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21ème
Saison
Chroniques 20.031
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20.035 Page
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Première Saturday Night Fever -
Palais des Sports © Theothea.com
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Palais des Sports © Theothea.com
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LE CABARET BLANCHE
de
Cristos Mitropoulos et Léo Guillaume
mise en scène
Cristos Mitropoulos et Léo
Guillaume
avec
Camille Favre-Bulle, Sylvain Deguillame,
Pierre Babolat, Benjamin Falletto, Patrick Gavard-Bondet, Stéphane
Bouba Lopez, Cristos Mitropoulos & Djamel Taouacht
|
****
Théâtre 14
Tel 01 45
45 49 77
|
En provenance quelque peu détournée des tranchées
de 14-18, via la distanciation buissonnière et néanmoins
créative du Music-Hall de lépoque, voici donc les acteurs
dun monde interlope, tenu éloigné du front des
hostilités, en écho à une réalité où
le spectacle pouvait se dresser en dernier rempart à la vilenie des
hommes.
Comme par un coup de baguette magique, Cristos Mitropoulos invente, sous
nos yeux médusés, le Cabaret Blanche, prétexte notamment
à revisiter cette fabuleuse période musicale où le
répertoire des artistes évoluait au sein dun imaginaire
surréaliste entre expressionnisme allemand et cinéma muet.
Nous y retrouvons toute une galerie de personnages burlesques qui va
accompagner lobjectif utopique de Pippo tentant de rejoindre les
premières lignes de défense du patriotisme engagé en
tant que tambour-major faute de navoir pu éviter dêtre
réformé pour cause de trop petite taille.
Violette, rencontrée grâce aux hospices heureuses de la
destinée, deviendra sa muse, son égérie et surtout sa
protectrice vigilante de tous les mauvais coups du sort aveugle à
la volonté existentielle dexister à part entière
au risque de sacrifier sa vie.
Mais pour lheure, sous le charme notamment des calembours de Sandrex,
le jeune homme devra réussir les épreuves probatoires que Blanche,
la Diva des lieux, dressera comme autant dobstacles à son
intégration dans leur communauté résistante au
laisser-aller, au renoncement ou autre résignation de mauvais aloi.
Mapiwa à la guitare, Marcel à la contrebasse et Djalil aux
percussions complèteront ce joyeux tableau fantastique où tous,
subjugués par la Drag-queen des années 1910, seront sur le
point dy accueillir ensemble le morceau de bravoure du spectacle, à
savoir larrivée vintage du père de Pippo, boulanger de
son état, complètement requinqué à la suite de
son repos forcé dans les limbes
se sublimant en
apothéose dans un formidable numéro de music-hall à
faire pâlir tous ceux dHollywood !
Ainsi, après avoir mis en piste récemment
« Ivo-Livi » ou le destin dYves Montand, la Team
Rocket Cie savère décidément au top de sa forme
musicale et de sa faculté onirique à ressusciter brillamment
les valeurs sûres, témoins dun siècle
passé.
Theothea le 23/01/17
|
LES AMOUREUX
de Goldoni
mise
en scène Marco Pisano
avec
Benoit Soles, Aphrodite de Lorraine,
David Halevim, Sophie Nicollas, Rotem Jackman, Yoann Sover & Elisa
Alessandro
|
****
Théâtre Déjazet
Tel 01 48
87 52 55
|
En 1759, Carlo Goldoni (1707~1793) a composé en quinze jours "les
Amoureux", une comédie écrite en prose qu'un autre italien,
venu de Rome pour l'occasion, Marco Pisano a mis en scène, en 2017,
dans la splendide salle de l'atypique Théâtre Dejazet.
Cette pièce traite des fléaux redoutables que la passion
entraîne sur des âmes sujettes à la jalousie, leurs transports
ridicules, leurs querelles pour un oui ou un non, leurs réconciliations
et leurs séparations sur le moindre soupçon
d'infidélité.
