dans l'arène en combattant un ennemi invisible qui pourrait bien n'être que leur alter-ego.

C'est en parvenant à se distancier des oripeaux de l'égocentrisme que Catharina (Françoise Gillard) et Petruchio (Loïc Corbery) vont pouvoir à terme se débarrasser de cette prothèse défensive devenue inutile, mettant ainsi à mal tout le formatage socioculturel.

A contre-pied d'un machisme réducteur où dominant et dominée signeraient au final un pacte conjugal de non agression, l'attirance des deux amants rendraient compte a contrario d'une réalité transcendée par l'acte théâtral au bénéfice d'une révélation de leur complémentarité.

Ce point de vue réformiste sur "La Mégère apprivoisée" dérange quelque peu la pensée critique, mais possède la vertu sui generis d'ouvrir l'interprétation du jeu dramatique au vaste champ du dédoublement d'identité entre subjectivité et objectivité.

Au demeurant, la mise en scène spectaculaire offre à la vingtaine de comédiens sur le plateau, l'opportunité d'une palette de savoir-faire chorégraphiques époustouflants dont les talents respectifs assument à merveille le renouvellement de générations au sein de la troupe du Français.

Theothea le 04/01/08

LE BLEU DU CIEL

de  Sade, Bataille & Guerre

mise en scène  Claude Guerre

****

Maison de la Poèsie

Tel: 01 44 54 53 00

  

    Photo LD.  

Que l'on ne s'y trompe pas, Anne Alvaro est un astre solaire autour duquel chaque planète prendrait plaisir à effectuer des circonvolutions, tant le timbre de sa voix unique entre tous, cristallise l'attention ici et maintenant en même temps qu'elle plonge son auditoire dans un ailleurs indicible.

Aussi que Claude Guerre, le récent directeur de la Maison de la Poésie depuis 2006 ait choisi cette comédienne pour constituer le souffle de ses deux mises en scène dans le cadre d'une programmation thématique de six spectacles, intitulée " Un hiver amoureux ", ne pourra que conforter les liens d'héritage que celui-ci veut célébrer de Sade à Sophie Loizeau en passant par Georges Bataille et Bernard Noël.

Introduisant le cycle avec " Le bleu du ciel ", spectacle qu'il fait débuter par un extrait de " Les 120 journées de Sodome ", Claude Guerre apparaît du fond de scène tel un magicien envoûteur qui répandrait sur le sol une semence bleue de manière circulaire pour transformer peu à peu celle-ci en rayons solaires jaune et rouge devant le parterre du public entourant au plus près l'oeuvre picturale sur laquelle Anne Alvaro et Julie Pouillon vont entretenir une psalmodie chorégraphique faisant dialoguer deux séries de sept textes signés Georges Bataille et Bernard Noel.

Se livrant corps et âme au ballet des mots érotiques, les deux comédiennes tiennent précisément la distance grâce à leurs voix qui s'épousent dans un contraste captivant leurs regards plongés l'un dans l'autre pour en faire résonner du grave au déchirant, le chant sulfureux de la libido.

Rien ne saurait arrêter la mécanique de la volupté dans son désir de transgresser les tabous, si ce n'est la tentation latente d'assimiler le féminin au masculin en une aberration surréaliste.

Mais l'hiver ne fait que commencer et c'est sans doute pourquoi " Le plus clair du temps je suis nue " répondra en écho la trompette de David Lescot à l'ensorcellement d'Anne Alvaro dans le second spectacle de Claude Guerre à suivre donc en aparté.

Theothea le 11/01/08

L'HÔTEL DU LIBRE ECHANGE

de  Georges Feydeau

mise en scène  Alain Françon

***

Théâtre de la Colline

Tel: 01 44 62 52 52  

  

    Photo ©  ArtComArt / Pascal Victor

Durant deux mois pour la bonne cause, Alain Françon le directeur du théâtre de la Colline a décidé de transformer son outil de travail en hôtel de passe.

