Magazine du Spectacle vivant ...

   

 

   

Les    Chroniques    de

  

12ème  Saison     Chroniques   12.66   à   12.70    Page  203

 

         

  Les  MOLIERES  2008 

Les Nominations

Point de vue

     

Shine a Light à l'Olympia

         

Sylvie Vartan  au Palais de l'apothéose

      

Entre   "Balé de Rua" et "Délirium",

Nicole Croisille, Isabelle Georges
& Maria de Medeiros
              
60ème Festival de Cannes

A la recherche d'un soixantième anniversaire... à fleur d'écran

       

Toutes nos  critiques   2007 - 2008

Les Chroniques de   Theothea.com   sur    

   

THEA BLOGS                    Recherche   par mots-clé                    THEA BLOGS      

UNE SOURIS VERTE

de  Douglas Carter Beane

mise en scène  Jean-Luc Revol

****

Théâtre Tristan Bernard

Tel: 01 45 22 08 40

  

        Visuel Presse LD.  

   

Voici que Diane, Mitchell, Helen & Alex entrent sur la piste d'une comédie sociétale afin de brocarder joyeusement l'image emblématique du cinéma hollywoodien, en osant fustiger les compromis stratégiques qui inventent, de toutes pièces, des carrières artistiques bien lisses et donc "vendables" au grand public américain et international.

En grand manitou des manettes qui agitent les marionnettes en coulisses, il y a Jean-Luc Revol qui organise le chassé-croisé permanent entre les quatre protagonistes au coeur d'une scénographie (Sophie Jacob) tournant en boucle à la manière d'une pellicule en folie.

Outre-Atlantique, il y a l'auteur Douglas Carter Beane qui entend renvoyer dos-à-dos Los Angeles et New York, capitales respectives du Cinéma et du Théâtre, dans les replis de leurs arrogances réciproques.

En France, Jean-Marie Besset va s'employer à une adaptation nerveuse et pertinente qui décocherait les rires au mieux des clichés de vie snobinarde ou marginale reflétant les travers des destinées médiatiques.

Et puis pour le régal des spectateurs du Tristan Bernard, il y aura les comédiens qui s'adonnent à des rôles de composition savoureuse tant la caricature semble s'approcher au plus près des moeurs et coutumes d'un milieu professionnel en proie au vertige du ridicule qui ne tue pas.

En tête et loin devant tout son monde, la grandissime Raphaëline Goupilleau (Diane) donne le "la" des limites qu'il est toujours possible de repousser afin que les apparences soient sauves avec un Business gagnant-gagnant au profit de ceux qui aspirent à en vivre plus que bien.

Il faut dire qu'en attachée de presse qui n'a pas froid aux yeux, elle pourrait être la reine de Big Apple jusqu'à L.A. : En effet Mitchell (Arnaud Binard) son poulain, star en pleine ascension, se devrait d'avoir une bio, sans reproches, bardée d'un mariage hétéro que tous ses fans pourraient envier.

Hélas de l'image d'Epinal à la réalité, de multiples défaillances vont faire obstacle à ce projet mirifique, à commencer par le surgissement d'Alex (Edouard Collin), un petit ami, peu opportun, amenant lui-même dans son sillage, Helen (Julie Debazac), une jeune femme à problèmes fort délicats à résoudre.

C'est ainsi que prétexte à règlements de compte pour empathie contrariée avec l'industrie du cinéma, ce spectacle branché peut plaire à la fois aux aficionados des univers gay et lesbien, à ceux qui fréquentent les professionnels de la profession ainsi qu'aux initiés des mondanités de tout poil mais aussi à tous ceux qui découvrent avec stupeur le dessous des cartes peu reluisantes du show-bizz par delà l'éblouissement des projecteurs.

Bref, tous les publics peuvent s'y retrouver pour une franche rigolade comme à guignol. Assurément, çà fait du bien.

Theothea le 19/03/08

LE BANC

de  Gérald Sibleyras

mise en scène  Christophe Lidon

****

Théâtre Montparnasse

Tel: 01 43 22 77 74

  

        Visuel affiche Ld. presse  

   

Fugueurs en altitude, ces deux-là ont pris villégiature dans un chalet du Tyrol prêté par la production afin de répéter dans d'excellentes conditions le concert à quatre mains qu'ils vont donner prochainement au Japon.

Réfugiés dans cette résidence tels deux complices en cavale, ce séjour devrait leur apporter un grand confort professionnel qui, en fait, va peu à peu se transformer en débâcle privée.

En effet pour un oui, pour un non, la moindre petite phrase détournée de son intention initiale va provoquer une série de susceptibilités réciproques dont la promiscuité pourrait en signer le processus paranoïaque.

A la question " Quel est le principe de fonctionnement pour votre travail en duo ? ", Vladimir Zkorscny aurait répondu dans une interview récente: " Je viens avec les pierres et Paul apporte le ciment ". Il n'en fallait pas plus pour déclencher une réaction en chaîne que désormais plus aucun contre feux ne sera en mesure de stopper, car le doute d'une prise de pouvoir de l'un sur l'autre s'est insinué irrémédiablement.