Eugenia aime follement Fulgenzio mais, poussée par une force obscure,
elle singénie à martyriser ce pauvre garçon. Elle
le veut pour elle toute seule exclusivement. Capricieuse, elle semble jouer
avec Fulgenzio comme avec un ours en peluche. Lui, en retour, prend la mouche,
sen va, prêt à rompre, mais revient sans cesse.
Même Flaminia, la sur aînée de cette jalouse
invétérée, avocate hors paire pour plaider en faveur
des amants, ne parvient pas à les raisonner, d'autant plus que l'oncle
Fabrizio, tuteur des deux filles, vieux farfelu qui oscille du coté
de Pantalone, bourgeois milanais désargenté couvert de dettes,
ne voit pas d'un bon oeil cette liaison et souhaite que sa nièce
épouse le riche comte Roberto dOtricoli.
Ce projet en perspective fait perdre la tête à notre jeune
premier, lequel, hébergeant provisoirement sa belle-soeur, provoque
l'ire de son amoureuse qui lui reproche dêtre le chevalier servant
de Clorinda.
On samusera à deviner la filiation de ces personnages avec
la Commedia dellarte complétée par la présence
de la servante Lisetta, délurée et pleine de bon sens et de
son alter ego valet, petit frère d'Arlequin.
Cependant, dans la pièce mise en scène par Marco Pisano,
on est loin du théâtre italien du 18ème siècle
et de sa fraîcheur acidulée. Voici un Goldoni au burlesque
appuyé, d'emblée désopilant, transposé dans les
années "soixante" avec moult chansons rétro diffusées
par un gros poste de radio et chorégraphies dansées ou contorsions
de twist qui relèvent davantage de la comédie musicale
américaine.
Les deux soeurs, cheveux crêpés, vêtues de robes "vichy"
gonflantes et chaussées d'escarpins et la gent masculine en jeans
et blousons ou habits bigarrés (costumes Christian Gasc) confèrent
un côté très "rock'n'roll" à cette adaptation
contemporaine qui surprend mais crée aussi une sorte de
distanciation.
Sur fond cubiste de grands cadres enchevêtrés les uns dans
les autres et un décor minimaliste à la Piet Mondrian selon
les couleurs primaires rouge-jaune-bleu, le parti pris est celui dune
modernisation épurée sans prétention, un petit meuble,
quelques chaises suffisent en effet.
Celles-ci sont surtout là, d'ailleurs, comme moyens utilisés
pour exprimer les sentiments exacerbés des protagonistes. Autour de
ces simples points dappui, Eugenia, Flaminia, Fulgenzio et les autres
sasseoient, se relèvent brusquement, changent de place et tout
un ballet sorganise au diapason de leur état de fureur ou
d'exaltation.
La fougue des comédiens est évidente dans cette mise en
scène joyeuse et déjantée, entraînée par
le savoureux et astucieux Benoît Solès jouant avec beaucoup
d'agilité le coléreux Fulgenzio réagissant au quart
de tour.
Cependant, une partie de la troupe a tendance à surjouer et la
voix trop haut perchée d'Eugenia interprétée par Aphrodite
de Lorraine peut agacer. Le rythme trop souvent survolté donne un
sentiment dagitation constante qui efface toute lémotion
que lon pourrait attendre de l'oeuvre.
Goldoni alterne les scènes comiques et dramatiques dans un langage
tour à tour bouffon ou lyrique. Il nous montre avec subtilité
et malignité les effets néfastes du sentiment amoureux porté
à son point extrême d'exaspération.
Dans la mise en scène de Marco Pisano, la farandole tourbillonnante
voire hystérique de ces Amoureux est privilégiée sur
le texte parfois débité avec un accent trop appuyé.
Reste une très belle énergie pour composer des personnages
truculents !
Les rires parsèment ce spectacle au fil des surprises farcesques.