De toutes évidences, le nombre de clients va y saturer le taux de fréquentation car le bouche à oreille durant les fêtes de fin d'année a su amorcer la pompe aspirante au rire le plus dévastateur, celui bien entendu de Georges Feydeau qui excelle à mettre tous ses personnages dans de beaux draps.

Des Paillardin aux Pinglet sous le regard caustique des femmes de chambre et autre maître d'hôtel, c'est une immense chaîne de quiproquos relayés par les proches des deux familles qui vont déménager leur libido en déficit, le temps d'une sauterie improbable avec des esprits farceurs.

C'est à l'éclairage de bougies blafardes que tout ce beau monde va se retrouver pris au piège du libre-échange pour ne pas dire d'un échangisme échevelé dont la connotation aurait été trop actualisée.

Au centre de la toile, il y a Clovis Cornillac qui donne le ton à la fois appliqué et volontariste d'une troupe bien décidée à respecter scrupuleusement les consignes méthodologiques de la direction d'acteurs.

Ce mélange détonant de réalisme assumé sous contrôle d'une discipline imposée par la mécanique intransigeante de l'auteur culte, aboutit sur les planches du théâtre subventionné à une remarquable montée en puissance libératoire où chaque spectateur va lâcher les rênes du quant à soi, quand bon lui semblera.

Ainsi ce pacte tacite du " libre échange " entre la scène et la salle a la faculté de combler tout fossé analytique entre une vision sociopolitique des moeurs conjugaux au tournant des XIXème et XXème siècles face au décalage comique que l'ensemble des comédiens réussit à susciter en s'appliquant au mieux à incarner les conditions du désastre affectif et sexuel inhérent.

En l'absence délibérée de numéros d'acteurs prévalants, le tour de force jubilatoire consistera donc à exposer les rouages de la machinerie du Vaudeville pour en faire imploser la combinatoire hilarante des frustrations implicitement engendrées.

A la Colline, c'était quelque peu osé et cependant ses abonnés en redemandent.

Theothea le 14/01/08

DETAILS

de  Lars Norén

mise en scène  Jean-Louis Martinelli

****

Théâtre des Amandiers

Tel: 01 46 14 70 00

  

    Photo ©  Pascal Victor 

Lorsque " Détails " fut créé à Stokcholm dans une mise en scène de Bilie August en 2002, Jean-Louis Martinelli prenait lui, la direction du Théâtre des Amandiers où il allait reprendre d'emblée " Catégorie 3:1 " de Lars Noren qu'il avait déjà mis en scène au TNS en 2000.

Telle une tragédie des sociétés contemporaines, ce théâtre sociologique avait suscité des analyses globales et polémiques qui viennent ici en quelque sorte trouver leur contrepartie psychologique dans la mise en perspective apparemment plus intimiste de " Détails ".

En effet cette pièce, qui pourrait se concevoir comme une chronique de deux couples qui se croisent sur une période d'une quinzaine d'année entre Florence, New York, Stockholm et Tel Aviv, poursuit, façon puzzle chronologique, les tribulations conjugales cyclothymiques de jeunes gens en proie au déficit de sens que semble prendre l'existence moderne alors que la filiation pourrait avoir la charge passionnelle et duelle d'en combler symboliquement la vacuité.

Cependant sur fond de densité culturelle à porter au crédit d'une créativité en recherche constante et par ailleurs de fléaux type Sida à assumer stoïquement au coeur de la menace mortifère, ces êtres tentent la reconstruction d'une subjectivité existentielle dans laquelle le concept d'identité se pose en question essentielle au sein d'une sexualité confuse.

Tous les détails d'un vécu au quotidien relatés comme un " presque rien soi-disant insignifiant " mais dont la psychanalyse freudienne a su mettre en valeur la portée symbolique, constituent la trame d'un récit séquentiel autobiographique d'un auteur qui a approché au plus près dans sa jeunesse, les implications sociétales de la schizophrénie.