Plus la phrase semble anodine à l'immédiateté du jugement, plus elle apparaîtra déterminante en sa signification subliminale. Quoi des pierres ou du ciment a le plus de valeur pour ériger une construction ? Qui pourrait le dire, à ceci près que Paul Letellier n'apprécie vraiment pas d'être évalué en tant que " colle à béton " d'autant plus qu'au même moment tous deux semblent être en proie à une même hallucination: Le banc sur lequel ils s'assoient côte à côte pour interpréter leurs partitions au piano ne cesse de rétrécir quasiment à vue d'oeil. Atmosphère !... Atmosphère !... ou espace vital.

Evolution psychanalytique sur déballage de linge sale, les apparences vont se répondre en trompe l'oeil ou l'oreille car, plus futés l'un que l'autre, les deux compères sont passés maîtres à botter en touche d'une partie de ping-pong récurrente.

C'est alors que prend le relais du travail d'acteurs où il pouvait sembler à tort jusque-là que seul Philippe Chevallier disposait d'une réserve de progression et bien, que nenni, Régis Laspalès, sous la direction très efficace de Christophe Lidon, a enfin trouvé le déclic interne qui lui permet à raison, de renvoyer des fulgurances de sensibilité contrariée dépassant même à plusieurs reprises la pertinence de son partenaire.

Qui du maître ou du disciple va l'emporter sur le plan de la créativité artistique ? Cet enjeu constitue bel et bien le thème de la pièce de Gérald Sibleyras, pas nécessairement sans conséquences, car dorénavant, et c'est presque un scoop, les deux acteurs sont en mesure de s'affronter à égalité de jeu.

Theothea le 08/04/08

JEAN-LOUIS TRINTIGNANT

à partir de  Jules Renard & Jean-Michel Ribes

mise en scène  Jean-Louis Trintignant

****

Théâtre du Rond-Point

Tel:  01 44 95 98 21 

  

        Dessin ©  Cat.S  

   

Alignés derrière leurs tables de bistrot respectives sur chacune desquelles sont posés un micro et un verre d'eau, la bande des quatre emmenée par Jean-Louis Trintignant apparaît au lever du rideau tel un quatuor sur la ligne de départ prêt à interpréter sa polyphonie à l'unisson.

En se renvoyant la parole dans un ordre apparemment aléatoire, ces instrumentistes de la phrase ciselée n'auront d'autres armes que le trait d'esprit pour faire rebondir l'attention latente du spectateur en proie à l'ivresse du double sens.

En intégrant la causticité à la tendresse, Jules Renard avait acquis dans l'écriture de son journal intime (1864-1910), cet art de faire mouche mine de rien avec les " bonnes intentions " assassines de ses contemporains.

Ce cocktail insidieux de pensées iconoclastes à leur insu ayant eu le don de ravir ses lectures personnelles depuis longtemps, Jean-Louis Trintignant se délecte sur scène avec un plaisir non dissimulé en distillant à l'égard du public, tout le suc de leur perfide ironie.

Il n'en faut d'ailleurs pas davantage au partenaire d'Anouk Aimée dans " un homme, une femme ", désormais en retraite délibérée des studios de cinéma, pour recouvrer une joie de vivre, suspendue entre théâtre et contemplation.

Cette légèreté de l'âme, forgée dans la transgression du tourment indicible, l'autorise à l'approche de ses quatre-vingt ans de substituer simplement l'accumulation des maux par la jouissance du bon mot: " Un mauvais acteur. Les applaudissements le rendent pire " ou encore " Ma belle-mère est morte le 1er janvier. Pour les fêtes ", voire de l'absurde: " Chez nous, les plafonds étaient si bas qu'on servait la soupe dans des assiettes plates "

Cet humour décapant de Jules Renard associé à quelques facéties de Jean-Michel Ribes, il le partage dans l'amitié avec ses deux complices, Jean-Louis Bérard & Manuel Durand, illuminée par une présence féminine incarnée successivement par Fanny Ardant, Anna Mouglalis, Hélène Fillières, Joëlle Belmonte et actuellement Clémentine Célarié.

Ce dispositif scénique fonctionne comme une boîte à malices où l'instant présent s'investit dans l'art de la séduction toujours renouvelée.

Theothea le 09/04/08

AU REVOIR PARAPLUIE

   

de & mise en scène  James Thierrée

****

Théâtre de la Ville

Tel:  01 42 74 22 77 

  

      Visuel Presse DR.

   

James Thierrée est de retour à Paris!

Il ne serait donc jamais trop tard pour découvrir ce metteur en scène, acrobate, trapéziste, danseur, violoniste... suite à sa révélation en février 2003 au Théâtre de la Ville lors de la création de " La symphonie des hannetons " distinguée par quatre Molières 2006 au terme d'une fabuleuse tournée.

Puis vint " La veillée des Abysses " et dès 2007 " Au revoir Parapluie " comme troisième volet d'une trilogie dédiée à la reconquête d'un imaginaire fantasque ainsi récompensé par un Molière du Théâtre en régions.... vaste programme.