Cest le plaisir du jeu qui compte ici : Celui de lamour et du
pouvoir agrémenté des codes de la Commedia que Goldoni a su
si bien renouveler.
Cats / Theothea.com le 21/02/17
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ENSEMBLE
de
& mise en scène Fabio Marra
avec Catherine Arditi, Sonia Palau, Floriane
Vincent & Fabio Marra
|
****
Théâtre du Petit Montparnasse
Tel 01 43 22 77 74
|
Serait-ce bien « normal » que dendosser
conjointement les casquettes dauteur, de metteur en scène et
dacteur pour les mettre toutes ensemble au service dun amour
tellement fusionnel quil en ferait perdre lintégrité
de la mère, lautonomie du fils et quil en ferait fuir
la sur bien décidée à survivre à cette
tyrannie du pouvoir familial ?
Posée ainsi de façon délibérément complexe,
la problématique de Fabio Marra pourrait a priori apparaître
comme déraisonnable mais si, a contrario, la marche à suivre
était de mettre à plat toute pathologie de façon à
faire la preuve du contraire par le sourire, la distanciation, en un mot
lhumanité des sentiments en suspens, alors la sortie victorieuse
du labyrinthe sociétal pourrait nêtre quune question
de bon sens.
Considérons le projet lors de ses débuts à La Luna
en Avignon Off 2015; Fabio Marra a déjà acquis la réputation
de savoir mettre en perspective les relations humaines en laissant
seffacer les barrières du non-dit.
Il lui aurait suffi décrire les pérégrinations
dune famille lambda prises au piège du léger handicap
initial qui se serait intensifié faute dune communication
adaptée à laccumulation des traumatismes successifs.
Ainsi se seraient installées les prémices dun cercle
vicieux prêt à ronger de lintérieur les nombreuses
preuves de bonne volonté manifestées par chacun des trois
protagonistes éprouvés par la disparition culpabilisante du
père.
Isabella, la mère, sévertuerait à trouver dans
le déni de dysfonctionnement comportemental de son fils la clef
universelle aux options engageant sa survie en collectivité.
Lui, Miquelé, impulsif sur-réagissant de manière
vitale à chaque frustration, chercherait dans la satisfaction
immédiate à ses velléités récurrentes
la tentative dun apaisement virtuel.
Quant à elle Sandra, ayant eu lopportunité de
sextraire de ce jeu destructeur, cest à pas comptés
quelle tenterait un retour nécessaire mais prudent vers la
malignité originelle avec lespoir chevillé de faire
progresser la situation familiale.
Voici donc venu le moment où Catherine Arditi pourrait entrer dans
ce jeu de la vérité bonne à expérimenter davantage
quà démontrer.
Sonia Palau serait alors la vaillante partenaire avec laquelle il lui
faudrait ferrailler, en intensité et profondeur, de manière
à ce que soit mis en question labsolutisme du pouvoir
maternel.
Un quatrième personnage, celui de Claudia, interprété
par Floriane Vincent, viendrait jouer les empêcheurs de tourner en
rond, voire même aider cette famille à trouver un meilleur
équilibre face au chaos relationnel.
Comment alors ne pas trouver judicieux que lauteur dun
récit, à la fois intime, universel et même métaphorique
des altérations occasionnées par interactivité avec
les différences sociales, puisse avoir une conception clairvoyante
du témoignage dramaturgique relatif à une réalisation
empreinte dhumour au second degré et quen conséquence,
il soit lui-même le meilleur vecteur pour faire passer sur scène,
avec grand talent, le nuancier du trouble fonctionnel ou mental ?
Il serait alors totalement approprié que Miquelé soit
incarné par son auteur-pygmalion, si tant est que lenjeu
représenterait le concert des difficultés que rencontre la
nature humaine pour assumer la vie
tous ensemble.