Portés par des acteurs majeurs, les rôles d'Ann (Mariane Basler) et d'Erik (Stéphane Freiss), d'Emma (Sophie Rodriguez) et de Stefan (Eric Caruso) se renvoient la balle d'un jeu de société où il semblerait qu'à chaque instant l'un pourrait se substituer à l'autre, tant par empathie qu'en raison d'une indifférence notoire.

La scénographie de Gilles Taschet, fidèle à Martinelli depuis 2000, construit un vaste espace mental occupant toute la largeur de la scène où extériorité et intériorité se délimitent sur deux niveaux de hauteur et de retrait, en séparant le cas échéant les deux entités par une verrière verticalement coulissante.

Cosy ou stressée, l'atmosphère ainsi suscitée va déteindre sur les attitudes comportementales au point de sembler abandonner les protagonistes dans un vide sidéral, les abandonnant aux affres d'une destinée sans objectif défini mais en leur laissant néanmoins la liberté de se référer à la vertu psychique structurante de toute prise de conscience.

Theothea le 16/01/08

l' OPERETTE

de  Valère Novarina

mise en scène    Marie Ballet & Jean Bellorini

****

Théâtre de la Cité Internationale

Tel: 01 43 13 50 50

  

    Photo © Nathan Martin  

La compagnie Air de Lune fondée en 2000 par Marie Ballet et Jean Bellorini autour d'une vingtaine de comédiens issus de l'école Claude Mathieu, pourrait constituer pour qui la découvre ces jours-ci à la Cité Internationale dans "L'Opérette", une révélation tant attendue d'un spectacle vivant qui saurait faire surgir le talent collectif hors de personnalités oeuvrant à l'unisson.

Sélectionnée à deux reprises au Festival "Enfants de troupes" parrainé par Ariane Mnouchkine au théâtre du Soleil en 2003 & 2004, le projet artistique assumé est de vouloir "célébrer dans le délire, les noces de la musique et du théâtre".

Sur la scène de la Coupole, les huit jeunes comédiens incarnant des rôles aux intitulés aussi baroques que La femme Pantagonique (Boutaïna El Fekkak), Le Galoupe (Karyll Elgrichi), L'ouvrier Ouiceps devenant l'infini Romancier (Matthieu Fayette), le E muet devenant le Valet de Carreau (Jean-Christophe Folly), le Mortel (Geoffroy Rondeau), L'Acteur fuyant autrui (Jérémie Sonntag), La Dame autocéphale (Camille Voitellier) ainsi qu'Anastasie (Aurélie Cohen) vont en cent minutes parcourir "l'Opérette imaginaire" de Valère Novarina pour en extraire le suc du prologue associé à l'acte 3.

En conducteur du langage musical déjanté, un quatuor composé par une soprano accordéoniste (Amélie Porteu de la Morandière), une alto violoniste (Céline Ottria), un ténor percussionniste (Romain Quichaud) et une contrebasse (Marc Bollengier) assure ce mariage détonnant entre des chants liturgiques et la profération du texte de Valère Novarina.

Au rendez-vous des ces instants privilégiés, se succèdent comme par magie harmonique, l'Alléluia du Messie de Haendel, l'Ave Verum de Mozart, l'Ave Maria de Gounod, l'Ave Maria de Schubert au sein de quelques créations originales où la musique en accord avec le texte sublime l'émotion.

Dans sa métaphore du désir, la logorrhée de Novarina n'aurait que les apparences de l'absurdité parce qu'elle tire toutes les conséquences d'une raison humaine finissant par se perdre aux limites de sa propre compétence.

Sa sémantique provoque ainsi une impression d'étrangeté: "On ne comprend rien, et pourtant on comprend tout".

Surfant sur ce paradoxe jubilatoire, le chef d'orchestre (Jean Bellorini) entraîne sa compagnie sur des registres fantasmagoriques où l'intuition acoustique en rythme la syntaxe allégorique afin que langue et musique puissent y correspondre en choeur au-delà de toutes contingences.

Theothea le 17/01/08

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