Voici donc en reprise toujours au Théâtre de la Ville pour une quinzaine à guichets fermés, la compagnie du Hanneton emmenée par son fondateur fort de ses trente-trois années d'enfant de la balle catapultant dans les airs et les métamorphoses, Kaori Ito, danseuse fluide et vive; Magnus Jakobsson, acrobate et comédien; Noro, danseuse des airs; Maria Sendow, comédienne et chanteuse envoûtante.

C'est donc le bon moment pour découvrir l'artiste au faîte de son apprentissage car la souplesse du corps peut se perfectionner jusqu'à son optimum mais cette apogée est sans doute proche désormais.

Alors pour le spectateur qui n'aurait vu aucun de ses spectacles précédents, c'est le choc indicible où tous les mots disparaissent au profit d'une intelligence de l'instinct figuré en des corps élastiques eux-mêmes livrés en proie au doute métaphysique.

" Au revoir parapluie ", c'est un " Bonjour tristesse " qui aurait recouvré son âme d'enfant ébahi par le monde originel mais qui aurait néanmoins la force de transgresser ses états d'âme en se projetant résolument dans l'avenir incertain.

En filiation exceptionnelle, voici James Thierrée petit-fils de Charlie Chaplin mais surtout à ses propres yeux la progéniture de parents, en l'occurrence l'acteur Jean-Baptiste Thierrée et la danseuse Victoria Chaplin fondateurs du cirque Bonjour, qui lui ont tout appris du monde de la piste depuis l'âge de quatre ans.

Ainsi en clôture du spectacle, l'adieu au chapiteau protecteur de l'enfance va-t-il être symbolisé par le profil forain d'une tente sur laquelle, à l'instar d'un vaste parapluie, se déversera une pluie féerique de petits volants blancs.

L'enchaînement des tableaux est structuré autour d'une gigantesque tresse de cordes suspendues aux cintres en compagnie de palans et autres crochets comme autant de points d'ancrage pour ces cinq acolytes se soustrayant aux lois de l'apesanteur dans des drapés de tempête titanesque.

Défi à la physique des corps, ce combat mélancolique livré contre soi-même apparaît comme une ouverture au monde, brèche par laquelle James Thierrée voudrait poursuivre son aventure spectaculaire sur d'autres registres.

Mais ceci sera une autre histoire!... Alors apprécions le chef d'oeuvre actuel.

Theothea le 11/04/08

DEUX PETITES DAMES VERS LE NORD

de  Pierre Notte

mise en scène  Patrice Kerbrat

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Théâtre de La Pépinière Opéra

Tel: 01 42 61 44 16

  

        Photo © Chantal Delapagne / Palazon 2008  

   

En partant d'un sujet émotionnel et intime, Pierre Notte a écrit une pièce déjantée où l'affection de deux soeurs trouvent un exutoire à l'emprise familiale qu'elles vénèrent autant qu'elles redoutent.

Si la maladie et la mort de la mère presque centenaire en sont le prétexte, c'est davantage la problématique des liens qui les unissent toutes trois à leur père reposant dans un cimetière aux environs d'Amiens qui prendra l'ascendant sur leur volonté brimée de profiter de la vie.

Aussi, pour se soulager du poids indicible de leurs sentiments et ressentiments, autant transgresser toutes les convenances et se lancer à corps et esprit perdus dans des tribulations de plus en plus insensées pour retrouver, telle une aiguille dans une botte de foin, la tombe dont elles ne connaissent que quelques indices topographiques.

A entendre les noms de lieux précis en Picardie dont il est originaire, Pierre Notte est de toutes évidences impliqué personnellement dans ce périple.

A la manière d'un road movie, la scène de la Pépinière Opéra va être le théâtre d'une succession de situations abracadabrantes dont chaque saynète constituerait une phase de catharsis relationnelle à travers laquelle les deux soeurs retrouveraient à leur insu mais en grande complicité, les jeux délirant de l'enfance.

La boîte de Pandorre étant ainsi offerte à un imaginaire sans limites, c'est peu de dire que Catherine Salviat et Christine Murillo, par ailleurs soeurs également dans leur vie privée, prennent un malin plaisir à composer deux personnages féminins qui n'auraient rien à envier à des " Pieds nickelés ".

Ayant passé l'une et l'autre de nombreuses années à servir la Comédie Française, ce n'est que justice de pouvoir enfin s'éclater au vu de tout le monde...

C'est à ce titre que la mise en scène de Patrice Kerbrat est particulièrement réjouissante, car il n'est pas certain que la thématique de Pierre Notte, elle, soit totalement aboutie.

En ne s'affranchissant pas résolument des scrupules familiaux, l'oppression se maintient à fleur de peau sans jamais se résoudre autrement qu'en faisant tourner en rond la dérision.

Pourrait-il y avoir, en effet, une réelle satisfaction là où subsisterait une gêne latente, celle de l'auteur, contrastant avec la délectation extravertie des comédiennes ?

Theothea le 16/04/08

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