Theothea le 28/01/17
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ALMA MAHLER Eternelle
amoureuse
de Marc
Delaruelle
mise
en scène Georges
Werler
avec Geneviève Casile, Julie
Judo & Stéphane Valensi
|
****
Théâtre du Petit Montparnasse
Tel 01 43 22 77 74
|
Le Théâtre nous offre souvent de véritables joyaux.
Et là, nous avons droit à un diamant brut
Une Reine à
la grâce absolue, lhéroïne tragique qui a joué
Electre, Célimène, Bérénice, Andromaque ou Marie
Stuart, Elisabeth dAngleterre, dans un autre registre la comtesse du
Mariage de Figaro de Beaumarchais, qui a su saventurer sur des terres
risquées avec des auteurs contemporains, incarne actuellement, sur
la scène intimiste du Petit Montparnasse, une femme célèbre,
altière, singulière et mystérieuse.
Une comédienne exceptionnelle donne corps à une dame
dexception. Mlle Geneviève Casile, Sociétaire honoraire
de la Comédie-Française ayant passé plus de trente ans
dans la Maison de Molière, aime les personnages amoraux; on lavait
vu récemment avec Madame Erlynne, mondaine sulfureuse, dans "
LÉventail de Lady Windermere " dOscar Wilde.
Aujourdhui, auréolée dune étole flamboyante
qui rehausse la luminosité de son visage et la blondeur de sa chevelure,
elle est corps et âme Alma Mahler, la femme fatale par excellence,
qui a fait tourner les têtes, passant dun homme à un autre,
nobéissant quaux mouvements de son cur, avec la
même exaltation qui la caractérisera tout au long de sa vie.
La pièce de Marc Delaruelle est construite sur une série
de retours en arrière. Tout commence à New York dans les
années 1960 où est installée Alma Mahler veuve et
vieillissante.
Elle a écrit ses souvenirs et attend son éditeur sur un
canapé dépoque aux formes arrondies derrière lequel
trône en permanence une bouteille. Ce détail est important car
il sagit de la "fameuse" Bénédictine, boisson dont elle
aura eu tendance à abuser, occasionnant une réplique très
drôle: "la Bénédictine ne supporte pas le dé à
coudre!".
Ne tolérant aucune contrariété, Alma
sénerve, vitupère devant larrivée tardive
de celui qui doit corriger les épreuves de ses mémoires avant
publication. Et cest à partir de cette relecture faite ensemble
dans son salon quon jonglera entre la narration de ses confessions
et le revécu des étapes marquantes de sa vie.
Le procédé consistera à se glisser derrière
des rideaux lamés or translucides et ainsi, une Alma jeune,
interprétée par la merveilleuse Julie Judd, toute en finesse,
vient se substituer à lAlma de 80 ans pour revivre avec une
conviction intense les scènes de son existence dans la nébuleuse
artistique viennoise et ses liaisons avec des hommes talentueux, tous
interprétés par le délicat Stéphane Valensi qui,
figure protéiforme aidée par un accessoire ou un costume, sera,
tour à tour, son premier amour lillustre peintre Gustav Klimt
de vingt ans son aîné, Gustav Mahler le génie musicien
quelle épousera, lexcentrique peintre Oskar Kokoschka
dont lamour débordant finira par dépasser les bornes,
larchitecte Walter Gropius, fondateur du Bauhaus, le poète Franz
Werfel quelle dominera jusquà un prêtre, le père
Hollsteiner, théologien réputé dont elle
séprendra.
Dans la subtile mise en scène de Georges Werler, Alma dépose
avec arrogance au fur et à mesure de son récit, dans un landau
placé côté cour, des reliques de ces artistes remarquables,
ainsi une partition de Malher, un portrait de Kokoschka, un poème
de Werfel comme si elle réglait ses comptes avec la gent masculine
et tentait de se débarrasser de leurs empreintes forgées à
jamais qui lont empêchée dêtre pleinement
elle-même, tels des oripeaux quelle ôterait pour se
revêtir des atours de la mondaine quelle fut, brillante et
extravagante.
Alma Mahler a connu beaucoup de frustrations dont la plus grande fut de
ne pas être reconnue comme la grande musicienne quelle rêvait
de devenir ayant dû renoncer à composer. Malgré sa
rancur, elle exhibait la joie et la fureur de vivre. Elle a enveloppé
les hommes aimés de lumière et dénergie
créatrice aux dépens de sa propre création.
Dans un ambiance élégante, on est porté sur le fil
de cette existence hors du commun, déroulé dans le temps par
la parole volubile et exubérante dAlma que la sublime et
charismatique Geneviève Casile rend puissamment vibrante.
"Dupliquée" en miroir par Julie Judd dont le beau visage expressif
vient se juxtaposer au sien rayonnant et solaire, elles se fondent toutes
les deux pour embrasser, au Petit Montparnasse, une seule et même Alma
poignante et enflammée avec un sacré brin dinsolence
acidulée voire sarcastique. Un régal démotions
!
Cats / Theothea.com le 07/02/17
|
LE BAL
de
Irène Nemirovski
mise
en scène Virginie
Lemoine
avec
Lucie Barret, Brigitte Faure, Serge Noël, Françoise Miquelis
& Pascal Vannson
|
****
Théâtre Rive Gauche
Tel 01 43 35 32 31
|
Virginie Lemoine, passionnée de théâtre, est sur tous
les fronts. Artiste protéiforme, elle est à l'affiche en tant
que comédienne dans "Piège mortel" de Ira Levin au La
Bruyère. Après avoir mis en scène une comédie
musicale "31", reprise actuellement au studio des Champs-Elysées,
qui a connu un franc succès au dernier festival "off" d'Avignon, elle
vient de concrétiser un projet longtemps mijoté, celui d'adapter
un roman d'une soixantaine de pages "le Bal" d' Irène Némirovsky
écrit en 1928, et nous en livre aujourd'hui, au Rive Gauche, sa version
théâtrale.
Irène Némirovsky na pas eu une enfance heureuse. Bien
quelle soit née dans une famille riche, elle a souffert
douloureusement dune mère égocentrique qui na jamais
eu lenvie de donner une éducation personnelle à sa fille.
Son court récit dépeint de manière cynique les
rapports mère-fille ramenant lauteur à sa propre
expérience. Cette part autobiographique est importante car elle renforce
lidée quIrène Némirovsky nest autre
que la protagoniste principale: Antoinette.
C'est l'histoire d'une famille modeste qui devient riche du jour au lendemain
et délaisse les anciennes habitudes pour se précipiter dans
les mondanités. Ils habitaient un immeuble minable derrière
l'Opéra comique, rue Favard. Ayant réalisé des
gains féeriques grâce à de bénéfiques
transactions boursières, Rosine et Alfred Kampf ont emménagé
dans un quartier chic de Paris et veulent désormais fréquenter
des personnes de la haute société. Cest pourquoi,
ils décident dorganiser chez eux un bal en invitant des personnes
issues de milieux aisés. Ils veulent se faire connaître, mais
aussi faire partie du milieu des personnes de haut rang pour se sentir
valorisés.
Antoinette, une adolescente de 14 ans, essaie de négocier sa
présence au bal, mais sa mère sy oppose
catégoriquement, en la rabaissant comme à son habitude. Cependant,
la jeune fille est chargée de la rédaction des 200 cartons
dinvitation pour la réception.
La pièce mise en scène par Virginie Lemoine est jubilatoire
de cruauté. Elle se moque de ces parvenus vulgaires et ridicules dans
leur appétit de rivaliser avec le Gotha des Années folles,
qui se chamaillent grossièrement pour sélectionner leurs
invités. Dans des scènes de ménage courtelinesques
et drolatiques, Rosine parle toujours trop fort, elle s'esclaffe, braille,
s'en prend à Alfred qui manque d'envergure.
Elle est campée avec une tapageuse prestance par Brigitte Faure
et Serge Noël prête ses traits au mari faible et cependant roublard.
Tous les deux ne font pas dans la dentelle. Ils forment un couple ahurissant
dans les excès et le manque de délicatesse.
Antoinette rêve aussi de faire son entrée dans le monde,
surtout pour rencontrer l'amour. Lucie Barret lincarne avec beaucoup
de malice car Antoinette, sous couvert d'une modeste apparence dans sa blouse
bleue d'écolière et ses tresses à macarons, est un
personnage autrement plus complexe que ce symbole denfance bafouée.
Au fur et à mesure du déroulement du récit, l'adolescente
dévoile des sentiments de plus en plus ambigus vis à vis de
sa mère. Elle devient machiavélique au point de finir par jeter
les enveloppes dinvitation dans la Seine. Elle n'en remettra
qu'une seule, celle adressée à sa professeure de piano,
Mademoiselle Isabelle, femme revêche et envieuse de leur situation.
Françoise Miquelon la joue Folcoche, véritable harpie, pincée
et raide dans ses souliers.
Accompagnant sa seule présence à cette réception,
les scènes cocasses se succèdent; celle des gâteaux secs
et de lapéritif est particulièrement drôle. Pas
question de sortir le caviar en l'absence des autres convives. A onze
heures et demie, Madame Kampf finit par décréter que le bal
naura pas lieu. Mademoiselle Isabelle, estomaquée, rentre alors
chez elle, non mécontente de léchec de la soirée
organisée par sa cousine.
Tout de suite après son départ, une violente dispute conjugale
éclate entre les époux Kampf, dans laquelle ils sinsultent
et chacun dégaine de violents reproches à la figure de l'autre.
Monsieur Kampf quitte la maison et sa femme ôte brutalement ses bijoux
clinquants et pique une crise de nerfs.
Antoinette, avec son air de sainte-nitouche, s'approche tranquillement
de sa mère et se tournant vers le public, d'une voix doucereuse, dit
: "pauvre maman"! Celle-ci la repousse avant de finalement la prendre
dans ses bras en lui promettant quelle se consacrera désormais
à elle, délaissant le luxe et son goût pour le faux-semblant.
Antoinette est la grande gagnante de cette histoire, car elle a
trouvé ce qui lui faisait défaut jusque-là :
laffection de sa mère. En développant à
lextrême son pouvoir de nuisance, elle lui a démontré
quelle nest plus une enfant mais bien une adulte.
Dans un décor laqué de paravents aux motifs floraux
orangés et arabesques et un mobilier "Art Déco" design, l'il
extérieur d'un domestique pas dupe, interprété par Pascal
Vannson, regarde un brin moqueur la famille Kampf se désagréger
et exploser. La mise en scène de Virginie Lemoine est
décapante, les comédiens se délectent à caricaturer
l'avidité gloutonne de ces "nouveaux riches" et tournent la noirceur
et le cynisme de la pièce du côté du rire en faisant
de cette comédie de murs un vaudeville au rythme enlevé.
Ce soir-là, Virginie Lemoine revenait sur scène, après
les saluts, accompagnée par Olivier Philipponnat, le biographe
d'Irène Némirovsky & Nicolas Dauplé, le
petit-fils d' Irène Némirovsky pour discuter avec les spectateurs
du Bal et les éclairer sur son auteure née en 1903 à
Kiev.
Celle-ci séteindra le 17 août 1942, à
lâge de 39 ans, lors de sa déportation à Auschwitz.
Irène est la seule femme littéraire à avoir reçu
le Prix Renaudot alors quelle nétait plus de ce monde.
Ce titre lui a été accordé pour le roman " Suite
française " qui a été publié en 2004 grâce
à sa fille Denise.
Cats / Theothea.com le 11/02/17
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©
DR.
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Débat du 30/01/17 avec Virginie Lemoine, Olivier Philipponnat
& Nicolas Dauplé ©
Theothea.com
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